Présentation Coupe du monde 2023 : La France

 

Par Le Stagiaire,

 

Tout au long de l’été, la Boucherie Ovalie vous a présenté en détails les 20 équipes qualifiées pour la Coupe du monde 2023. Basé sur le modèle de ce qui avait été publié dans le livre La Découpe du monde du rugby en 2019, ces fiches pays vous ont offert un cocktail de ce que nous savons faire de mieux depuis désormais plus de 10 ans : un savant mélange d’analyses pointues, d’informations approximatives et de blagues douteuses. Aujourd’hui, jour du début de la compétition, c’est l’heure de la dernière fiche, celle du pays hôte, la France. Et pas n’importe laquelle : la France d’Antoine Dupont.

 

Fiches déjà publiées :

Le Chili

Le Portugal

La Roumanie

La Namibie

Les Samoa 

L’Écosse

La Géorgie

Le Tonga

L’Uruguay

Les Fidji

L’Italie

L’Argentine

L’Australie

Le Japon

L’Irlande

Le pays de Galles

L’Angleterre

L’Afrique du Sud

La Nouvelle Zélande

 

La France

 

Notation :

French Flair : +

Dépossession : +

French Chatte : +

Romain Ntamack : – – –

 

L’emblème :

 

 

À l’heure de choisir un emblème pour leur équipe, la plupart des nations sont tombées dans la facilité en optant pour une fleur, parce que ça fait joli, ou un fauve, parce que ça fait méchant (les plus immatures sont mêmes allés jusqu’à choisir un dragon). Le Français, là encore, s’est illustré par sa capacité à ne rien faire comme les autres, jetant son dévolu sur un animal ridicule mais néanmoins orgueilleux : le coq. Un gallinacé qui ne sert pas à grand chose, si ce n’est à faire chier son monde en hurlant très fort. Il faut reconnaître qu’il était difficile de trouver un animal symbolisant aussi bien un peuple et son équipe de rugby.

 

L’équipe :

« J’ai mal à ma France ». Voilà le genre de phrase qu’on entend souvent ces derniers temps, et qui donne rarement envie de poursuivre la conversation pour savoir ce que veut dire son auteur. Pourtant, si on parle de rugby, il peut s’agir d’un raisonnement parfaitement légitime.

 

 

Car elle est où, la France qui fait une finale de Coupe du monde en faisant une moyenne de 35 fautes par match comme en 1987 ? Elle est où, la France qui malgré un jeu flamboyant, doit s’incliner face à un plan perfide et vicieux de l’ennemi anglois comme en 1991 ? Elle est où, la France qui se fait voler par l’arbitrage et un repris de justice comme en 1995 ? Elle est où, la France qui sort le match du siècle avant de dire « ah oui, il reste la finale c’est vrai… un peu la flemme » comme en 1999 ? Elle est où, la France qui ne peut être vaincue que par des phénomènes météorologiques surpuissants (une averse) comme en 2003 ? Elle est où, la France qui est plus à l’aise quand elle joue ses matchs à l’étranger alors que la compétition se déroule sur son territoire comme en 2007 ? Elle est où, la France des sales gosses, que tout le monde critique et qui va en finale pour perdre le seul match du tournoi qu’elle méritait de gagner comme en 2011 ? Elle est où, la France qui… bon ok, la France de 2015 et de 2019 ne manque probablement à personne.

 

 

Ce qui est sûr, c’est que la France de 2023 ne ressemble à rien de tout ça. Elle est brillante, sérieuse, appliquée, rarement contrariée et encore moins contrariante. Elle gagne sans trembler et presque rien ne semble pouvoir la perturber : ni un fait de jeu défavorable, ni un adversaire coriace, ni un mauvais rebond. Même quand elle nous ennuie un peu, elle finit par nous brandir sa victoire au visage d’un air de dire « Alors, t’es pas content pauvre con ? Tu vas te plaindre parce qu’on a gagné avec seulement 30 points d’avance contre l’Australie ou le pays de Galles ? On n’a pas assez relancé de notre but pour Môssieur ? Môssieur n’a vu que trois essais en première main ? Il est déçu parce que pendant 20 minutes, on a été un peu dominés ? Après tout ce que t’as vécu depuis 10 ans, tu vas vraiment oser ouvrir ta gueule ? ». Et il faut bien reconnaitre que c’est difficile de complètement lui donner tort. Avec ses datas, ses trois plans de jeu, son staff de 40 personnes sur-qualifiées, ses joueurs biberonnés à la victoire : tout le monde nous envierait presque.

 

 

D’ailleurs, qui aujourd’hui, miserait sur une victoire de l’Italie le 6 octobre ? Personne. Il y a quelques années encore, à quelques heures de ce match, on se demanderait sans doute si la France allait s’imposer de 40 points ou perdre honteusement. On se demanderait quelle France allait sortir des vestiaires : celle avec des fourmis dans les jambes, qui relance tous les ballons sans réfléchir, ou celle qui va se saborder avec fracas devant le regard affligé de son public. Aujourd’hui, cette France instable et torturée comme une adolescente emo est devenue adulte. Elle s’est responsabilisée et obtient une promotion tous les ans. Finies les conneries, il y a un loyer à payer (celui du Stade de France) et des dettes à rembourser (celles de Bernard Laporte).

 

Cette complicité entre Romain Ntamack et Antoine Dupont va nous manquer…

 

 

Certes, on va vibrer le 8 septembre face aux All-Blacks mais quelle que soit l’issue, le résultat sera modéré par un enjeu limité. Et il faudra sans doute attendre un mois de plus pour trembler à nouveau. Entre temps, personne n’en doute, le boulot sera fait proprement lors d’une petite tournée en province qui aura plus des airs d’opération de relations publiques que de compétition de rugby. Une petite démonstration contre l’Uruguay, une exhibition contre la Namibie, une équipe italienne qui se fera bien bien respecter… Pas de rebondissements spectaculaires, de groupe en autogestion, de clash avec une presse injuste…

 

 

À moins que… Échappe-t-on vraiment à sa nature ? La notion de destin existe-t-elle ? Alors qu’on n’a jamais eu une vision aussi claire de ce qui attend nos Bleus (une bataille pour la première place en poule, un défi immense en quart face à l’Irlande ou l’Afrique du Sud, une demi-finale accessible et un dernier combat difficile en finale), la France peut-elle nous surprendre ? Les événements de ces derniers jours, entre grand déballage de casiers judiciaires et embrouilles avec la Fédération Française de Twirling bâton, a de quoi interroger.

 

 

Peut-on envisager, si ce n’est pour le bien de rugby français, au moins pour le plaisir de l’humour, des scénarios inattendus ? Une victoire héroïque contre la Nouvelle-Zélande suivie d’une défaite inexplicable face à l’Uruguay qui rend le match face à l’Italie beaucoup plus incertain ? Une défaite face à la Nouvelle-Zélande et un événement imprévu (tempête, épidémie) qui force l’annulation du match face à l’Italie et fait se jouer la deuxième place aux points de bonus ? Nous pardonnera-t-on le vice d’espérer secrètement voir quelques cagades ridicules, des relances suicidaires, des bagarres inutiles, des soupçons paranoïaques de complot arbitral ? Osera-t-on imaginer une délégation de joueurs pris dans une grève SNCF, une chambre d’hôtel saccagée après une victoire trop arrosée ou une table de chevet vengeresse s’en prenant un à un aux joueurs de l’équipe ? Serons-nous stupéfait par la bêtise d’un avant qui fait un mauvais geste inutile à la troisième minute d’un match, geste diffusé en mondiovision et parfaitement capturé par les 18 caméras à proximité ? Ou par une remontada fantastique après avoir été menés de 20 points face à la Namibie ? Pourra-t-on l’espace d’une action, s’amuser mi-fier mi-honteux, devant Ramos qui rate une pénalité importante face aux poteaux, Villière qui échappe un ballon dans l’en-but, Atonio qui fait une course de 40 mètres, Alldritt qui tente un drop ou Bernard Laporte qui se bat avec Florian Grill en tribunes ?

 

 

Pour beaucoup, ce genre de petites réjouissances ne vaut sans doute pas qu’on sacrifie un trophée. Mais pendant les longues semaines de cette compétition interminable, avouez qu’ils nous permettraient au moins de nous amuser. Et éventuellement de nous souvenir pourquoi malgré tout ce qu’on a traversé depuis dix ans, on a continué à les encourager.

 

 

Le joueur à suivre :

Pas facile de sortir une individualité au milieu de ce collectif composé de joueurs talentueux. Bon ok, à part Antoine Dupont, mais que peut-on écrire sur lui qui n’a pas déjà été dit (ou prédit comme dans notre portrait de lui dans notre nouveau livre) ?

 

Pour cette Coupe du monde, on va plutôt suivre les aventures de Damian Penaud. Plus haut, on réclamait au XV de France un peu plus de folie, de bêtise et d’humour. Lui possède les trois en grande quantité. Capable de traverser le terrain à n’importe quel moment de la rencontre, il peut défier les lois de la physique et de l’intelligence sur une même action. Fan d’échecs et de cartes Pokémon, on l’imagine aisément chercher à échanger ces dernières plutôt que son maillot à la fin d’un match. Armé de son autodérision et de son absence totale d’égo, il assure aussi le spectacle en dehors des terrains, à base de grimaces, de blagues potaches ou d’embrouilles avec des stars de téléréalité. C’est le facteur « chaos » de cette équipe : aussi bien capable de faire un chat-bite à Emmanuel Macron que de créer un incident diplomatique en célébrant un essai.

 

Mi-meilleur joueur du monde, mi-labrador : Damian est une incroyable source de divertissement. À ce stade, il n’est d’ailleurs pas exclu que le scénario de Air Bud 6 soit directement inspiré de sa carrière et qu’il en tienne le rôle principal.

 

“Vas-y Damian, sois naturel !”

 

 

Calendrier :

contre la Nouvelle-Zélande, le vendredi 8 septembre à Paris (21h15)

contre l’Uruguay, le jeudi 14 septembre à Lille (21h)

contre la Namibie, le jeudi 21 septembre à Marseille (21h)

contre l’Italie, le vendredi 06 octobre à Lyon (21h)

 

 

Le scénario idéal :

La France, c’est aussi le pays des branleurs. Pour être cohérent avec mon sujet, je vais donc m’économiser des heures à essayer d’écrire un scénario idéal et vous renvoyer directement vers cet excellent article d’Ovale Masqué qui le fait déjà (et rdv ici pour la partie 2). Un peu comme un élève qui ne fout rien sur un projet et se greffe à un groupe la veille du rendu, juste pour ajouter son nom.

 

À quoi ça peut tenir une Coupe du monde…

 

 

Le scénario catastrophe :

Vendredi 8 septembre. Après des hymnes où on sent les Français particulièrement remontés, les All-Blacks prennent place pour leur traditionnel haka. Alors qu’ils débutent leur chorégraphie, les Français se placent torse-nu face à eux et commencent à faire des burpees, des talons-fesses et des squats (une idée de Thibault Giroud pour montrer à leurs adversaires à quel point ils sont affutés). Malheureusement, l’intensité qu’ils mettent est telle que Marchand et Ramos se font une blessure musculaire et doivent être remplacés juste avant le coup d’envoi. La suite du match ne sera pas beaucoup plus réjouissante pour les Bleus. Remontés après leur défaite face aux Sud-Africains, les All-Blacks font honneur à leur réputation et roulent sur des Français dépassés qui perdent Jalibert et Cros sur blessure. Score finale 35-12 pour les visiteurs.

 

La défaite porte un coup au moral des Bleus, mais la compétition est loin d’être terminée. Les Français promettent de se venger sur les pauvres Uruguayens. Et en effet, quelques jours plus tard, le XV de France passe plus de 60 points à son adversaire. Seule ombre au tableau : Atonio se claque sur une tentative de cadrage débordement et Gabin Villière doit sortir sur protocole commotion après qu’Alldritt lui a mis une claque derrière la tête pour le féliciter de son deuxième essai.

 

La semaine suivante face à la Namibie, le staff décide de faire tourner pour ne pas prendre de risque mais là aussi, malgré une large victoire, c’est l’hécatombe dans le groupe des finisseurs. Hastoy se déboite l’épaule en se recoiffant pendant l’échauffement et Macalou se fracture un doigt en tentant d’intercepter une gourde négligemment lancée par un préparateur. Pire, enfin de retour, Jelonch se fait les croisés (mais l’autre genou) sur le premier ruck et Alldritt se fait un lumbago sur une course de 30 mètres où il porte trois namibiens sur son dos.

 

Décimée avant d’affronter l’Italie pour le match de la qualification, le XV de France ne voit pas sa poisse s’arrêter là. Convoqué pour faire face aux nombreux forfaits, Gailleton ramène sans le savoir la COVID dans le groupe. À quelques heures du match, Penaud, Fickou, Woki, Dulin et Mauvaka le rejoignent à l’isolement. Obligés d’aligner une équipe expérimentale, les Bleus balbutient leur rugby et sont menés par de valeureux italiens. L’intensité du combat envoie encore trois joueurs sur la touche et un autre en protocole commotion. Menés de quatre points à deux minutes de la fin, les Français voient le spectre de l’élimination se rapprocher. C’est le moment choisi par Antoine Dupont pour prendre les choses en main. Au départ d’un ruck, il élimine trois adversaires avant de plonger dans l’en-but pour aplatir en coin. Les Bleus assurent leur qualification sur la sirène.

 

Malheureusement, en serrant son capitaine dans ses bras pour célébrer son essai, Taofifenua lui fêle deux cotes. En zone mixte, le demi de mêlée révélera que depuis le début de la compétition, il avait été victime d’une élongation, d’une torsion du coude, d’une méningite et d’une amputation mais qu’il avait tenu à taire la douleur pour continuer à aider l’équipe. Cette nouvelle blessure le contraint cependant à déclarer forfait pour la suite du tournoi.

 

Sans surprise, ce dernier ne durera de toute façon pas longtemps pour les Bleus. Obligée d’aligner une équipe composée de Thomas Jolmes, Teddy Thomas, Mickael Ivaldi, Etienne Falgoux et Camille Lopez en quarts de finale, l’équipe de France est corrigée 54 à 8 par l’Afrique du Sud et voit son rêve bleu se briser dans une indifférence presque générale.

 

Nos fiches de présentation vous ont plu, vous en voulez encore et/ou vous avez envie de nous soutenir à votre façon ? Alors on vous recommande encore une fois (oui, on force) d’acheter/offrir notre nouveau consacré au XV de France. Clique ici !

 

 

Présentation Coupe du monde 2023 : L’Irlande

 

 

Tout au long de l’été, la Boucherie Ovalie vous présente en détails les 20 équipes qualifiées pour la Coupe du monde 2023. Basé sur le modèle de ce qui avait été publié dans le livre La Découpe du monde du rugby en 2019, ces fiches pays vous offriront un cocktail de ce que nous savons faire de mieux depuis désormais plus de 10 ans : un savant mélange d’analyses pointues, d’informations approximatives et de blagues douteuses.

 

 

Fiches déjà publiées :

Le Chili

Le Portugal

La Roumanie

La Namibie

Les Samoa 

L’Écosse

La Géorgie

Le Tonga

L’Uruguay

Les Fidji

L’Italie

L’Argentine

L’Australie

Le Japon

 

L’Irlande

 

Notation :

Se tenir à carreau : + +

Qui s’y frotte s’y pique : + + +

Équipe qui a du coeur : + + + +

XV du trèfle : – – – – –

 

 

L’emblème :

 

L’emblème de l’équipe d’Irlande est le trèfle. Enfin du moins, c’est ce qu’on essaie de vous faire croire. Car oui, on vous ment. Heureusement, grâce à son minutieux travail d’investigation (10 minutes sur Wikipédia), la Boucherie est en mesure de rétablir la vérité et la justice. En effet, le symbole de l’Irlande n’est pas vraiment un trèfle, mais un shamrock, soit une « feuille d’oxalis petite oseille » (c’est comme une feuille d’oxalis, mais en moins cher).

 

On la distingue du trèfle car le trèfle a des feuilles arrondies, contrairement à la feuille d’oxalis qui a des feuilles en forme de cœur. Toujours est-il que c’est cette plante qu’a choisi l’équipe de rugby pour la représenter. On pourrait s’interroger sur ce choix mais les autres symboles du pays étant la harpe et le Leprechaun, il est finalement un moindre mal.

 

 

L’équipe : 

« Cette année, c’est la bonne » ! ». C’est sans doute ce que pensent des milliers de supporters irlandais alors que la Coupe du monde s’apprête à démarrer. Car si plus d’une dizaine de désillusions n’avaient pas réussi à résigner les Clermontois, ce ne sont pas les Irlandais et leur fighting spirit qui vont se laisser abattre par sept éliminations en quarts de finale de Coupe du monde (en neuf participations). Quand bien même un destin décidément aussi farceur qu’un gnome rouquin leur laisserait-il entrevoir une inévitable opposition contre la France ou la Nouvelle-Zélande début octobre. À croire qu’il manque décidément une feuille à leur  trèfle pour les aider à battre la malédiction.

 

Car oui, la statistique peut sembler folle mais l’Irlande n’a jamais gagné de match à élimination directe de son histoire (n’allez pas me chercher une compétition foireuse des années 30 pour me faire mentir svp). Pourtant, le « XV de la feuille d’oxalis petite oseille » a parfaitement négocié le virage du professionnalisme et domine régulièrement le classement World rugby depuis plusieurs années.

 

Lors de cette nouvelle édition, elle fera partie des équipes favorites. Et au delà de la force collective déjà largement démontrée (notamment lors du dernier tournoi), on comprend pourquoi quand on regarde le XV de départ et son ossature « made in Leinster » qui devrait raviver des souvenirs traumatiques chez tous les supporters toulousains.

 

On trouve du lourd à tous les postes et les joueurs, pour leur majorité, arrivent à « l’âge de la maturité ». En langage rugby , cela signifie qu’ils sont suffisamment vieux pour avoir la force de l’expérience sans pour autant avoir cumulé suffisamment de commotions dans leur carrière pour développer une démence précoce (exception faite de Sexton bien sûr, et de Caelan Doris qui en est déjà à 5 et a déjà dû faire une pause dans sa carrière pour cette raison).

 

À leur tête c’est un anglais qui tire les ficelles, et pas n’importe lequel puisque – figurez-vous Cali – qu’il s’agit du père d’Owen Farrell, Andy. Autant dire qu’il ne reculera devant aucune vilénie pour atteindre ses objectifs.

 

L’Irlande devrait en tout cas démarrer la compétition en douceur, avec un premier match contre la Roumanie, puis un deuxième contre les Tonga qui feront office d’apéritif avant le grand choc de la poule face à l’Afrique du Sud. L’enjeu de cette rencontre, au delà de savoir qui en sortira victorieux, sera sans doute de savoir qui en sortira vivant, puisqu’il restera au moins un match à disputer ensuite pour chacune des équipes. Heureusement pour les tout-roux, ils bénéficieront de 15 jours de repos avant d’affronter l’Écosse, un match « piège » en perspective avec des Écossais capables de tout : en prendre 40 comme gagner en faisant le match de leur vie sous la houlette d’un Finn Russell en mode Yionel Beauxis.

 

Hugo Keenan rend ici hommage à Leo Cullen

 

 

Le joueur à suivre :

Puisque la star de l’équipe Johnny Sexton sera déjà suivie par un staff médical d’une vingtaine de personne, on vous recommande de vous tourner vers un autre joueur pendant la compétition. Mack Hansen a un look de débile et Lowe va sans doute inscrire un quadruplé contre la Roumanie, ce qui en font des coqueluches faciles. Pour vous distinguer, on vous recommande plutôt de jeter votre dévolu sur l’arrière Hugo Keenan (qui a une bonne tête de potentiel MVP de la compétition en cas de bon parcours de son équipe) ou sur Josh Van Der Flier, l’homme qui a réussi à être élu meilleur joueur du monde 2022, devant Antoine Dupont (la légende dit qu’Antoine Dupont préférait finir deuxième pour être au soutien intérieur du premier sur le podium).

 

Mais on vous conseille surtout de garder un oeil sur Dan Sheehan. Le talonneur est déjà bien connu des Français qui ont croisé sa route en Champions Cup (essai contre Toulouse, doublé contre La Rochelle). Gaulé comme un centre, puissant comme un troisième ligne, débile comme un seconde ligne, avec la technique individuel d’un arrière, Sheehan est le croisement quasi-miraculeux entre Keith Wood et Brian O’Driscoll. Ah, et son nom ressemble un peu à celui d’Ed Sheeran, donc c’est rigolo.

 

Joueur clé pour cette sélection Irlandaise, on a frôlé le drame national quand il s’est blessé face à l’Angleterre il y a quelques jours. Les supporters se lamentaient sur les réseaux sociaux, jurant à qui voulait l’entendre qu’il était irremplaçable et que tout était perdu. Un peu comme si les Bleus perdaient Romain Ntamack, en quelque sorte. Heureusement, plus de peur que de mal et les Irlandais devraient pouvoir compter sur le talent du talon pendant la compétition. On va tâcher d’en profiter aussi, du moins jusqu’à ce que sa route ne croise la nôtre.

 

 

Dan Sheehan et un fan

 

Calendrier :

contre la Roumanie, le samedi 9 septembre à Bordeaux (15h30).

contre les (le ?) Tonga, le samedi 16 septembre à Nantes (21h).

contre l’Afrique du Sud, le samedi 23 septembre au Stade de France (21h).

contre l’Écosse, le samedi 07 octobre au Stade de France (21h).

 

Le saviez-vous ? L’oxalis est une saloperie de plante invasive, dont il est particulièrement
difficile de se débarrasser. Contrairement à l’Irlande en quart de finale.

 

 

Le scénario idéal :

Après une phase de poules où l’équipe monte en puissance (victoire face à l’Afrique du Sud puis déculottée infligée à l’Écosse), l’Irlande aborde son quart de finale face à la France avec un mélange de confiance liée aux derniers résultats et une trouille irrationnelle liée à « la malédiction » dont tout le monde parle. Malgré le soutien de son public, le XV de France n’arrive cependant pas à endiguer la puissance irlandaise. L’arrivée dans le staff d’une certain Emmet a de plus permis aux visiteurs d’élargir leur palette tactique et de les rendre beaucoup moins prévisibles. Après un match maitrisé de bout en bout, l’Irlande se qualifie finalement pour la première fois dans le dernier carré d’une Coupe du monde.

 

La qualification est célébrée partout dans le pays et le blocage psychologique qui semblait paralyser les Irlandais lors des éditions précédentes est maintenant de l’histoire ancienne. Les Irlandais roulent sur l’Australie en demi-finale et abordent la finale face aux All-Blacks sans aucun complexe. Après un match fou et débridé (12-10 score final), l’Irlande remporte son premier trophée Webb-Ellis. L’impact de cette victoire dépasse rapidement le cadre du sport et précipite des mouvements géopolitiques majeurs. Arrivés avant dernier de leur poule, les Anglais sont moqués et raillés. Ne voulant plus être associés de près ou de loin à « ces gros nullos », dixit l’ambassadeur écossais à l’ONU, le Royaume-Uni éclate définitivement. Gallois et Scottish prennent leur indépendance et l’Irlande est enfin réunifiée. Jonathan Sexton, lui, a déjà tout oublié et met un terme à sa carrière, déçu de n’avoir jamais remporté le trophée suprême.

 

Ça c’est son look normal, alors imaginez ce qu’il est capable de faire
si l’Irlande gagne la Coupe du monde…

 

Le scénario catastrophe :

Après deux victoires faciles face à la Roumanie et aux Tonga, les Irlandais affrontent l’Afrique du Sud dans un match que World Rugby a interdit aux moins de 18 ans après avoir pris connaissance des compositions d’équipe. Dans un match héroïque, le XV du truc qui ressemble à un trèfle s’impose finalement face aux sud-africains. Mais le tribut pour cette victoire est lourd à payer : trois joueurs sont abattus directement sur le bord du terrain pour abréger leurs souffrances, six autres perdent toute mobilité des membres inférieurs et quatre prennent leur retraite internationale à la fin de la rencontre, préférant se reconvertir dans une profession moins dangereuse comme caricaturiste de presse en Irak ou commando parachutiste. Seul Jonathan Sexton s’en sort indemne.

 

Le temps de reconstituer un groupe décimé, les Irlandais déclarent forfait face à l’Écosse et, grâce aux bonus accumulés, se qualifient néanmoins en quart de finale. Ils y affrontent la France et malgré les nombreux absents, réussissent à faire jeu égal. Néanmoins, plusieurs fois durant le match, des actions litigieuses tournent en leur défaveur, à la suite de la consultation de l’arbitrage vidéo.

 

Un essai est ainsi accordé à Penaud alors qu’il semblait avoir le pied en touche (mais impossible de le vérifier, le réalisateur français préférant filmer des supporters en tribunes). Plus tard, le flux de la caméra est carrément coupé pendant trois minutes alors que les Irlandais pilonnent la ligne française. Enfin, en début de seconde période, le talonneur irlandais est expulsé pour un coup de genou sur… Lilian Camberabero. Le camp irlandais crie au scandale, explique que ces images datent d’il y a plusieurs décennies et qu’elles ont été intégrées au flux du match, mais face aux évidences présentées sur les écrans géants, l’arbitre n’a d’autres choix que de sévir. Aux termes de 80 minutes mouvementées (le match durera au total 3h30), les Bleus s’imposent et l’Irlande s’arrête une nouvelle fois à l’entrée du dernier carré de la compétition.

 

Rappel : notre nouveau livre “La petite, la grande et la (parfois) très moyenne histoire du XV de France” est disponible en librairie. Commande-le ici (un livre acheté = un point encaissé par l’Angleterre pendant la compétition).

Présentation Coupe du monde 2023 : La Namibie

 

Tout au long de l’été, la Boucherie Ovalie vous présente en détails les 20 équipes qualifiées pour la Coupe du monde 2023. Basé sur le modèle de ce qui avait été publié dans le livre La Découpe du monde du rugby en 2019, ces fiches pays vous offriront un cocktail de ce que nous savons faire de mieux depuis désormais plus de 10 ans : un savant mélange d’analyses pointues, d’informations approximatives et de blagues douteuses.

 

Fiches déjà publiées :

Le Chili

Le Portugal

La Roumanie

 

La Namibie

 

Notation :

Pays proche de l’Afrique du sud : + + + +

Nom de joueurs proches de ceux de l’Afrique du Sud : + + + +

Physiques de joueurs proches de ceux de l’Afrique du Sud : + + + +

Niveau de jeu proche de celui de l’Afrique du Sud : – – – – – – – – – – – –

 

L’emblème :

Les Namibiens arborent sur leur maillot un aigle pêcheur d’Afrique, aussi appelé « pygargue vocifer », notamment par des scientifiques qui veulent se la péter et par André Dussolier quand il fait la voix off d’un documentaire animalier.

Majestueux, dangereusement létal, on imagine mal un tel animal se laisser emmerder par un trèfle ou un poireau. Malheureusement pour les Namibiens, il est ici question de rugby, pas de combat de Pokémon.

 

L’équipe :

Si vous faites partie des gens qui imaginent la Namibie comme un petit pays d’Afrique perdu quelque part entre un lac et un rocher, vous ne valez pas mieux que les Américains qui placent Londres au milieu de la Chine et Castres dans le Tarn quand on leur tend une carte.

 

En effet, la Nambie fait deux fois la superficie de la France et, si elle ne pèse pas plus dans les relations internationales, c’est sans doute parce qu’elle n’est peuplée que de 2 millions d’habitants (ce qui lui confère une densité de population similaire à la Corrèze).

 

L’équipe de rugby locale, surnommée les Welwitschias en référence à une plante (même si c’est vrai que ça ressemble plus à un nom de MST), est la deuxième meilleure équipe d’Afrique, et la 21ème nation mondiale au classement World Rugby.

 

À l’automne, elle disputera sa 7ème Coupe du monde consécutive, pour un total de zéro victoire. À leur décharge, leur dernier match accessible (face au Canada en 2019) a été annulé à cause d’un typhon. Et leur match face à la Géorgie en 2015 s’est soldé par une défaite d’un point après une rencontre folle, marquée par une première mi-temps de 67 minutes (la faute a des interruptions incessantes du jeu par l’arbitre, qui tentait d’enrayer les nombreuses tentatives d’assassinats à coups de cartons jaunes).

 

À défaut d’être flamboyante dans ses succès, la Nambie sait l’être dans ses défaites, comme le prouvent ses belles branlées reçues au fil des éditions. Mention au mémorable 142-0 face à l’Australie en 2003 ou à la défaite 87-10 contre la France en 2007.

 

Elle retrouvera justement la France dans sa poule cette année, tout comme la Nouvelle-Zélande, qu’elle avait déjà affrontée en 2015 et 2019 (parfois, le sort s’acharne). L’Italie, puis l’Uruguay pour la dernière rencontre viendront compléter le programme. Cet ultime match aura des allures de petite finale pour les deux équipes, qui se disputeront sans doute la 4ème place (s’il leur reste assez de joueurs vivants à ce stade de la compétition).

 

L’équipe sera menée par Allister Coetzee, adjoint de Jake White lors du titre sud-af en 2007 et éphémère entraîneur de cette même équipe entre 2016 et 2018. On ne sait pas s’il aura plus de réussite à la tête des Welwitschias, mais gageons qu’il aura moins de pression.

 

Forte d’une victoire dans la Rugby Africa Cup 2022 face au Kenya, les Namibiens s’appuieront sur un effectif homogène, mêlant des jeunes espoirs de 26 ans et des tauliers de 40 ans. Si Jacques Burger a stoppé sa carrière alors qu’il n’en a que 39, on devrait cependant retrouver sur les terrains Pieter-Jan Van Lill, le troisième ligne de 38 ans passé par Dax et Bayonne qui évolue aujourd’hui à Capbreton Hossegor Rugby en Régionale 2, mais aussi le talonneur bayonnais Torsten van Jaarsveld ou encore le centre de Colomiers Johan Deysel, star locale depuis qu’il a inscrit un essai contre les All-Blacks en 2015.

 

Si elle a une petite teinte française, cette équipe compte aussi beaucoup de joueurs évoluant aux États-Unis. On peut citer le troisième ligne Wian Conradie, auteur d’un triplé face au Kenya, ou Cliven Loubster, l’ouvreur de 25 ans qui évolue à Utah. Et si la France a droit à son éternel débat entre les fans de Romain Ntamack et les Jalizouzes, la Namibie tient son équivalent avec Cliven Loubster et Pieter Willem Steenkamp, qui postule également au numéro 10. À noter que depuis quelques saisons, ce dernier évolue en Pologne, ce qui a dû lui permettre de progresser dans la gestion d’au moins une des trois mi-temps.

 

Dans cette équipe décidément très Erasmus (aucun lien avec le sud-africain cette fois), on trouve enfin certains joueurs évoluant au plus haut niveau comme Richard Hardwick, qui porte le maillot des Melbourne Rebels dans le Super Rugby. Cet ancien international australien (2 sélections en 2017) a choisi de rejoindre les Welwitschias en fin d’année dernière. Ce changement de camp pour une nation adverse à quelques mois de la Coupe du monde n’en fait pas un ami fiable, mais ça suffit à en faire un Namibien.

 

Johan Deysel, un joueur qui démarre au quart de tour.

 

Les joueurs à suivre :

Parmi les autres joueurs évoluant au plus haut niveau, il faudra garder un oeil sur l’arrière Divan Rossouw. Après plusieurs saisons chez les Bulls, il évolue maintenant dans la province sud-africaine des Lions, particulièrement respectée en France depuis sa victoire 51-28 contre le Racing en Challenge Cup cette saison.

Rarement sur la feuille de match en club, Rossouw n’en reste pas moins une valeur sûre des Welwitschias, comme le prouve son titre d’homme du match acquis contre le Kenya lors de la rencontre leur assurant la qualification à la Coupe du monde. Un match qui avait d’ailleurs lieu à Aix-en-Provence. Nous voilà prévenus : quand il dispute une rencontre en France, Divan joue toujours comme dans une fauteuil.

 

Le saviez-vous ?

Percy Montgomery est né en Namibie (Sud-Ouest africain à l’époque), et non pas en pays CATALAN comme on pourrait le penser (ou le faire croire du côté de Perpignan).

 

Calendrier

contre l’Italie, le samedi 9 septembre à Saint-Etienne (13h)

contre la Nouvelle-Zélande, le vendredi 15 septembre à Toulouse (21h)

contre la France, le jeudi 21 septembre à Marseille (21h)

contre l’Uruguay, le mercredi 27 septembre à Lyon (17h45)

 

La Namibie : un style de jeu basé sur l’évitement.

 

Le scénario idéal :

Après une victoire surprise contre l’Italie dès le premier match, la Namibie est invitée à prendre la place des transalpins dans le Tournoi des Six Nations. Portée par l’euphorie de cette nouvelle, les Welwitschias n’encaissent que 50 points contre la Nouvelle-Zélande puis 45 contre l’équipe B de la France (quadruplé de Jalibert). Lors de leur dernier match de la compétition, les Namibiens s’imposent face à l’Uruguay et bouclent leur meilleure campagne dans une Coupe du monde avec deux victoires. Ces résultats enthousiasmants de l’équipe nationale sont particulièrement suivis et commentés au pays, qui voit une explosion du nombre d’inscriptions en école de rugby (+28 licenciés).

 

Le scénario catastrophe :

Après avoir encaissé 250 points en trois matchs, les Namibiens retrouvent leur rugby et s’imposent facilement lors de leur dernière rencontre face à l’Uruguay. Ils séduisent le public et impressionnent les observateurs, notamment les recruteurs d’Aurillac, Brive, Rouen et Nevers.

Naïfs, plusieurs joueurs signent avec ces clubs des contrats longue durée, y voyant l’occasion d’évoluer à un niveau supérieur et dans un cadre de vie qu’on leur vend comme « sympathique et dépaysant ». Ce qu’ils sont devenus ensuite ? Personne ne le saura jamais. Pas même leur famille, qui ne trouvèrent jamais le chemin de ces contrées reculées pour leur rendre visite.

 

 

Le mystère de la préparation du XV de France

 

Nous sommes le 17 juillet. Le XV de France a commencé sa préparation à la coupe du Monde le 25 juin (le 6 juillet pour les finalistes). Et contrairement à il y a quatre ans, très peu de communication est effectuée autour des différents stages et activités. Ni du côté de la Fédé, ni du côté des joueurs sur leurs réseaux sociaux. Un silence pesant, un black out médiatique, et seules quelques photos d’un stage avec le GIGN ont filtré. Mais que se passe-t-il donc ? Pourquoi tant de mystère et d’opacité ? Pour travailler sereinement ? Pour ne pas nourrir les mensonges et les ragots des jounalisss’ ?

 

Le mystère nourrissant les récits les plus improbables et fantasques (rappelons qu’un million de personnes veulent prendre d’assaut un centre militaire dans l’espoir de découvrir des petits hommes verts cachés par le gouvernement américain alors qu’on sait tous que le seul truc non-terrien qui se cache peut-être là bas est une bactérie inconnue qui pourrait exterminer la moitié de la planète si on la fait tomber de son éprouvette). Ne reculant devant aucun tabou et aucune pression, nous avons donc décidé de lister 15 scénarios (plus ou moins) possibles pour expliquer le silence médiatique autour du rassemblement du XV de France.

 

On vous laisse nous dire en commentaire ce qui vous semble le plus probable parmi nos hypothèses (et suggérer vos propres explications si vous en avez d’autres).

 

[Edit : Évidemment, le temps qu’on se réveille et qu’on publie l’article, la Fédération avait mis en ligne des photos, des vidéos et Rugbyrama avait sorti douze articles sur le sujet. Faites comme si vous n’avez rien vu.]

 

Bon les gars, en 2015 on a coulé, alors cette année on anticipe : cours de natation !

 

1/ Le XV de France a pris tout le monde de cours en quittant Marcoussis pour Castres. Aucun journaliste ou supporter n’a eu l’idée d’aller les chercher jusque là bas et le CM de la Fédé ne capte pas la 3G ce qui l’empêche de partager des photos.

 

2/ C’est en fait Bernard Laporte qui a pris les commandes de l’équipe et qui dirige les entraînements. Fabien Galthié et Jacques Brunel se contentent de faire des belotes à l’ombre et de gérer le barbecue. Impossible de les mettre face à des journalistes : ils n’ont absolument aucun avis sur la compétition à venir mais ont par contre beaucoup de choses à dire sur la dernière saison de Stranger Things.

 

3/ Ils ont complètement abandonné l’idée de franchir les poules et passent donc leurs journée à jouer à la PS4 et siroter des Mojitos autour d’une piscine gonflable.

 

4/ La staff a mis en place un plan de jeu hyper-sophistiqué et a peur qu’en l’apprenant, les autres équipes arrêtent de nous prendre de haut (ce qui gâcherait l’effet de surprise sur lequel repose 90% du plan de jeu en question).

 

5/ Tels des footballeurs de Corée du Nord profitant d’une compétition internationale pour disparaitre, plusieurs joueurs (dont Guilhem Guirado) ont déserté et demeurent à ce jour introuvables.

 

6/ Yoann Huget s’est fait les croisés et la Fédé ne veut pas que ça se sache, bien consciente que sa présence est le seul motif d’espoir des supporters du XV de France jusqu’à présent.

 

7/ Le stage a bel et bien démarré mais les trois premières semaines étaient consacrées à une formation collective sur le droit du travail et les motifs de licenciement pour faute grave par les meilleurs juristes du pays. Ce qui n’est pas super instagrammable. L’entraînement rugbystique débutera à la fin de cette formation, soit vers le 10 août.

 

8/ Les joueurs passent leurs journée à se faire transfuser du sang directement importé de la Zone 51. Ils ressemblent actuellement aux méchants dans Space Jam et la Fédé a peur qu’en relayant des photos, Laurent Benezech se doute de quelque chose.

 

Baptiste Serein, Rabah Slimani et Félix Lambey, en pleine forme.

 

9/ L’arrivée du nouveau préparateur physique a fait trois morts en première ligne. Le temps estimé pour creuser les différentes tombes afin de se débarrasser des cadavres est estimé à environ deux semaines.

 

10/ Les Français travaillent en réalité depuis trois semaines sur leur réponse au haka et peaufinent leur chorégraphie en prévision de la finale de la compétition.

 

11/ Le staff et la Fédé se sont rendu compte de leur erreur et cherchent un moyen de rappeler Yionel Beauxis sans vexer Camille Lopez. D’après nos sources, la bavure lors du stage avec le GIGN est tombée à l’eau, la piste de l’accident de chasse est privilégiée mais le malheureux lancer de fléchette à hauteur de visage n’est pas exclu encore à ce stade.

 

12/ Lors du premier entraînement, le nouveau préparateur physique, particulièrement strict, a crée un exercice où toute l’équipe doit faire des tours de terrain tant que Bernard Le Roux, Wenceslas Lauret et Geoffrey Doumayrou n’ont pas réussi à se faire 100 passes sans faire tomber la balle. Ça va faire trois semaines que ça dure et six joueurs sont suffisamment affutés pour battre le record de France du marathon.

 

13/ Le staff veut mettre à l’abris les joueurs de la pression médiatique dû à l’énorme engouement populaire autour de l’équipe, soutenue par plus de 60 millions de français qui trépignent en attendant le début de la compétition.

 

14/ On est nul et le staff a peur que ça se voit si quelqu’un assiste à un entraînement.

 

15/ Il n’y a pas de blackout médiatique particulier, les portes sont grandes ouvertes au public et aux journalistes, c’est juste que tout le monde s’en branle de la préparation d’une équipe qui ne passera pas le premier tour, en fait.

 

On a jamais vu des réservistes aussi heureux d’être réservistes. 

 

Retour sur Angleterre – France

 

Préambule:

 

Pour paraphraser un film célèbre, ceci n’est pas le compte-rendu que le XV de France mérite, mais celui dont ses supporters ont besoin.

 

Le contexte :

 

Après une énième défaite face au Pays de Galles et alors qu’un déplacement chez l’ennemi anglais se profile, le rugby français est en pleine crise pour la treizième fois en deux ans. On s’attend à des mesures fortes de la part de la Fédération : une réunion avec la LNR, la création d’un comité avec des anciens internationaux, ou peut-être même encore mieux : un audit. Mais rien de tout cela ne se produit.

 

En effet, quelques jours avant le match, Bernard Laporte convoque une conférence de presse  improvisée et annonce devant un parterre de journalistes estomaqués sa décision : « Les résultats du XV de France depuis quelques mois confirment que les décisions qui furent les miennes depuis mon arrivée à la tête de la Fédération Française de Rugby n’ont pas porté leurs fruits. Ajoutons à cela les diverses polémiques qui entourent ma gouvernance et me voilà forcé de reconnaître que les conditions ne sont plus réunies pour que je puisse servir pleinement et sereinement les intérêts supérieurs du rugby français. Par conséquent, j’ai décidé de prendre mes responsabilités et de démissionner dès aujourd’hui de mon poste de Président. En plus, dimanche je dois participer à l’enregistrement d’un épisode spécial de « Balance ton Post ! » et du coup je ne pouvais pas venir à Londres. On m’a mis la pression pour choisir entre les deux et je dois bien reconnaître que j’ai pas osé dire non à Baba. Bref, comme je tenais à partir avec panache, j’ai imaginé une dernière idée de merde pour terminer mon mandat : en attendant une nouvelle élection traditionnelle dans les prochains mois, mon successeur provisoire sera élu grâce à un vote sur Internet. Et tout le monde peut s’inscrire et voter. C’est un gilet jaune qui m’a donné l’idée. Pas mal non ? ».

 

 48 heures plus tard, après une campagne agressive et largement influencée par des puissances extérieures comme la Russie ou les salariés de Pernod-Ricard, la Boucherie Ovalie est propulsée à la tête de la Fédération. Après qu’on lui a promis que les résultats n’avaient aucune importance et que sous cette présidence, personne ne le laisserait boire des bières tout seul à son hôtel, Marc Lièvremont accepte de prendre les rênes de l’équipe de France jusqu’à la fin du tournoi. Après de longues négociations et malgré les insistances de la présidence, il refuse cependant de mettre Yionel Beauxis titulaire.

 

Avec Lapinou, beaucoup de choses seront bien conservées. Un avantage au score, par exemple. 

 

Le groupe est tout de même largement remanié de manière à préparer l’avenir et de n’aligner aucun joueur du Racing 92, comme s’y étaient engagées les personnes élues à la tête de la fédération. L’ouvreur lyonnais est malgré tout rappelé sur le banc. Parmi les autres nouveautés dans le XV de départ, notons (entre autres) la sortie des vingt-trois du capitaine Guirado, le retour de Guitoune au centre, de Macalou en troisième ligne et la première sélection de Raka à l’aile. Un choix justifié ainsi par le sélectionneur en conférence de presse : « Ok, il a un poignet pété mais c’est toujours plus rassurant que Yoann Huget. Et puis si vous me faites chier, je rappelle Andreu je vous préviens ».

 

La compo:

 

 

 

Le film du match:

 

15 minutes avant le match : Raka se tort le genou à l’échauffement. En tribunes, Huget propose gentiment de lui succéder. Marc Lièvremont décline poliment, prétextant qu’on peut très bien jouer sur une jambe et qu’il y a justement des béquilles dans le vestiaire, en prévision d’une future sélection de Benjamin Fall.

 

10 minutes avant le match : Surprise lors de la prise d’antenne de France 2. Bloqués à l’aéroport d’Edimbourg après avoir commenté le match de l’Écosse la veille, Mathieu Lartot et Fabien Galthié ne peuvent pas tenir leur place au micro. Cécile Grès est donc promue dans la cabine commentateur, au sec pour une fois, et Daniel Herrero,  qui se préparait à commenter le match pour une obscure radio locale, accepte de la rejoindre.

 

5 minutes avant le match : Moment de flottement sur la pelouse de Twickenham. Alors que les équipes s’apprêtent à chanter les hymnes, un homme vêtu d’un képi militaire s’empare du micro du speaker. Il commence à déclamer les premières phrases de l’Appel du 18 juin. Un gros plan de la caméra permet d’identifier Scott Spedding qui est rapidement évacué par la sécurité mais continue à crier « RÉSISTANCE ! RÉSISTANCE ! » en direction du banc français.

 

2 minutes avant le match : Les Français se regroupent autour d’Abdoul, le playmobil pirate qui a été choisi pour faire passer les consignes du staff en bord de terrain et rassurer les nombreux jeunes qui composent l’équipe. On sent de la détermination mais aussi une certaine décontraction dans le camp français, notamment quand Demba Bamba commence à s’enjailler sur Djadja qui résonne dans le stade. « WTF is that song?» s’étonnent quelques Anglais épris de boisson. « C’est notre Amy Winehouse à nous, explique un Français. Enfin sans l’alcool. Et sans la drogue, les tatouages, la voix, le talent, et le reste quoi ».

 

00’ : Le coup d’envoi est donné par Ntamack. Les Anglais s’organisent vite à la récupération, Farrell dégage d’un long coup de pied et trouve la touche dans le dos de Penaud, trop occupé à écouter son père lui crier du premier rang « Déconnez pas, si vous gagnez ce soir je pourrai continuer à dire que le problème venait bien de Novès et que c’est un gros nul, je compte sur vous ! ».

 

01’ : Daniel Herrero peine à masquer son enthousiasme pour cette rencontre comme en témoigne le début de sa première intervention : « C’est au coeur du combat que se révèle le coeur de l’Homme, que jaillit son humanité toute entière, quand il est comme nu au centre du combat avec son courage et sa rudoyance comme seul apparat, formant un tout avec ses frères, loin du silence des forêts reculées du monde, mais au contraire porté par la clameur de la foule qui exulte à l’idée de se gaver de sang et de violence, d’élégance et de magie, soumise au bon vouloir des guerriers qui se font face et qui…. »

   

03’ : Daniel Herrero termine sa première phrase. Tous les téléspectateurs qui s’étaient arrêtés de regarder le match pour fermer les yeux et l’écouter se ré-intéressent à l’action sur le terrain et constatent que l’Angleterre mène 3-0.

 

06’ : Première séquence de possession intéressante pour les Français qui enchaînent bien. À l’entrée des 22 mètres, Ntamack adresse une passe au pied sur l’aile opposée. Raka saute moins haut que son vis-à-vis mais utilise intelligemment sa béquille et frappe le ballon avec avant que l’Anglais ne le capte. Ça retombe dans les bras de Ramos qui avait bien suivi et n’a plus qu’à aplatir dans l’en-but. Il transforme dans la foulée et la France mène 7-3.

 

07’ : Les Anglais cherchent à réagir et mettent de la vitesse. Après plusieurs temps de jeu, Slade a un face à face à jouer en bout de ligne face à Bamba qui est cramé depuis la troisième minute. Courageux mais pas téméraire, le centre anglais décide de contourner le pilier français. Compte tenu de la physionomie du bonhomme, le détour par le parking du stade est le plus court et il perd de précieuses secondes qui permettent à Guitoune de revenir à temps pour le pousser en touche à quelques mètres de la ligne.

 

11’ : Les Français continuent à subir mais se montrent solidaires en défense comme en témoigne ce plaquage à cinq des trois-quarts français sur Tuilagi.

 

Owen Farrell échappe grossièrement le ballon. CHEH !

 

 

14’ : Dupont joue vite une pénalité. Le jeu rebondit et ce qui devait arriver arriva : Ntamack est séché par Courtney Lawes qui le traquait la bave aux lèvres depuis le début de la rencontre.

 

17’ : Sur les offensives françaises, Milou Junior prend maintenant vingt bons mètres de profondeur. Sur le banc, même Yionel Beauxis trouve ça un peu exagéré.

 

19’ : Après une faute bête dans un ruck, Lambey est sanctionné et les Anglais reviennent à un point.

 

24’ : Dupont dynamise bien tous les ballons et les avants français enchaînent dans l’axe. Dans les 22 mètres adverses, c’est au tour des trois quarts de s’illustrer. Ntamack annonce la combinaison « YOLO » et adresse une passe acrobatique à Fickou qui perce et sert Guitoune à hauteur. Malgré le retour de deux Anglais dont Mako Vunipola qui s’assoie sur son visage, le centre toulousain s’arrache et aplatit. Ramos transforme sans problème. 14-6.

 

25’ : Guitoune demande à l’arbitre s’il peut sortir temporairement parce qu’« il est tout décoiffé ». Nigel Owens lui répond que ça n’est pas très valeurs du rugby comme raison. Sofiane réplique habilement « Et pour un protocole commotion alors ? J’ai un peu mal à la tête ». Nigel Owens n’a plus trop le choix face à cet argument imparable et laisse le centre rentrer au vestiaire. Il est remplacé par David Marty, rappelé pour « encadrer les jeunes et amener de l’expérience. Et un peu aussi parce que la Présidence m’y a forcé, on ne va pas se mentir » précise le nouveau sélectionneur français.

 

29’ : Succession de mêlées au centre du terrain. Vunipola essaie d’intimider Bamba, qui lui explique gentiment qu’il affronte des piliers géorgiens recherchés par Interpol tous les weekends en ProD2 et qu’il perd donc son temps.

 

32’ : Après son 3ème placage offensif sur Tuilagi, qui décide d’arrêter le rugby, traumatisé par la violence de ce sport, David Marty quitte le terrain et annonce sa retraite internationale : « J’ai fait mon boulot, place aux jeunes maintenant ». Daniel Herrero salue au micro « Le départ crépusculaire de l’idole qui aura su renaître dans le grand brasier de l’Être, dans les flammes de la solidarité où bruissent les trompettes de la Marseillaise et font s’envoler les cavaliers de l’honneur ». Un peu partout en France, des gens pleurent. Heureusement, Guitoune est prêt à revenir sur le terrain avec un nouvel ornement capillaire « En hommage au niveau de jeu de l’équipe de France ces dernières années, j’ai fait un dégradé ».

 

37’ : La France gère cette fin de première mi-temps avec une maturité qui surprend tout le monde. Pour le dire plus clairement, les Français enchaînent les rucks et balancent de grandes chandelles en espérant récupérer un ballon de temps en temps au point de chute (histoire de reprendre leur souffle, un peu aussi). En tribunes, un Anglais se plaint du niveau de jeu digne du Top 14. Son voisin français le console : « Et encore, nous, parfois on doit se taper les Hachoirs d’Or à la mi-temps… ».

 

39’ : Sur une belle action, les Anglais sont à deux doigts de marquer. Heureusement, à quelques mètres de l’en-but, Farrell se précipite et sert le premier roux qu’il voit. Manque de pot, c’était Lambey qui permet donc à la France de conserver la balle jusqu’à la mi-temps. 

 

Mi-temps : Guirado descend des tribunes en courant et propose de répondre aux questions des journalistes : « Allez s’il vous plait, pour une fois qu’on gagne ! Ça fait trois ans que j’ai des éléments de langage de côté et j’ai jamais l’occasion de les utiliser ! ».

Interrogé sur son discours dans les vestiaires et la tactique à venir, Lapinou répond de son côté de manière très laconique « Oh non, je n’ai rien dit de particulier. Juste « démerdez-vous, vous me faites chier ». La dernière fois que j’ai fait ça, ça avait plutôt bien marché donc je retente le coup ».

 

42’ : Sans surprise, les Anglais reviennent remontés (Eddie Jones porte dorénavant une capuche qui le fait étrangement ressembler à l’Empereur Palpatine) et attaquent la deuxième période pied au plancher. Mais après une belle combinaison autour de Farrell, Fickou surgit et intercepte. Il trouve Macalou en soutien qui dépose May sans problème et va aplatir soixante mètres plus loin. C’est une nouvelle fois transformé par Ramos et la France mène 21-6.

 

48’ : Les Anglais ont pris un coup derrière la tête alors que les Français semblent de plus en plus euphoriques. Iturria tente une chistera qui retombe miraculeusement dans les mains de Willemse. Paniqué par cet étrange objet, le deuxième ligne du MHR balance une longue passe, comme pour l’éloigner le plus possible. Ashton tente l’interception mais est trop court. Ça retombe dans les mains de Raka qui parcourt les dix derniers mètres à cloche-pied et marque son premier essai international. En tribunes, Vahaamahina tire étrangement la gueule. Sur Twitter comme chez les observateurs du milieu, tout le monde est d’accord, les étrangers en équipe de France, c’est une excellente chose. Comme tout le monde l’a toujours dit d’ailleurs. La France mène 28 à 6.

 

OH PUTAIN LES GARS J’EN AI CHOPÉ UN ! PLANQUEZ-LE ! 

 

52’ : Les Anglais font du coaching et remettent peu à peu la main sur le ballon. Après une nouvelle belle séquence, Youngs s’échappe, fixe bien et sert Daly qui va marquer en coin. La transformation passe. 28-13.

 

55’ : Coaching côté français. Afin d’éviter de perdre le contrôle du match, les Bleus font rentrer de l’expérience avec Pascal Papé qui remplace Willemse.

 

56’ : Pascal Papé met une tarte à Owen Farrell dans un ruck. Après arbitrage vidéo, il prend un carton jaune. Owen Farrell doit sortir sur protocole commotion.

 

58’ : Au tour de Dupont de s’échapper près d’un ruck. Il dépose tout le monde et attend du soutien pour jouer son face à face avec Daly.

 

59’ : Dupont fume une clope en attendant ses coéquipiers.

 

60’ : Ntamack est le premier au soutien, Dupont joue parfaitement le 2 vs 1 face à l’arrière et l’ouvreur français va conclure entre les poteaux. C’est transformé par Ramos, 35-13.

 

63’ : Peu habitués à ce tempo, les Bleus commencent à fatiguer. Wilson trouve un trou dans la défense après une bonne séquence et va aplatir dans l’en-but. Il dessine au passage un visage sur le ballon et se met à lui parler en l’appelant « Mon frère ». Ford ne tremble pas et ramène l’Angleterre à 35-20.

 

64’ : Wilson sort dans la foulée pour suspicion de commotion. Les images montrent en effet que le troisième ligne a pris un coup de genou dans la tempe sur le dernier plaquage. « C’EST PAS MOI ! » beugle Pascal Papé depuis le banc de touche.

 

66’ : Nouvelle incursion anglaise dans le camp des Bleus. Après de longues séquences de jeu, Ford est à court de solutions et se rabat sur un drop. 35-23. 

 

66’ : Rentrée de Yionel à la place de Romain Ntamack, très à son avantage et remuant, comme en témoigne les trois œufs qu’il a fait éclore sur Pokémon Go pendant le match.

 

67’ : Sur le renvoi, Yionel tape directement en touche. « ALORS ! VOUS VOYEZ QUE JE SAIS TROUVER UNE TOUCHE BANDE DE CONS ! ».

 

71’ : Les Anglais pilonnent la ligne française. Près de la touche, Pascal Papé se sacrifie sur sa ligne. Il reste au sol mais l’ennemi recule et renverse le jeu. Quelques temps de jeu plus loin dans l’angle opposé, Ford tente une diagonale au pied. Ashton récupère et plonge dans l’en-but… mais il n’avait pas vu Pascal Papé qui trainait toujours par là et qui l’attrape en plein vol avant qu’il n’ait pu aplatir. Dans un ultime effort, Pascal Brutal le porte à bout de bras jusqu’au bord du terrain et le jette dans les panneaux publicitaires.

 

Devinez qui domine ce match ?

 

72’ : Pascal Papé prend son plus bel air surpris quand, après avoir demandé la vidéo et s’être regardé trois minutes sur les écrans géants de Twickenham, Nigel Owens lui donne un deuxième carton jaune. Les Anglais bénéficient en plus d’un essai de pénalité et reviennent à 35-30.

 

74’ : Course molle de Yionel qui prend un intervalle.

 

76’ : Yionel sort de l’intervalle, Slade et May n’ont rien pu faire. Il enchaîne avec une chistera mais Alldritt qui ne s’y attendait pas la prend dans la gueule et fait en-avant. « On a le droit de faire ça ? » demande-t-il étonné à Yionel. « Parce que Jean-Baptiste, il avait clairement dit le contraire la semaine dernière. C’était d’ailleurs notre seule consigne claire… ».

 

77’ : Après une mêlée, un début de bagarre éclate. Alors que Daniel Herrero ridiculise tous les membres de l’Académie française en utilisant 39 synonymes de la violence en moins de 45 secondes, Cécile Grès fait la pub de la Pro D2 et conseille de ne pas louper Montauban-Brive la semaine prochaine. Les spectateurs de France 2 se demandent quel est le rapport avec le rugby.

 

79’ : Les Bleus sont acculés dans leurs 22. Heureusement, Matthieu Bastareaud, tout juste rentré en troisième ligne, gratte un ballon. Après quelques petits tas, la balle arrive jusqu’à Yionel qui tape en tou… ah non… qui tente le drop ! Le ballon s’élève haut, traverse le terrain et… frappe le poteau. Hamdaoui, lui aussi entré en jeu en fin de match est le premier à la retombée et n’a plus qu’à aplatir sous les perches.

 

80’ : Épuisé d’avoir dû traverser tout le terrain en trottinant, Yionel manque la transformation en face. La France s’impose 40-30.

 

3 minutes après le match : Sur l’antenne de RMC, Laporte se félicite du résultat, signe évident de la réussite de son mandat. Il annonce d’ailleurs que, son émission désormais enregistrée, il est prêt à reprendre la tête de la FFR, tout en promettant que « Marc Lièvremont fera la Coupe du monde à la tête des Bleus, bien sûr ».

 

4 minutes après le match : Serge Simon précise qu’il est médecin et que son diagnostic est formel : le XV de France va mieux.

 

10 minutes après le match : Dany Priso est moqué par ses coéquipiers car c’est le seul qui n’a toujours pas mis un selfie de victoire sur Instagram.

 

14 minutes après le match : Andy Goode, lors de son analyse post-match, n’a de cesse de louer la grâce et l’élégance du jeu à la française. Il s’excuse d’avoir osé jouer à Brive.

 

15 minutes après le match : Clive Woodward supprime son article pré-écrit pour le lendemain où il expliquait que les Français étaient nuls et ne devraient même pas avoir le droit de jouer au rugby.

 

16 minutes après le match : Clive Woodward supprime son dossier de candidature au poste d’entraîneur de l’équipe de France pendant la Coupe du monde 2019.

 

17 minutes après le match : Clive Woodward commence un papier pour expliquer qu’Eddie Jones est nul et qu’il est volontaire pour diriger le XV de la Rose lors de la Coupe du monde 2019. 

 

19 minutes après le match : Abdoul est élu « Personnalité préférée des Français ». Une première pour… vous savez… un pirate.

 

25 minutes après le match : Guy Novès prend la parole et annonce finalement ne demander qu’un euro symbolique pour son procès à venir. À condition que Bernard Laporte paye l’euro en question de sa poche. Il annonce par ailleurs organiser un barbecue à Pibrac, dans la maison qu’il a lui même construite, de ses mains, tout en gagnant dix titres de champions de France et quatre coupes d’Europe. « Précisez-le dans l’article, c’est important ! », recommande-t-il aux journalistes.

 

28 minutes après le match : Daniel Herrero est élu à l’Académie française. Au premier tour et à l’unanimité des votants.

 

30 minutes après le match : Les joueurs annoncent en conférence de presse qu’ils visent clairement la victoire dans le tournoi (le Grand Chelem en bonus si possible), puis la victoire en Coupe du monde puis un record de gains à Fort Boyard dans 18 mois.

 

32 minutes après le match : Les supporters les plus lucides qui regardent la conférence de presse comprennent que le match face à l’Écosse est probablement déjà perdu par excès de confiance. Mais ils s’en foutent, ils viennent de vibrer devant un match de l’équipe de France. Et cette fois pas seulement parce que leur smartphone avait une notif à chaque essai encaissé sur l’appli Rugbyrama.

 

Mettez un bandeau rouge à cette personne et obtenez un aperçu de celui qui pourrait être le meilleur
Homme ayant jamais foulé cette terre. 

 

 

(Merci à mes petits camarades pour leurs suggestions et leur relecture attentive)

 

Sinon si vous voulez un compte-rendu très drôle du vrai match, il y a celui d’Ovale Masqué sur Actu-Rugby.

Retour sur France-Irlande (13-15)

 

Le contexte :

On ne va pas s’attarder en longueur sur le contexte extra-sportif de ce match parce que le temps que vous finissiez de lire l’article, Bernard Laporte aura viré deux entraîneurs, été convoqué par trois juges, tout en promettant de doubler le salaire des bénévoles des clubs de rugby amateur. Il serait donc idiot se risquer à un récapitulatif ou un début d’analyse, puisque tout serait rapidement obsolète et dépassé (comme Guy Novès si on en croit les justifications de ceux qui l’ont viré).

 

Contentons-nous donc de parler de ce 03 février 2018, jour du premier match de Papy Brunel à la tête des Bleus. Un baptême qui sentait le soufre (bon, en réalité pas plus que ça mais j’ai toujours rêvé de caser cette expression quelque part) puisque les Français étaient opposés à l’Irlande, grande terre de rugby (comme tous les pays avec une concentration particulièrement élevée d’alcooliques). En pleine confiance depuis plusieurs mois, les Irlandais sont au coup d’envoi le parfait opposé de l’équipe française : ils savent aligner trois passes et aucun scandale ne vient perturber l’équipe, à part une pétition qui demande à interdire les matches de l’équipe aux moins de 18 ans tant que Furlong est sélectionné. (Et le procès de deux joueurs pour viol, certes). 

 

Le XV de départ :

 

 

Le match :

Déjà, précisons que si on est facilement lassés voire cyniques quand il s’agit de s’infliger du Top 14, le Tournoi des VI Nations a encore le mérite d’apporter son petit lot d’excitations. Grâce au niveau de jeu déjà, mais aussi par le biais du folklore entourant les matches : les supporters déguisés et déjà ivres avant le coup d’envoi, les hymnes qui retentissent et sur lesquels on s’époumone (y compris quand ce sont ceux des autres pays), les envolées lyriques de Laurent Bellet, la pointe d’agacement dans la voix de Jérôme Cazalbou qui doit se retenir pour ne pas lui casser la gueule juste à côté… Bref, le tournoi est un beau spectacle, même s’il est déconseillé de le dire trop fort, sous peine de voir Jacky Lorenzetti tenter de le faire jouer à la U Arena.

 

Il n’est donc pas surprenant de voir arriver les équipes sur le terrain sous une avalanche d’effets spéciaux avec des machines qui crachent du feu et dégueulent de la fumée comme Bernard Le Roux dégueule des ballons. Après un coup d’envoi fictif donné par un enfant qui a probablement une maladie ou un handicap très triste (la mucoviscidose, une pelade, de l’admiration pour Maxime Médard), le match est enfin lancé. Les premiers temps de jeu permettent d’emblée de calmer tous les rêveurs qui imaginaient qu’un changement d’entraîneur permettrait aux Bleus de passer en mode facile et d’allier maîtrise technique et tactique. Pour le dire plus clairement, on ne touche pas un ballon et après plusieurs offensives maîtrisées dont une belle attaque en première main, les Rouquins nous mettent à la faute. 3-0.

 

“Je fais des abdos debout. C’est comme des abdos normaux mais en plus facile.”

 

Avec un peu de patience, les Français finissent tout de même par grappiller une balle, qu’ils se passent tant bien que mal devant la défense, se montrant aussi dangereux que Luke McLean s’il portait un maillot écossais. Les Irlandais se limitent alors à contenir tranquillement les assauts adverses, attendant patiemment le truc encore plus prévisible qu’un épisode de The Walking Dead : un en-avant. Il ne tarde pas à arriver mais, sur la mêlée, les Bleus obtiennent un bras cassé que se hâte de jouer Loann Gourdon. La suite va vous surprendre ! Le Rochelais commet à son tour un en-avant un peu ridicule, comme on en voit tous les week-ends sur les terrains de troisième série. Probablement un hommage au rugby amateur demandé par Bernard Laporte. Enfin, ça a le mérite de faire sourire Gourdon, ce qui confirme que sa coiffure n’était pas un malentendu : ce garçon a définitivement renoncé à tout amour propre (ça n’est pas un jugement, j’ai fait la même chose en arrivant à la Boucherie).

 

Un peu après, c’est au tour de Maxime Machenaud de nous faire rire, en devenant officiellement le premier demi de mêlée à se faire sanctionner pour une introduction pas droite depuis 2007. Qui a dit que la France était incapable d’innover ? Et oui, start-up nation représente ma gueule. Pour ceux qui chercheraient des explications à tout, on peut supposer que Maxime s’est simplement trompé à la MUSCU la semaine dernière, qu’il a fait une série de plus sur son bras gauche que son bras droit et que ça a complètement déréglé la puissance du haut de son corps, entraînant l’introduction bancale en question. Je ne sais pas si scientifiquement c’est très crédible, mais sachant que j’ai été abonné cinq ans à Sciences et Vie Junior, je vous conseille de ne pas trop me prendre de haut non plus. 

 

Enfin bon, il faut reconnaître qu’à défaut d’être créatifs, les Bleus ne manquent pas de volonté. Ils occupent le terrain et ne défendent pas trop mal. Mais une nouvelle faute dans leur camp se paie immédiatement avec trois nouveaux points de Johnny. Pas celui qui est mort en décembre 2017, celui qui est mort en 2014, 2015, et 2016, ressuscitant à chaque fois (et surnommé le Abdelaziz Bouteflika blanc du côté de Dublin).

 

Finalement, l’action française la plus dangereuse de ce début de match survient après un ballon cafouillé dans un ruck, prolongé au pied par Rabah Slimani. Quiconque a vu l’action reconnaîtra dans l’attitude du pilier clermontois celle de n’importe quel rugbyman qui joue au foot : des gros pointus en attaque et des balayettes au niveau des tibias en défense. Alors que le ballon termine sa course près de l’en-but irlandais, Matthieu Jalibert met une grosse pression sur Kearney et force les Tous-Verts à se dégager péniblement. On est tous un peu excités devant notre télé, puis on prend quelques secondes pour rationaliser : en 2018, on en est à s’enthousiasmer parce qu’on a vaguement mis en difficulté les Irlandais après un contre foireux. Heureusement, la réalité nous rattrape rapidement et sur la touche qui suit, les Français se mettent à la faute sur un contact. Rageant, mais c’était peut-être le seul moyen de masquer le fait qu’on est le seul pays du tournoi à ne pas avoir le moindre lancement de jeu depuis 10 ans. Et la suite ne va pas en s’arrangeant puisque sur un choc avec Aki, Matthieu Jalibert se blesse au genou. Le préfet dit qu’il ne voit pas le rapport et Papy Brunel fait rentrer Anthony Belleau pour le remplacer.

 

“Alors, d’abord le lacet passe au dessus, puis je fais une boucle que je croise avec… non… merde, c’est pas ça. Oh putain, j’y arrive pas… PAPY JACQUES ?! PAPY JACQUES ?!”

 

Acculés en défense, les Français tiennent malgré tout face aux assauts répétés adverses. On sent que cette résistance quand tout le monde essaie de te couler a été travaillée jusqu’aux plus hautes sphères de la Fédération. Le travail de la défense est même récompensé par Gourdon, qui arrache un ballon et permet une contre-attaque rapide. Si tant est qu’une action initiée par Machenaud puisse être qualifiée de rapide évidemment. Isolé dans son camp, Kearney se met à la faute et les Français reviennent à 6 à 3.

 

Un « scénario parfait » d’après Mathieu Lartot et Fabien Galthié, ce qui est très révélateur du niveau de jeu des Français et des attentes que l’équipe suscite depuis quelques années. Un peu comme quand certains journalistes nous expliquaient que le second tour de la dernière présidentielle était aussi le scénario parfait puisque le candidat En Marche (j’ai encore une vanne sur Machenaud qui vient) était le plus à même de battre la candidate FN .

 

Et en parlant du FN, transition toute trouvée avec Vahaamahina qui lui fait gagner 1,5% chez tous les amateurs de rugby sur l’action suivante en venant dégommer Murray inutilement derrière un ruck à 20 mètres des poteaux français. Le deuxième ligne clermontois (engagé et volontaire selon les uns, un peu con selon les autres) échappe tout de même au carton jaune. L’arbitre siffle la mi-temps et les Français repartent au vestiaire sous les sifflets du Stade de France qui réussit donc à être encore plus mauvais qu’en ne disant rien pendant 40 minutes.

 

Jefferson Poirot, un poil blasé après avoir ferraillé comme un con pour gagner un ballon que Maxime Machenaud rend immédiatement à l’adversaire.

 

Le début de la deuxième mi-temps donne une terrible impression de déjà-vu, un peu comme quand tu tombes sur un épisode des Experts et que te te demandes si tu as déjà regardé cet épisode trois fois ou si c’est juste la série qui est nulle à chier. Enfin bref, les Irlandais ont la balle, nous baladent un peu et les Français finissent par se mettre à la faute. Les Rouquins reprennent neuf points d’avance. 

 

Ils ne sont même pas loin de tuer le match quelques instants plus tard mais les Bleus défendent comme des morts de faim (ce qui ne manque pas d’ironie contre des Irlandais) et Jefferson Poirot va cueillir un ballon improbable dans un ruck proche de la ligne française. Trop contents de toucher enfin la gonfle, la Papy Army se lance dans une contre-attaque héroïque, qui se termine par trois turn-overs, une touche vite jouée pour personne et enfin une pénalité contre les Irlandais qui permet aux Bleus de revenir miraculeusement à six points. Comme quoi c’est toujours en faisant n’importe quoi et en misant sur la French Chatte que les Français sont les meilleurs. Cette phase de jeu semble redonner de l’allant aux Français qui remettent à nouveau la main sur le ballon. Problème, personne se semble avoir la moindre idée de ce à quoi ça sert. S’en suivent donc des enchaînements décousus et aussi incisifs qu’une interview de Mouloud Achour.

 

Et si la défense tient bien, il y a forcément des fautes commises à droite à gauche. Probablement un peu moins lucide après avoir fait 20 plaquages et foncé la tête la première dans des mecs de 110 kilos pendant une heure, Guirado se met à la faute et offre une pénalité facile à Sexton. Heureusement, l’ouvreur la manque pour une raison qui échappe un peu à tout le monde, sauf à ceux qui ont regardé un match du Racing entre 2013 et 2015. Le phénomène est en tout cas suffisamment surprenant pour que Fabien Galthié le considère comme le « premier tournant du match », ce qui entraîne en général un nouveau tournant toutes les 45 secondes jusqu’à la fin de la partie, rendant la fin du match aussi linéaire et stable que la route Arc-En-Ciel de Mario Kart  .

 

Les Français tentent de réagir mais comme précédemment, les solutions offensives sont limitées. Pire que ça, ils reculent plus avec la balle que sans, ce qui donne presque envie de rendre le ballon aux Irlandais et d’attendre que la fin du match passe toute seule. Après tout, six points, c’est pas si ridicule. Et les choses ne vont pas aller en s’arrangeant puisque les Bleus sont en difficulté en mêlée également. Mais évidemment, comme depuis… ben depuis toujours en fait, c’est quand les Français semblent laissés pour morts qu’ils se réveillent histoire de faire chier le monde. Après une touche vite jouée, Dupont joue parfaitement le coup et lance Teddy Thomas sur son aile. La défense est mal replacée ce qui permet à l’ailier du Racing de s’échapper le long de la ligne de touche. Après avoir déposé deux joueurs, il repique au centre du terrain, s’arrache et finit les 20 dernières mètres en ventriglisse jusqu’à l’en-but. Précisons au passage qu’avec le toit de la U Arena, la pelouse n’aurait pas été mouillé et Teddy Thomas n’aurait probablement pas marqué (par contre on aurait récupéré des petits bouts de sa peau accrochés dans la pelouse pendant trois ans).

 

“Attention derrière toi, c’est affreux, un gros plaqueur !!!!

Non je déconne c’est Sexton t’inquiète, tu peux arrêter de courir”

 

Il reste alors moins de dix minutes à jouer. Et elles vont paraître longues. Déjà parce que le XV de France va perdre son meilleur joueur depuis plusieurs mois : Yoann Hug… euh Antoine Dupont. Comme Jalibert un peu plus tôt, le genou du demi de mêlée reste sur la pelouse (les optimistes diront que les croisés, finalement, on réussit à les faire) et L’Équipe est à deux doigts de titrer « Le péril jeune ». Notons tout de même la scène cocasse qui voit le « médecin indépendant » (accessoirement vice président du comité médical de la FFR et père du kiné du XV de France) réclamer un protocole commotion pour Dupont, permettant ainsi à Machenaud de le remplacer pour la fin du match. Évidemment, les Irlandais chouinent auprès de Nigel Owens et l’affaire devrait encore faire parler dans les prochains jours mais :

 

1) Entre la main de Henry en 2009 et la victoire de France 2023, ils devraient commencer à s’habituer à ce qu’on les enfume honteusement.

2) Certains (méchants et un peu de mauvaise foi, donc pas nous bien sûr) considèreront que faire revenir Machenaud était plus handicapant que de de jouer à 14.

Seulement, contrairement à ce que nous apprend Batman, il reste une part de justice dans ce bas monde (sauf si vous êtes supporter clermontois) et, pour équilibrer la balance, l’Univers décide quelques instants plus tard de faire rater une pénalité relativement facile aux Français. Belleau avait là une belle occasion de tuer le match, mais innocent et pur comme on peut l’être à 20 piges, il ne tuera rien du tout, sinon un pigeon qui passait par là.

 

Il reste alors plusieurs minutes à jouer. On se dit que les Français vont tenir, que toute autre issue serait trop cruelle. Qu’après tant de galères et de désillusions, la victoire ne peut plus nous échapper. Eh ben si. Après plus de trente temps de jeu où les Français résistent et tiennent sans que Vahamahina ne fasse une faute à la con (ce qui est déjà une petite victoire en soi), Jonathan Sexton enchaîne en quelques secondes : une passe au pied (neuf fois sur dix ça finit mal normalement) puis un drop de 45 mètres. Le tout alors qu’il avait des crampes depuis 15 minutes. Si Sexton avait posé ses couilles sur un tambour, le bruit généré aurait fait taire tout le Stade de France avec la même efficacité. La France s’incline 15 à 13. Cheh.

 

Il y a bien un mec qui va rajouter la musique de Titanic sur ce drop pour lui donner une dimension encore plus épique, non ? Nous en tout cas, c’est ce qu’on fera la semaine prochaine quand vous savez qui fera la même chose. 

 

Les Joueurs :

Comme trop souvent ces derniers temps, Slimani a été peu en vue si ce n’est quand il s’est fait pénaliser en mêlée. Après, il a sûrement largement fait sa part dans le « travail de l’ombre » et les « tâches obscures ». Comme son capitaine Guirado, parfait symbole de la Catalanité, c’est à dire jamais aussi performant que quand il arrête de réfléchir. En première ligne, Jefferson Poirot s’est tout de même distingué en volant quelques ballons précieux dans les rucks. Preuve ultime que dans le rugby moderne, l’avenir du pilier est le troisième ligne.

 

En seconde ligne, on a bien vu Vaha pour ses quelques fautes grossières et son activité défensive de manière générale. Iturria a été beaucoup plus discret mais difficile de savoir ce qui est le mieux au final. Maestri, quant à lui, a une nouvelle fois été invisible.

 

En troisième ligne, Camara n’a pas apporté offensivement ce qu’on aurait pu espérer, c’est à dire des en-avant dès qu’il touche la balle comme Bernard Le Roux. Car cette stratégie offensive reste jusqu’à présent la meilleure solution pour faire des mêlées et tenter d’obtenir des pénalités pour grappiller des points au tableau d’affichage. Son compère Wenceslas Lauret n’a guère été plus en vue. Bon, la différence, c’est que Lauret, on sait dès le début du match qu’offensivement il a un potentiel à peine plus important que Vincent Lambert. Mais sur les tâches défensives, ça reste une valeur sûre. Enfin, Gourdon a été fidèle à ses premières sorties en bleu : plutôt propre. Dans un poste un peu plus exposé, il a été solide sur les fondamentaux, tentant même de petits hommages à son prédécesseur au poste Louis Picamoles avec quelques charges coudes en avant.

 

” – T’as pas joué dans Maman, j’ai raté l’avion ?

– T’as pas joué dans Alvin et les chipmunks ?

– …

– …

– Connard.

– Pareil. “

 

À la charnière, la tentation de tomber sur Machenaud (juste parce que c’est Machenaud et que c’est rigolo) est forte mais un peu facile. Le demi de whey-lée a été solide en défense et efficace au pied. En réalité, il a surtout souffert de la comparaison avec Dupont, qui lors de son entrée, a dynamisé presque automatiquement le jeu des Français. Même nous qui sommes de gros cons méchants et cyniques, on a eu de la peine pour lui lorsqu’il s’est blessé. Enfin, neuf mois de rééduc’ à Toulouse, à la limite, ça passe. À un an près, il faisait la même chose à Castres et d’un point de vue psychologique c’était un autre challenge à relever. Pareil pour Jalibert qui ne devrait pas trop s’ennuyer à Bordeaux. Niveau rugby, le jeune ouvreur de l’UBB a livré un match assez moyen et imprécis avant de sortir. Et son remplaçant toulonnais n’a pas eu beaucoup mieux à offrir, offensivement notamment. On ne le blâmera pas pour la pénalité car, comme le prouve l’échec de Sexton un peu avant, ça arrive même aux meilleurs. Oui, et ça inclut aussi Yionel Beauxis. Même si on soupçonne Yionel de les rater volontairement par humilité, pour ne pas trop attirer l’attention sur lui avec des pourcentages de réussite semblables à des scores électoraux de dictateurs africains.

 

Derrière, difficile de tirer de vrais enseignements du match, puisque les trois quarts se sont quasiment contentés de défendre pendant 80 minutes. L’idée d’aligner deux troisième lignes au centre a cependant pris tout son sens tactiquement, même si on est en droit d’attendre un peu plus de Rémi Lamerat qui a semblé bien perdu et désemparé sans Camillo Pez, Penaud Jr, Fofana ou Raka pour combiner.

Sur les ailes, Thomas a réussi à bonifier un de ses rares ballons, contrairement à Vakatawa qui confirme match après match qu’il a définitivement renoncé au rugby le jour où il a signé au Racing. Enfin à l’arrière, le Soldat Inconnu s’en sort avec un bilan mitigé : quelques belles prises de balles en l’air, quelques sorties moins sûres, mais un jeu au pied long plutôt pratique.

 

“Putain, enfin une vraie pelouse ! Je vais dormir ici moi, histoire d’en profiter un peu…”

 

BILAN :

Dans le négatif : 

Les Fidji sont passées devant nous au classement IRB, ce qui reste la meilleure blague de ce compte-rendu.

On ne sait toujours pas ce que Galthié veut dire par « Momentum ». Et lui non plus probablement.

Tous ceux qui ont joué au Petit Guilford sans tricher sont probablement décédés à l’heure actuelle.

On a pas de plan de jeu. Et on en aura pas de sitôt.

Notre seule façon d’espérer face à des équipes bien organisées est de faire n’importe quoi pour créer un chaos propice à la French Chatte. Car comme le disait le Joker dans Batman : « le chaos a pour lui qu’il est impartial ». On fait ainsi remonter nos chances de victoire à du 50/50 dans chaque match, ce qui n’est pas énorme mais reste bien supérieur à tout ce qu’on peut espérer, y compris contre l’Italie.

On ne le méritait pas mais gagner ce match aurait été une belle manière de mettre en avant la French Touch chère à Bernard Laporte : on est nuls mais avec un peu de chatte et d’embrouille, ça peut passer.

 

Dans le positif : 

On est les nouveaux Italiens et Jacques Brunel est donc finalement un très bon choix de coach.

On a des couilles et du coeur.

Et surtout…

ON A YIONEL BEAUXIS !

 

Retour sur France-Angleterre (3-20)

 

Le contexte :

 

L’été est sans doute la période préférée de l’année d’une grande partie de la population. Il fait beau, on fait des voyages et on attrape tout un tas de trucs (des Pokémon, des coups de soleil, des MST…) Mais du point de vue de l’actualité, c’est aussi une période où il ne se passe strictement rien.

 

D’ailleurs, il ne se passe tellement rien que le seul moyen d’échapper à un énième reportage sur la couleur des parasols est de voir un Français marcher très très vite pendant 50 kilomètres sans se faire caca dessus. Ou d’attendre que le Président américain et sa susceptibilité digne des plus grands fans du RCT ne décide de déclencher la troisième Guerre mondiale pour faire taire un mec qui, avec sa grande gueule et ses pulsions suicidaires, n’est pas sans rappeler un demi de mêlée provoquant ouvertement un talonneur sur un terrain de rugby.

 

Cet intérêt soudain et très ponctuel pour les sujets dont tout le monde se fout ne pouvait donc que profiter à la Coupe du monde de rugby féminin qui se déroule depuis une quinzaine de jours en Irlande. Comme tout le monde vous avez donc, l’espace de 24h, fait semblant de vous passionner pour ce sport qui ressemble beaucoup trop au Top 14 pour avoir un réel intérêt. Avec l’espoir secret de voir pour la première fois depuis trop longtemps la France battre l’Angleterre au rugby. Le simple fait de susciter une petite once d’espoir étant déjà une belle victoire pour le rugby féminin face à son pendant masculin.

 

Bref, les Françaises sont très convaincantes depuis le début de la compétition, elles ont marché sur l’Irlande en quart de finale et elles affrontent l’Angleterre en demi-finale sous la pluie. Si vous étiez nés en 2003, vous pouvez commencer à flipper, ceci ressemble beaucoup trop à un mauvais remake dont Hollywood a le secret depuis quelques années.

 

La compo :

 

 

Le Match :

 

Comme pour le quart de finale, France Télévisions a sorti le grand jeu et le match est retransmis en prime sur France 2 avec Matthieu Lartot et Sandrine Agricole aux commentaires. Pas de Fabien Galthié cette fois, ce qui est dommage car il aurait sans doute trouvé un commentaire très pertinent à faire sur l’impact de la pluie sur la coiffure des joueuses. Le duo a pour mission de trouver l’équilibre entre objectivité et pédagogie sans tomber dans les commentaires un brin condescendants sur « ces filles » dont on veut tellement vanter les mérites qu’on finit par les traiter très différemment de leurs homologues masculins, soit l’exact opposé de ce qui est recherché à la base. Enfin… l’absence de Sylvain Marconnet au micro montre que, même s’il reste du chemin à parcourir pour offrir aux joueuses les conditions de travail qu’elles méritent, elles ont désormais le droit à un minimum de respect.

 

La cérémonie protocolaire permet de prouver une première fois qu’il n’y pas de différences entre les matchs masculins et féminins : les pintes des supporters sont aussi pleines que leurs heureux propriétaires et les joueuses sont incapables de chanter en rythme sur l’hymne national. On notera au passage que la n°10 du XV de la Rose s’appelle McLean, ce qui n’est pas franchement rassurant et que celle du XV de France joue à Rennes, ce qui ne l’est pas beaucoup plus… et donne irrésistiblement envie de gueuler « COMBAT D’INFIRMES ! » avec la voix de Cartman dans South Park.

 

Bref, le coup d’envoi de la rencontre est donné et après avoir subi les premières minutes, les Bleues marchent sur la mêlée anglaise et profitent d’une pénalité pour aller jouer dans les 22 mètres adverses. La touche à suivre sera gâchée par une première pizza de la capitaine Gaëlle Mignot. Si les Françaises n’avaient pas réussi à enchaîner cinq passes juste avant, la ressemblance avec l’équipe masculine serait vraiment troublante.

 

Mais la crainte d’un mimétisme va heureusement vite se dissiper. En effet, les Bleues mettent la main sur le ballon et, malgré la pluie, enchaînent les temps de jeu. Les sorties de balles sont propres, l’alternance est bonne et techniquement on voit de très belles choses, malgré des conditions de jeu compliquées. Mais heureusement, à chaque fois qu’on commence à être impressionné, une faute de main ou un mauvais choix vient tout gâcher. Braves et valeureuses comme les Écossais de la belle époque (celle où on les battait encore, en fait) les Françaises dominent mais n’arrivent pas à concrétiser leurs efforts au tableau d’affichage.

 

Chez les filles aussi, quand une pilière se retrouve à la place du demi de mêlée ça fait flipper tout le monde

 

Les Anglaises, elles, ne s’embarrassent pas de préliminaires. À peine revenues dans le camp français, elles mettent les Bleues à la faute et ouvrent le score : 3-0. Têtues et bornées, comme toutes les… sportives de haut niveau qui se respectent, les Françaises repartent à l’assaut. Mais, le scénario se répète une nouvelle fois, aussi prévisible que le cheminement pour résoudre un crime dans un épisode des Experts : les Françaises dominent, jouent bien, mais sont incapables de conclure. Elles restent de plus sous la menace d’un contre adverse, comme en témoigne une relance d’Emily Scarratt qui s’échappe le long de la ligne de touche et nous pousse à crier « JEANNE, AU SECOURS ! » avant qu’Élodie Guiglion ne vienne finalement sauver la patrie.

 

On notera au passage que les deux équipes font peu de fautes dans les rucks, contrairement à leurs homologues masculins, ce qui permet d’une part de voir un jeu plus agréable, et d’autre part de supposer qu’elles connaissent bien mieux les règles. En tout cas si on se base sur le regard étonné que prennent tous les joueurs du Top 14 lorsqu’ils se font pénalisés après avoir sauté dans le camp adverse la tête la première.

 

La fin de la première période est dans la continuité du début du match. Les Françaises proposent un jeu séduisant mais une touche perdue ou une faute de main vient systématiquement tout gâcher. Pendant ce temps, le chrono tourne et les Anglaises gèrent la partie sans trembler comme si elles étaient parfaitement conscientes de la cruauté du scénario en train de se dessiner. On se demande même si l’une d’elle ne va pas lâcher un petit « You’re so french… », avec un sourire en coin.

 

Heureusement, une pénalité obtenue et transformée par Shannon Izar juste avant la mi-temps permet à tout le monde de se rassurer… et à Matthieu Lartot de faire une blague sur le nom de famille de l’ailière française. Blague qu’il est obligé d’expliquer puisqu’il faut parler basque pour la comprendre et que tout le monde ne joue pas au golf avec Imanol toutes les semaines.

 

Pendant la pause, France 2 diffuse un spot pour la promotion de la candidature française à l’organisation de la Coupe du monde 2023 avec Bernard Laporte dans le rôle principal. De quoi regretter que Mohed Altrad dirige une boite spécialisée dans le bâtiment et non la communication, sinon on aurait peut-être eu une pub un peu moins pourrie. On ne reviendra même pas sur le slogan « Ze French Touch » qui est probablement le terme le plus con et absurde qu’on ait inventé ces trente dernières années. Comme tous les termes qui ont « French » dedans d’ailleurs (French Tech, French Kiss et French Flair par exemple). L’exception confirmant la règle étant French Chatte évidemment.

 

À la reprise, les Anglaises décident de reprendre les choses en main et campent dans le camp bleu. Les Françaises qui se révèlent même carrément imprudentes comme sur ce coup de pied par dessus de Drouin alors que la France joue dans ses 22 mètres. Il faudra un retour improbable d’Audrey Forlani et ses go-go-gadgeto bras de 3 mètres 50 pour pousser Wilson en touche avant qu’elle ne puisse aplatir.

 

Hommage à Fabien Galthié : ceci est un surnombre

 

Mais, cantonnées à camper devant leur ligne, les Françaises ne font que repousser l’inévitable échéance. Les Anglaises les harcèlent avec la méthode et la lourdeur d’un frotteur pervers de la ligne 13 du métro parisien. Les stats de plaquage des Françaises explosent mais les Anglaises finissent par grappiller une pénalité qui leur permet de porter le score à 6-3, ce qui est un moindre mal pour les Bleues, tellement éclipsées dans ce second acte qu’il est presque nécessaire de mettre des lunettes spéciales pour continuer à les regarder.

 

Un peu plus tard, la France pense avoir fait le plus dur et tient une occasion de se dégager mais rien n’y fait : revoilà les Anglaises près de l’en-but bleu, puis carrément à l’intérieur quelques instants plus tard quand Bern franchit royalement la ligne. Facilement transformé, l’essai permet aux Anglaises de prendre 10 points d’avance.

 

Quand on te dit que le Mont Saint Michel est en Normandie

 

Il reste 13 minutes à jouer et les Françaises doivent marquer deux fois pour espérer l’emporter. « Tous les points vont compter » nous prévient Sandrine Agricole, qui n’a décidément rien à envier à la pertinence des consultants masculins. Les Françaises espèrent par ailleurs profiter de la sortie d’Abby Scott, probablement fatiguée que tout le monde lui vienne dessus et donc logiquement retournée au vestiaire, d’où elle n’est jamais censée sortir.

 

Malheureusement, le miracle n’aura pas lieu. Pendant le quart d’heure restant, les Anglaises continuent à parfaitement jouer le coup. Occupation, jeu à une passe, les Françaises sont acculées et ne réussiront plus à les mettre en danger. Sur une énième tentative de relance depuis leur en-but dans les arrêts de jeu, elles encaisseront même un nouvel essai après une faute de main. Score final : 20 à 3.

 

Conclusion :

 

C’est cruel, rageant, mais en même temps le sport ne peut pas toujours être fait de belles histoires. Les Bleues s’inclinent donc pour la septième fois en demi-finale d’une Coupe du monde. La leçon pour cette fois sera probablement que, même s’il est très romantique de s’obstiner à faire des passes quand il pleut, sans un jeu au pied correct et un minimum de réussite en touche, gagner un match de rugby est tout de suite plus difficile. D’ailleurs, si elles avaient joué en jaune et bleu, les moqueries n’auraient pas tardé et on aurait sans doute aussi plus sérieusement pointé l’échec sportif que représente ce manque de réussite.

 

Mais, contrairement à leurs adversaires du jour et bien malgré elles, les joueuses françaises continuent de bénéficier d’un statut bâtard qui ne laisse peu de place à un début de professionnalisme et donc, à la progression. Pour changer de dimension et espérer un jour soulever la coupe, il faudra probablement un peu plus que l’état d’esprit irréprochable qui a été le leur tout au long de la compétition. Par exemple, un président de Fédération qui ne change pas d’entraîneur six mois avant une compétition et qui met de vrais moyens à leur disposition pour leur permettre de vivre du rugby et d’avoir le niveau qui en découle. 

 

D’ici là, et comme depuis des années, tout le monde continuera de s’extasier devant le courage « de ces filles », qui se priveraient probablement bien d’un peu de compassion surjouée et des tweets de leurs collègues masculins contre un peu plus de moyens. Et à défaut de pouvoir accuser les étrangers et le Top 14, reste l’éternelle question : d’ici là, on fait quoi ?

 

Retour sur Irlande-France (19-9)

 

Le contexte :

 

« Les matins se suivent et se ressemblent » chantait Joe Dassin, qui n’était peut-être pas un fan de rugby mais qui a encore assez d’influence dans l’hexagone pour pousser les plus grandes stars du ballon ovale à se balader sur les Champs, le coeur (un peu trop) ouvert à l’inconnu à des heures tardives.

 

Des paroles qui doivent en tout cas faire écho chez Guy Novès qui se lève depuis plusieurs mois sans certitudes, si ce n’est celle, inébranlable, que le doublé est impossible. Ce match en Irlande tombait donc à point nommé pour enfin faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre. Qu’on retombe dans la résignation déprimante des années PSA ou le fol espoir d’une ère nouvelle, peu importe, mais qu’on sache, bordel. Que vaut cette équipe de France ? Qu’elle nous donne des raisons de l’aimer, ou au pire des raisons de la détester, mais qu’elle nous sorte de cette friendzone sportive insupportable qui nous force à la regarder mi attendri, mi agacé en nous disant « Ah dommage ! Si seulement… » toutes les trois minutes.

 

La compo :

 

 

 

Le match :

 

Le match démarre par une bataille publicitaire pour l’organisation de la Coupe du monde 2023. L’équipe de France arbore pour la deuxième fois consécutive un hashtag #France2023 sur son maillot (un #ToujoursPasIntentionnel aurait été plus drôle) alors que l’Irlande a dépensé la moitié de son PIB dans une affiche 4×3 et un spot touristique sur France 2 pendant l’avant match. Un enjeu à ne pas prendre à la légère puisque l’équipe organisatrice est automatiquement qualifiée pour la compétition, ce qui ne serait pas forcément un luxe pour les Bleus quand on voit l’évolution de notre classement IRB ces dernières années. Enfin, en même temps, a-t-on envie de prendre le risque de voir le XV de France remporter la Coupe du monde 2023 avec Laurent Labit et Laurent Travers à sa tête ? Je ne crois pas.

 

Après l’instant promotionnel vient la minute émotionnelle avec les hymnes. Enfin le quart d’heure émotionnel plutôt, puisque l’Irlande a tellement d’hymnes à chanter que Scott Spedding a le temps de relire l’appel du 18 juin trois fois avant qu’ils aient terminé. « La chanson du Soldat », « L’appel de l’Irlande », il ne manque plus que « La complainte du Leprechaun automate » et « SOS d’un Rouquin en détresse » pour transformer l’interlude patriotique en opéra-rock.

 

Après cet intermède « The Voice », Nigel Owens peut enfin donner le coup d’envoi du match. L’arbitre, d’ailleurs toujours plus à la pointe de la technologie comme en témoigne le maillot déformé par les gadgets et outils de tracking qui s’accumulent dans son dos. Il ne manque plus qu’un harnais et il pourra directement faire la loi en hauteur, en se déplaçant d’avant en arrière et de gauche à droite depuis le câble de la spidercam. Risqué certes, mais spectaculaire. Ah, et une commande vocale pour pouvoir directement tweeter ses décisions afin qu’elles apparaissent sur les écrans géants ne serait pas de trop non plus.

 

Enfin bref, le coup d’envoi est donné et ce sont les Français qui mettent la main sur le ballon en premier. Les temps de jeu s’enchaînent mais une mauvaise passe de Serin vient mettre un terme à l’action. « Antoine Dupont, vite ! » tweete alors @Michel_LAveyronnais. « Et Parra dans tout ça ? » répond @LaFemmeStYorre avant que Grégory Le Mormeck ne réclame le retour de David Marty, sans aucun rapport avec l’action mais parce que ça ne fait jamais de mal.

 

Quelques instants plus tard dans un ruck, King Pica réussit à arracher un ballon à la force des bras au milieu de trois Irlandais. À cette vision on ne peut s’empêcher de penser qu’Excalibur n’aurait pas fait la maligne si le troisième ligne avait eu besoin d’un truc pointu pour couper du sauciflard en Angleterre au début du VIème siècle.

 

Bien dans leur match, les Français dominent malgré des maladresses qui les empêchent de concrétiser. Les Irlandais quant à eux, ont du mal à rentrer dans leur partie, comme en témoigne cette touche directe de Sexton à la 10ème minute. Une erreur inhabituelle et que Jean-Marc Doussain n’aurait pas faite. Même si on lui avait demandé d’ailleurs.

 

Les Bleus tentent alors de profiter de ce temps fort. Après une percée de Fickou, Serin s’échappe au bord d’un ruck et humilie Kearney avec un cadrage débordement somptueux. L’arrière Irlandais est alors immédiatement évacué du terrain et devient le premier joueur à devoir passer le protocole commotion sans avoir été touché par un adversaire. La course folle de Serin est quant à elle arrêtée quelques mètres plus tard, et débouche sur une faute irlandaise qui permet à Lopez d’ouvrir le score pour l’équipe de France. Sur Twitter tout le monde est formel, Serin est le meilleur joueur du monde. Après David Marty précise quand même Grégory Le Mormeck.

 

 

Retrouvez l’action de Serin face à Kearney dès maintenant sur Youporn

 

 

La domination française ne s’arrête pas là. Après un coup de pied de mammouth de Scott Spedding et une Poitrenade de Simon Zebo, la France obtient une mêlée à cinq mètres de l’en-but rouquin. Sur la sortie de balle, Lopez adresse une passe au pied vers l’aile d’Huget qui s’envole pour attraper le ballon tel le chien Buddy dans le final de Air Bud 2. Dans sa chute, il cafouille le ballon mais Fickou qui passait par là le ramasse et le transmet à Lamerat qui s’échappe et marque. Les Bleus célèbrent leur essai, Fabien Galthié réussit à sortir « C’est bien construit ! » alors que cet essai n’est qu’une immense accumulation de French Chatte et Nigel Owens demande la vidéo pour savoir s’il y a « une raison valable de faire chier les Français… euh ne pas pas accorder cet essai, sorry ». Et c’est le cas puisque sur sa récupération Fickou commet un léger en-avant qui entraîne donc l’annulation de l’essai. On revient tout de même à la pénalité et Lopez prend les points pour donner six longueurs d’avance aux Bleus.

 

Voilà, si avez lu jusqu’ici félicitations, il est encore temps d’arrêter pour rester sur une impression positive de la prestation des Français pendant ce match. Puisqu’après cette séquence, les Bleus ne vont plus voir le jour jusqu’à la fin de la rencontre.

 

Assez rapidement, les Irlandais reprennent le jeu à leur compte et campent dans la partie de terrain française. On connait la capacité des Frenchies à se laisser envahir sans rien dire mais là ça frôle la caricature. Arcboutés en défense, les Bleus sont incapables de sortir de leur camp et subissent les assauts adverses. Les Irlandais sont tellement en confiance qu’ils n’hésitent pas à prendre la touche ou la mêlée plusieurs fois de suite plutôt que de tenter des pénalités faciles. Comme si en plus de faire mal à nos joueurs, il fallait aussi qu’ils heurtent la sensibilité de notre entraîneur. Bref, malgré une belle résistance, les Français finissent par céder et Murray réussit à aplatir après un énième départ au ras près d’un ruck.

 

 

Bah bravo Murray

 

Grâce à cet essai transformé, les Irlandais repassent donc devant au score et mènent 7 à 6. Mais ils ne s’arrêtent pas là et repartent immédiatement à l’attaque. Avec une originalité qui ferait passer  Star Wars 7 pour un trésor d’innovation scénaristique, les Tout-Verts acculent à nouveau les Français devant leur ligne. Une nouvelle fois, ils snobent les trois points pour prendre la touche et tentent d’inscrire un deuxième essai. Et une nouvelle fois, la résistance française s’organise, sur le tard certes, mais efficacement. Le maul vert recule de quinze mètres et les Bleus réussissent à obtenir une touche. Problème : on est à ce stade bien trop dans le rouge pour être capable de mettre en place quoi que ce soit. Résultat, quinze secondes plus tard, Le Roux garde son ballon au sol et permet aux Irlandais de revenir dans notre camp.

 

Il faut une nouvelle défense héroïque pour permettre aux Bleus de ne pas encaisser de points dans les minutes qui suivent. L’arbitre siffle la fin de la première période et renvoie tout le monde aux vestiaires. Les Français ne sont menés que d’un point et c’est un miracle tant on a eu l’impression sur la fin d’assister à une opposition entre une équipe première et sa réserve un vendredi soir. Un match d’opposition où inévitablement, l’équipe réserve est interdite de toucher le ballon et doit se contenter de défendre pour laisser travailler l’équipe fanion.

 

Et le pire est à venir puisque le début de seconde période n’est pas plus glorieux. Toujours acculés dans leur camp, les Français se mettent à la faute et cette fois, les Irlandais arrêtent de faire mumuse pour le plaisir et prennent les points au pied. Un drop puis une pénalité de Sexton creusent l’écart, le XV de France est mené 16 à 6.

 

À ce stade, le lieu le plus raisonnable pour suivre le match est Instagram. On évite ainsi de voir les Bleus se faire martyriser tout en sachant que si les joueurs Français finissent par entrer dans le camp irlandais, ils bombarderont les réseaux sociaux de photos pour immortaliser ce moment rare et partager avec nous la vision de ce bout de terrain dont on commence à douter de l’existence tant on ne l’a pas vu depuis longtemps.

 

Après une énième grosse séquence irlandaise, on se prend cependant à espérer. Sur un turnover, Scott Spedding relance et remonte 40 mètres balles en main. On le maudit de se débarasser du ballon au pied mais Zebo ne parvient pas à contrôler la balle grâce à un bon plaquage de Yoann Huget. Indéniablement la meilleure action du match de l’ailier toulousain, qui n’est jamais aussi bon que quand il plaque par derrière quand l’adversaire ne s’y attend pas. Bref, les Français récupèrent la gonfle et peuvent enchaîner. Malheureusement, Bernard Le Roux se retrouve sur la trajectoire de la balle et commet un en-avant qui met un terme à l’action. C’est regrettable mais en même temps le mec s’appelle Le Roux, c’est difficile de lui en vouloir d’être décisif pour les Irlandais.

 

 

Quand t’as passé l’aprem à jouer dans le froid dehors avec les copains et que tu réalises en rentrant que ta mère a oublié de racheter du Nesquick

 

Heureusement, à force de résilience, de volonté et d’une succession de temps de jeu à deux à l’heure, les Bleus réussissent à grappiller une pénalité dans les cordes de Camille Lopez. 16-9 : les Français sont à un essai transformé du match nul. Et pourtant, rarement un essai transformé n’aura paru si improbable et inaccessible. Ou alors, autant pousser le délire à fond et compter sur une interception de 80 mètres de Uini Atonio.

 

Malheureusement, la réalité n’a pas d’humour et quelques temps de jeu seulement après le renvoi, les Français sont à nouveau bêtement pénalisés. 19-9, il reste 4 minutes à jouer. Quatre minutes où les Irlandais conservent le ballon, sans forcer leur talent. Nigel Owens renvoie tout le monde au vestiaire, merci d’être venus, au revoir.

 

 

Les Joueurs :

 

Solide en conquête, la première ligne française a été plutôt à son avantage. Guirado s’est montré plus disponible dans le jeu que lors de ses dernières sorties, fonçant tête baissée sur la première chose verte à proximité. Malheureusement, c’était bien souvent la pelouse et malgré toute sa bonne volonté, les charges du capitaine des Bleus auront souvent eu l’efficacité d’une attaque trempette de Magicarpe.

 

En deuxième ligne, Sébastien Vahaamahina a réalisé un bon début de match. Sa sortie relativement prématurée n’a pas aidé, Ledevedec ayant des qualités, mais probablement pas celles dont on avait le plus besoin pour réussir à remettre la main sur le ballon et combler notre déficit de puissance dans les zones de combat. Mention tout de même à son plaquage à retardement sur Sexton qui a fait la fierté de tout le pays coujou. À ses côtés, Maestri a été choulyesque, comme depuis plusieurs saisons maintenant.

 

À la Boucherie, on est pas fan des jugements sur statistiques, mais là il faut reconnaître que rien ne résumera aussi bien le match de Le Roux que ces quelques chiffres :  5 ballons touchés, 3 en-avant, 2 fautes, 2 plaquages manqués, 1 touche perdue. On avait pas vu constat chiffré aussi accablant depuis le score de Jean-François Copé à la primaire de la droite.

 

 

Exclusif : on a retrouvé une des mains de Le Roux ! En fait, c’est Laurent Travers qui l’avait gardée. 

 

 

Heureusement qu’à ses côtés il y avait Gourdon, précieux en défense et Picamoles, sur une autre planète depuis novembre. PICA parait jouer en mode facile et avec un réacteur dans chaque cuisse. La rumeur dit même qu’une fois il a traversé la route sans regarder et que sans le faire exprès, il a renversé un bus. À noter aussi la rentrée prometteuse d’Ollivon qui devrait retrouver sa place de titulaire dès l’Italie. En même temps après le match de Le Roux, même Lamboley serait plus légitime en troisième ligne.

 

Passons au sujet qui fâche maintenant, avec la charnière. Il est peu probable qu’elle soit changée pour le prochain match (à part pour rappeler Lionel Beauxis je ne vois pas trop l’intérêt en tout cas), mais force est de constater qu’elle a déçu et souffert de la comparaison avec la paire Murray-Sexton. Pas évident de briller quand tu défends pendant 60 minutes certes, mais passée la 25ème, ni Serin ni Lopez n’ont vraiment réussi à prendre le jeu à leur compte. Les rares ballons d’attaque français en deuxième période se sont résumés à une improvisation totale à base de passes impossibles (et donc foireuses), de tentatives désespérées en solitaire et de choix WTF pour un résultat bordélique et complètement inefficace. Parce que c’est bien mignon de vouloir créer du désordre pour libérer des espaces mais si le 2 contre 1 que tu réussis à créer en bout de ligne tu dois le jouer avec Atonio/Maestri, bonne chance.

 

Au centre, plus ça va plus Fickou ressemble à un personnage secondaire de Game of Thrones. Tu le vois 4 minutes par épisode et à chaque fois qu’il apparaît tu es surpris parce que tu pensais qu’il était mort la saison d’avant. Lamerat est plus remarquable, principalement grâce à son hyperactivité en défense et parce qu’il est maintenant le meilleur marqueur de « presque-essais » de l’ensemble de l’histoire du tournoi des Six Nations. C’est admirable une telle abnégation et un tel manque de chatte. Si ce garçon est amené à disputer une finale avec l’ASM, tout peut se produire c’est fascinant. Sauf une victoire de Clermont au bout bien sûr. À noter la première sélection de Chavancy également, qui a été discret comme un supporter du Racing à Colombes. Le match manquait peut-être un peu de ballons portés pour lui.

 

Nakaitaci sur son aile a montré quelques trucs intéressants. Mais entre la pluie et l’absence de ballons, c’était pas vraiment le match idéal pour se distinguer. Heureusement pour lui, Huget était titularisé sur l’aile opposée, ce qui permet toujours de briller plus facilement. Yoann Huget c’est comme quand tu joues au flipper une fois tous les trois ans. T’appuies comme un bourrin sur les commandes, ça part dans tous les sens, ça rebondit, ça clignote, ça prend des trajectoires improbables et une fois sur trente t’as un coup de chatte et tu fais un top score sans le faire exprès. Bon après, est-ce que ça vaut vraiment les 10 euros que tu lâches pour les 29 autres fois où tu fais de la merde et perds la moitié des billes sans même réussir à les toucher ? Pas sûr.

 

Enfin à l’arrière, Scott Spedding a bien démarré grâce à quelques percées et de belles touches. Puis, plus rien, si ce n’est un manque d’assurance sous les ballons hauts dont les Irlandais ont bien profité. Intelligence tactique diront certains. Peut-être. Enfin, personnellement, si je joue à l’ouverture, qu’il pleut des cordes et que l’arrière adverse est atteint de strabisme, monter des quilles me paraît plus relever du bon sens que du génie mais bon…   

 

 

JEAaAaAANNeE ! AU SECOUuUuURS !

 

 

Conclusion :

 

Une semaine de plus s’est écoulée et nous voilà bien avancés. On a perdu contre meilleur que nous, comme presque à chaque fois depuis cinq ans. Sauf que la liste des équipes « meilleures que nous » s’allonge et que les limites montrées par l’équipe ne semblent plus seulement dûes à un manque de préparation, un manque de temps, un manque de fraîcheur ou un manque de Lionel Beauxis. Les Français sont moins bons dans tous les secteurs de jeu et une victoire contre une équipe du Top 5 est maintenant labellisée comme un exploit, ce qui en dit long sur la dynamique de l’équipe de France.

 

Heureusement, Super Bernad a annoncé des mesures fortes chez Stade 2 dimanche. Contrats fédéraux, match supplémentaire contre une nation de l’hémisphère sud pour les financer. C’est aussi crédible et prometteur que le plan de jeu de Patrice Lagisquet, on a hâte de voir ça.

 

En attendant, rendez-vous dans deux semaine en Italie. « Ça va bientôt payer » a promis Kévin Gourdon après le match face à l’Irlande. On aurait plus tendance à croire cette phrase si on l’avait dite en parlant de François Fillon, c’est dire à quel point on est pessimistes. Mais n’oubliez pas qu’une défaite condamnerait Guy Novès et laisserait la porte ouverte à une équipe de France dirigée par Fabien Galthié ou les deux Lolos. Alors plus que jamais, allez les Bleus !

 

Le Stagiaire

 

Retour sur Angleterre-France [19-16]

 

Par Le Stagiaire,

 

Le contexte :

 

Débuter le tournoi en affrontant l’Angleterre revêt toujours un goût un peu particulier. Une victoire équivaut à un tournoi réussi, peu importe le résultat des autres rencontres, et une défaite réduit à néant les espoirs de toute une année. L’excitation se mêle à la frustration. Un peu comme si on commençait toutes nos relations sociales en couchant avec la personne avant de lui dire bonjour. Certes on gagne du temps, mais après on s’emmerde un peu.
Au-delà des enjeux habituels, cette rencontre marquait un tournant pour les deux équipes concernées, avec la possibilité pour les Anglais de décrocher un nouveau record de victoires consécutives, et pour les Français de fournir à Guy Novès un premier match référence lui permettant de répondre « Ok, mais t’as gagné combien de fois à Twickenham toi ? » à toutes les questions désagréables des journalistes pour les trois ans à venir.

 

La compo :

 

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Le match :

 

Les Français démarrent plutôt bien le match et enchaînent les temps de jeu. Vakatawa, qui n’est pas sorti de son 25m2 de Marcoussis depuis le mois de novembre semble notamment très en jambes. Il faut dire qu’après avoir fini deux fois GTA V et trois fois Singstar, le pauvre Virimi commençait à se faire chier et avait de l’énergie à revendre. On imagine bien le Franco-Fidjien se faire des passes à lui-même grâce à l’appui du mur en écoutant du Avril Lavigne à fond (jusqu’à ce que Jo Maso vienne lui intimer l’ordre de baisser le son).

 

Pour son premier ballon, l’ailier du XV de France prend l’intervalle et nous gratifie donc d’un « reverse offload », un mot inventé par Fabien Galthié pour se la péter qui qualifie une sorte de passe après contact acrobatique (et en avant) comme seuls ces fantasques Fidjiens qui jonglent avec des coquillages quand ils sont enfants savent nous en fournir (source : Pierre Villepreux). L’action se poursuit et se termine par un en-avant de Lamerat à quelques centimètres dans l’en-but. Comme quoi avoir des Clermontois dans l’équipe c’est bien, mais comme d’habitude il ne faut pas trop compter sur eux pour conclure.   

 

La persévérance des Français finit tout de même par payer puisque quelques minutes plus tard, une nouvelle offensive débouche sur une pénalité transformée par « El Hijo de La Luna » Camille Lopez. On notera au passage la belle manchette de Uini Atonio. Parce qu’ils sont mignons à se vanter de faire du MMA toute la semaine les Anglais, mais faut assumer après.  

 

Vexés, ils réagissent peu après et une faute de Damien Chouly permet à Owen Farrell d’égaliser. Bon au moins pour une fois on n’aura pas eu attendre qu’il soit remplacé pour remarquer le troisième ligne clermontois sur le terrain.

 

L’action suivante quant à elle, permet de constater que l’IRB a parfaitement compris les leviers d’un bon produit commercial. La recette d’un blockbuster efficace en 2017 repose en effet sur deux ingrédients principaux : de la bagarre et un peu d’humour. Pas besoin d’aller chercher bien loin pour voir de la violence (surtout quand Louis Picamoles est sur le terrain), mais ce n’était pas gagné pour la partie humoristique (surtout quand Guy Novès est en tribunes). Heureusement l’arbitre a pris ses responsabilités et, après un plaquage de Jonny May faisant décoller les appuis de Gaël Fickou de 30 centimètres pour le faire retomber sur l’épaule (qui va a priori jusqu’au coude), M. Gardner sort le carton jaune contre l’ailier anglais.
Côté français, un joueur se distingue particulièrement en ce début de match : Louis Picamoles. Après une nouvelle percée où il renverse trois joueurs adverses, King Pica est plaqué haut par Itoje et Lopez inscrit trois points supplémentaires. Au passage, Tom Wood vient chercher Baptiste Serin avec un beau petit plaquage à retardement et un accrochage au sol. Le demi de mêlée bordelais ne se laisse pas faire et se défend, ce qui n’est pas sans lui rappeler ses embrouilles de récrée l’année dernière quand un CM2 essayait de lui piquer son Pitch et sa bouteille de Vita Coco. L’action n’échappe pas à l’oeil attentif de Fabien Galthié qui pointe la lâcheté de Tom Wood qui s’en prend à un plus petit que lui. On a quand même bien envie de rappeler au consultant de France Télé que s’il fallait toujours taper sur quelqu’un de plus costaud que soi, Jamie Cudmore serait bien emmerdé pour trouver des camarades de jeu et ce sport perdrait grandement en intérêt. Enfin, admettons tout de même que Tom Wood n’a pas pris trop de risques sur le coup, mais tout le monde ne peut pas avoir le courage de MIKE BROWN, que voulez-vous.

 

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Le Crunch®, c’était mieux avant®

 

Menés de six points, les Anglais réagissent et s’appuient pour cela sur ce qu’ils savent faire de mieux : tricher. Dans un ruck, M. Gardner, et surtout Vahaamahina, se font duper par Dylan Hartley, auteur d’une intox aussi crédible qu’un article de FDeSouche. Le deuxième ligne français est pénalisé et permet à Farrell de faire revenir son équipe à trois points. On croit que le match échappe aux Français peu de temps après quand PICA peine à se relever après une chute sur le dos sous un ballon haut. Plus de peur que de mal finalement, telle une tortue, il aura suffi de l’aider à se retourner pour qu’il puisse reprendre la partie.

 

Malgré un arbitrage parfois aussi cohérent que les propos d’un première ligne à 4 heures du mat’ Rue de la Soif, le match est plaisant à suivre et les Français se montrent assez entreprenants, dans la lignée de leur prestation de novembre. PICA perce une nouvelle fois la défense anglaise après un bon service de Serin. Petit changement tout de même par rapport au début du match, PICA n’a pas eu à renverser quatre défenseurs pour avancer, le premier rideau se contentant de le laisser passer. Difficile de leur en vouloir, même pour le salaire de Pénélope Fillon, peu de gens accepteraient de se jeter dans les jambes de Louis Picamoles quand il a pris quinze mètres d’élan.

 

Il est finalement mis au sol par un bon retour de Dan Cole et quelques temps de jeu plus tard, le ballon finit à nouveau en dehors du terrain à quelques centimètres de la ligne. Les Anglais réagissent et remontent rapidement le terrain après avoir joué vite la touche. Il faudra une énième faute bête de Wood pour stopper l’offensive. « Faute bête de Wood », soit deux mots de trop puisqu’un seul aurait suffi pour deviner les autres. On notera au passage que depuis qu’il arbore son nouveau look de Jean-Pierre Pérez anglais, le joueur de Northampton semble avoir obtenu les mêmes super-pouvoirs de conneries que la légende occitane.

 

Après une nouvelle séquence humoristique où M. Gardner fait signe aux Anglais de disputer un ballon pour mieux les pénaliser dans la foulée, les Français sont beaux joueurs et Lopez rate volontairement la pénalité. Ça ne sera pas le cas de Daly un peu après lors d’une pénalité longue distance consécutive à une mêlée.
L’Angleterre revient donc à hauteur des Français et on commence à se faire à l’idée que le retour aux vestiaires se fera sur un score nul. Mais c’est sans compter sur Virimi Vakatawa qui relance un dernier ballon et sert Spedding, qui transperce la défense anglaise. Vêtu de son caleçon porte-bonheur à l’effigie de Jeanne d’Arc, rien n’arrête l’arrière des Bleus. Plaqué dans les 22, le jeu rebondit vite et la passe au pied de Lopez trouve Fickou qui gagne son duel en l’air et réussit à volleyer pour Lamerat. Le centre n’a alors plus qu’à offrir l’essai à Nakaitaci mais, dans un bel hommage à son compère disparu Fofana, il garde le ballon et se retrouve propulsé en touche. Le centre français peut réajuster son bandeau sur ses oreilles car ces dernières ont dû méchamment siffler à la mi-temps. Sortir de ces quarante minutes sur une égalité, c’est le coup du siècle pour les Anglais. Même le titre du Portugal à l’Euro 2016 était plus mérité et moins miraculeux.  

 

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“C’est bon, on a gagné les yards nécessaires, tu peux sortir en touche !”

 

À leur retour des vestiaires, les Anglais semblent décidés à mettre un coup d’accélérateur et obtiennent rapidement une pénalité. Malheureusement, Farrell tape le poteau. Du moins, son coup de pied heurte le poteau – ce qui est un peu décevant tant la perspective de voir la tête de Farrell heurter violemment le poteau est réjouissante. Attentif à la retombée, Vakatawa relance et poursuit au pied. Le rebond trompe deux Anglais et finit dans les mains du joueur français. Devant cette vision, un frisson d’inquiétude parcourt Twickenham. Tout le monde connait les dégâts que peut faire un joueur comme Yoann Huget quand il est en possession du pouvoir de la French Chatte, mais imaginez maintenant que cette dernière jette son dévolu sur Virimi Vakatawa. « Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités », disait l’oncle de Spiderman avant d’être abattu par un voyou (probablement toulonnais). Pour cette raison, il aurait été dramatique que l’ailier franco-fidjien du XV de France, déjà doué à la base, soit le nouvel Élu, tant son pouvoir aurait été grand et aurait perturbé les rapports de force du monde ovale. Les Anglais auraient alors immédiatement abandonné et aucune équipe n’aurait plus jamais osé affronter la France. Heureusement, le rebond favorable à Vakatawa semble davantage être un phénomène ponctuel qu’un choix définitif de la déesse French Chatte et l’action est vite endiguée.

 

Comme pour se rassurer, les Anglais réagissent et tout le stade croit à l’essai lorsque Daly plonge dans l’en-but. Heureusement prendre un essai d’un mec qui s’appelle Daly paraît un peu surréaliste et l’appel à la vidéo confirme que l’ailier anglais a bien laissé traîner son pied en touche sur le plaquage de Nakaitaci. De plus en plus dominateurs, les Anglais poussent mais la défense française tient bon. Le pack bleu va même remporter une mêlée déterminante à quelques mètres de sa ligne, ce qui débouchera sur un accrochage entre Dan Cole et Baptiste Serin, qui prend décidément la devise « YOLO » de sa génération un peu trop à coeur.
La domination anglaise de cette période du match n’est finalement récompensée que d’une pénalité, transformée par Owen Farrell. Les Bleus profitent ensuite d’un petit moment de répit pour retourner à la conquête du camp anglais. Et pour la première fois du match, ça marche ! L’en-but anglais, qu’on pensait protégé par une sorte de champ de force repoussant toutes les attaques françaises en touche fini par céder. À la suite d’une belle séquence, Gourdon trouve un intervalle près de la ligne et passe les bras pour Slimani qui n’a plus qu’à aplatir. Les Français reprennent 4 points d’avance et même Guy Novès exulte en tribunes. Sans être un grand partisan de la théorie du complot, mon « Bingo Apocalypse » commence à se remplir dangereusement.

 

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– Dis donc, c’est à quel Anglais que je dois mettre un carton ?

– Celui qui a une tête de con. 

– Ah… Va falloir être plus précis par contre.

 

Conscient que la situation commence à devenir problématique, Eddie Jones fait rentrer du sang frais sur le terrain. La France aussi, à sa manière, puisqu’un joueur du Racing entre en jeu en la personne de Maxime Machenaud. Mais c’est bien les Anglais qui semblent au-dessus sur cette fin de match. La mêlée française est pénalisée  (il faudra nous expliquer pourquoi toutes les filmer comme des figures de natation synchronisée d’ailleurs)  et quelques séquences plus tard, Ben Te’o franchit la ligne. Coaching gagnant pour Eddie Jones donc, et grosse déception pour Scott Spedding qui voit là un étranger réussir mieux que lui dans son pays d’adoption.
Dans le dur physiquement, le banc français ne parvient pas à faire la différence. Enfin… sauf un homme. Le seul, l’unique : Jean-Marc Sweetboobs. D’une superbe passe au pied, à l’ailier anglais, le Grandisse français scelle définitivement la victoire anglaise et nous épargne une fin de match anxiogène à pilonner la ligne anglaise jusqu’à l’inévitable en-avant de Chiocci. C’est triste de constater que tout le monde lui en veut alors qu’on devrait tous lui dire merci. Non ?

 

Les Joueurs :

 

En première ligne, Uini Atonio est le joueur qui a le plus souffert, aussi bien en mêlée que dans le jeu avec plusieurs pénalités concédées et quelques fautes de main. Si le staff cherche un gros qui ne fait pas de passes pour le remplacer, ça va commencer à être difficile d’ignorer Matthieu Bastareaud. Cyril Baille a pour sa part plutôt bien tenu son poste et a tenté de se rendre disponible en attaque quand il l’a pu. Ce qui n’excuse en rien ce look de jeune beau-gosse qui fait insulte à toute la communauté des premières lignes. Entre les deux, le capitaine Guirado a été très actif en défense, comme à son habitude, mais relativement discret en attaque si l’on compare à ce à quoi il a pu nous habituer. Il faut croire que l’air OCCITAN ne le porte plus sur le terrain comme avant. Vivement qu’il aille se ressourcer quelques jours dans la maison de Dan Carter à Collioure.  

 

En deuxième ligne, en attendant l’invention d’une Maestri-Cam permettant de suivre tous les mouvements du joueur, il nous est toujours impossible de savoir en quoi consistent ces fameuses « tâches de l’ombre » qu’il est censé remplir, et donc de déterminer s’il a vraiment une quelconque utilité sur le terrain. Au moins, il a bien rempli son rôle de garde du corps de Baptiste Serin, puisque le demi de mêlée n’a pas quitté la pelouse sur une civière. Vahamaahina a quant à lui été actif mais indiscipliné. Comme d’habitude en fait. Comme quoi c’est décidément bien chiant et difficile de se renouveler quand on parle des matchs d’un deuxième ligne.

 

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“Meeeeeerde, j’ai encore complètement oublié de me battre.”

 

Pour compléter sur les avants, Chouly s’est distingué en touche. Et je parle bien de la phase de jeu, non du moment où il était hors du terrain puisque quand ce fut le cas, personne ne l’a plus remarqué que quand il était sur la pelouse. Gourdon pour sa part, a continué sur sa lancée de novembre et aura bientôt plaqué autant de personnes dans sa vie que Taylor Swift (attention, référence pointue). À noter aussi une belle activité en attaque, comme en témoigne cette passe décisive pour Slimani sur l’essai français. On peut donner un nom au geste pour faire plaisir à Fabien Galthié. Je propose « Offload full pass ultimate 360 ».

 

Enfin, comment ne pas saluer la partie de Louis Picamoles qui n’a pas volé son trophée d’homme du match hier. On l’avait quitté en grande forme au Stade Toulousain, et depuis qu’il joue en Angleterre, il semble avoir encore progressé et acquis cette compétence « faire jouer après lui » qui manque à beaucoup de joueurs français, qui comme on le sait, n’ont pas besoin de travailler les passes. Avec une pierre foudre, c’est l’évolution assurée en Raichmoles d’ici 2019 (visuellement ça sera le même mais avec un casque à pointe). Dans tous les cas n’oubliez pas de donner son exemple à chaque fois qu’on vous dira « Grâce au Top 14 au moins les joueurs français progressent parce qu’ils côtoient des stars !».

 

Saluons aussi le match propre de la charnière. Un Baptiste Serin sobre et efficace pour sa première en tant que titulaire dans le Tournoi, et un Camille Lopez avec les qualités et les défauts qu’on lui connaît (son principal défaut étant bien sûr qu’on le suspecte d’être un peu roux). On imagine bien la paire reconduite la semaine prochaine contre l’Écosse, mais la malédiction française va bien faire en sorte qu’un des deux se blesse à l’entraînement, sur un touché ou un « Poule-Renard-Vipère ».

 

Au centre, Fickou a été discret comme les supporters toulousains depuis quatre ans, et malgré sa belle activité défensive, Lamerat a eu du mal à faire oublier l’action gâchée en fin de première période. Sur les ailes, Vakatawa a une nouvelle fois fait du bien, franchissant la défense à plusieurs reprises et cherchant toujours à faire jouer derrière lui. Maintenant il faut juste que ses coéquipiers s’habituent au fait qu’il est susceptible de réussir à leur faire la passe à n’importe quel moment et dans n’importe quelle position : avant contact, après contact, pendant le plaquage, à l’endroit, à l’envers, avec une main dans le dos, ou les deux pieds attachés. Ça leur évitera de dégueuler le ballon avec un air surpris dès qu’il le fait. À l’autre bout du terrain, Nakaitaici est notre Donald Trump à nous. On sait qu’à n’importe quel moment il peut être dangereux et foutre le bordel mais parfois il fait des trucs tellement cons qu’on se demande s’il n’a pas huit ans. Par exemple, le concept de la touche, on n’est pas sûrs qu’il ait encore bien saisi. Ou alors il faudra nous expliquer pourquoi il y court systématiquement sans s’arrêter. Quelqu’un lui a précisé que quand la consigne c’est « aplatir derrière la ligne », on parle de celle d’en-but et pas de n’importe laquelle sur le terrain ?

 

À l’arrière, belle performance de Scott Spedding, offensif comme Napoléon, résistant comme Jean Moulin, sérieux et appliqué comme René Coty.  

 

Enfin du côté des remplaçants, on saluera l’entrée de Rabah Slimani, qui a fait du bien à la mêlée française. Le pilier parisien en a également profité pour marquer son troisième essai sous le maillot bleu, soit déjà deux de plus que Nicolas Mas en 85 sélections. Une statistique qui semble confirmer la théorie du Grand Remplacement. En dehors de lui, on peinera à trouver un remplaçant français ayant eu un quelconque impact sur la rencontre, alors que chez les Anglais, James Haskell, Jack Nowell, Danny Care et Ben Te’o ont beaucoup apporté. Sans oublier Maxime Machenaud qui a été un véritable poison en ralentissant toutes les sorties de balle françaises.

 

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“Putain Jean-Marc t’es chiant ! T’aurais pu faire ton exo correctement, à cause de toi on va tous se taper un contrôle la semaine prochaine”

 

Conclusion

 

On va commencer à être à court de mots et de comparaisons foireuses avec le XV du Chardon pour expliquer une nouvelle fois que cette équipe de France fait plaisir à voir et qu’on peut difficilement lui tomber dessus. Lors de son compte rendu de France – Nouvelle-Zélande, ce grand et brillant homme qu’est Ovale Masqué écrivait : « C’est vrai qu’en 8 mois on a gagné 4 matchs et on en a perdu 6, c’est vrai que les choses ont encore largement le temps d’empirer et que l’on est pas à l’abri d’un véritable drame, comme par exemple la sélection d’Henry Chavancy au centre. Mais en attendant, on va profiter un peu de cette grande nouveauté de l’année 2016 : s’amuser devant les matchs du XV de France ».
Maintenant qu’on a frôlé le drame en question, il n’y a plus qu’à espérer que la nouveauté de 2017 soit de voir la France gagner des matches importants de temps en temps. Parce que c’est un peu casse-couilles de devoir se mater du handball ou Miss Univers pour voir des Bleus gagner un truc. Enfin à la limite Miss Univers il y a du suspense.

 

Crédit photo du câlin Maestri/Mike Brown : Julien Poupard

24h dans les conditions de travail d’un arbitre de Top 14

 

 

07h38 : Le réveil sonne. C’est une journée importante pour vous, comme à peu près toutes les journées depuis que vous avez décidé de créer votre petite entreprise qui compte aujourd’hui une trentaine de salariés. Mais vous ne laissez pas le stress vous envahir. Vous avez bien dormi, vous vous sentez en pleine possession de vos moyens. Vous savez ce que vous avez enduré pour en arriver là : des mois à travailler, à étudier, à vous préparer. Après tout, c’est votre boulot, vous savez ce que vous faites.

 

 

07h40 : Vous arrivez dans la cuisine. Vous jetez une tartine en l’air : elle retombe du côté de la confiture, c’est votre fille qui fera chauffer son bol en premier. Votre fils fait la gueule mais il aura le choix du programme télé ce soir.

 

 

07h56 : Alors que vous commencez à ranger la table, une dispute éclate entre vos deux enfants. Votre fils affirme que la dernière biscotte du paquet était la sienne. Votre fille conteste et estime qu’elle était bien sur ses appuis au moment de s’en saisir. N’ayant pas vu l’action, vous sollicitez votre femme, mieux placée. Elle confirme que la biscotte était bien sortie du paquet et que votre fille n’était pas en position de hors-jeu. Vous la laissez donc manger la dernière biscotte. Votre fils lève les bras en l’air et vous fixe étonné. Vous vous contentez de le regarder d’un air désolé et vous lui dites : “C’est la rèèègle, elle en a le droit !”. Il peste contre vous et contre sa soeur avant de partir furieux dans sa chambre. Bizarrement, c’est sa mère qui a pris la décision mais c’est à vous qu’il en veut.

 

 

08h54 : Vous arrivez au bureau. Vous êtes le patron d’une petite entreprise qui connaît quelques difficultés et une réunion importante a lieu ce matin pour faire un point sur la situation.

 

 

08h56 : La tension est palpable autour de la machine à café. Un employé met une pièce de un euro dans la machine, un café en sort. Il vous prend à partie, en vous expliquant que ça méritait plus. Vous tentez de lui expliquer que vous n’y êtes pour rien, que ce sont les directives du service comptabilité. Il vous rétorque alors qu’en mettant un euro dans la machine de son ancienne entreprise, on avait un café ET une barre chocolatée. Vous lui répondez une nouvelle fois que vous n’y êtes pour rien et qu’on ne va pas demander à la machine de s’adapter à ce que les autres distribuent ou ont distribué à d’autres endroits. Il rétorque que « juste un peu de cohérence ne ferait pas de mal, surtout quand c’est toujours en la défaveur des employés les plus pauvres ». Vous trouvez l’accusation un peu injuste et gratuite mais vous ne dites rien et le laissez partir furieux.

 

 

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Quand vos salariés se moquent de vous parce que vous faites vos voyages d’affaire à Agen, Oyonnax, Castres ou Bourgoin

 

 

09h30 : Début de la réunion qui occupe votre temps et votre esprit depuis quelques temps. La plupart des salariés sont présents dans la salle même si ce sont les représentants du personnel et les directeurs des différentes branches qui seront amenés à s’exprimer. Après avoir présenté le nouveau stagiaire de troisième qui a fictivement lancé la réunion, vous prenez la parole et regardez votre montre. Vous avez deux heures trente, pas plus, la faute à un emploi du temps chargé.

 

 

09h45 : Première altercation. Le porte-parole des ingénieurs reproche aux commerciaux de les empêcher de mener à bien leurs initiatives en leur mettant trop la pression sur les dates de rendu. Vous savez qu’il a raison puisque vous l’avez constaté de manière flagrante récemment et vous demandez donc aux commerciaux de faire attention sur ce point. “DEPUIS LE DÉBUUUUT” hurle un ingénieur au fond de la salle alors qu’il est arrivée dans l’entreprise il y a 10 jours.

 

 

10h16 : À chaque fois qu’un groupe prend la parole, vous entendez au loin les chefs de service de l’équipe opposée qui hurlent depuis le fond de la salle. Les “MAIS PAS DU TOUT !”, “HEIN ? MAIS N’IMPORTE QUOI !” ou autres “JEANG-CHARLEUUUUU, DIS LUI POUR LES PLACES DE PARKING” fusent à tout bout de champ.

 

 

10h34 : Nouvelle altercation, cette fois ce sont les commerciaux qui reprochent aux ingénieurs de ralentir les sorties de produits en pourrissant volontairement les réunions. Vous les soupçonnez d’en rajouter. Faute de preuve évidente et malgré les huées des commerciaux, vous faites signe de continuer la réunion sans s’attarder sur ce point.

 

 

11h14 : Les commerciaux reviennent à la charge en dénonçant un ingénieur pour un comportement déloyal sur un projet déjà au sol. Vous n’aimez pas la délation et vous ne voulez pas donner l’impression de céder à la pression d’une partie de la salle. N’ayant de plus pas une bonne connaissance du sujet, vous sollicitez un de vos adjoints qui a assisté à la scène et a des éléments concrets à disposition pour juger. Vous en discutez quelques instants avec lui à l’écart. Tous les yeux sont fixés sur vous. Il vous recommande de convoquer l’ingénieur impliqué dans votre bureau plus tard dans la semaine. Vous lui faites confiance et, après avoir demandé aux représentants du personnel de calmer leurs équipes, vous annoncez au suspect sa convocation future. Nouveaux grondements, dans le rang des ingénieurs cette fois. Quelques insultes fusent même au fond de la salle, où certains membres des familles des salariés se sont amassés.

 

 

11h38 : Alors qu’un ingénieur revient des toilettes et tente de rejoindre discrètement sa place pour ne pas perturber le cours de la réunion, un commercial lui fait un croche-pied. L’ingénieur tombe lamentablement et le commercial lève les bras pour prouver que son geste était involontaire. Vous ne laissez pas passer ça et vous lui demandez d’aller prendre l’air dix minutes. Protestations des commerciaux qui trouvent ça injuste et des ingénieurs qui réclament une peine plus lourde, ces derniers estimant que ses épaules sont passées sous son bassin au moment de la chute.

 

 

11h45 : C’est la fin de la réunion et l’heure de la pause pour vous. Vous avez l’impression que la plupart des sujets ont été réglés de manière efficace mais vous essuyez tout de même quelques sifflets d’employés en sortant de la salle. Vous allez vous isoler dans un petit restaurant pour manger et récupérer de cette matinée agitée.

 

 

13h34 : Vous recevez une notification push du magazine Challenges titrée «Trois polémiques tirées de la réunion de ce matin, la deuxième va vous surprendre ! » sur votre smartphone. Après avoir fermé trois pubs vous incitant à acheter des Velux, vous parcourez l’article qui n’est plus ou moins qu’une compilation de phrases de vos salariés se plaignant de vos décisions et expliquant que s’il y a une mauvaise ambiance dans l’entreprise, si tous les projets ont trois mois de retard et si le carnet de commande est vide, c’est parce que vous avez refusé de leur donner une semaine de congés supplémentaires.

 

 

14h : Les représentants des commerciaux vous attendent à la sortie du restaurant. Ils prétendent avoir la preuve vidéo que le croche-pied était involontaire et vous hurlent dessus car vous ne leur prêtez pas attention. Vous savez qu’ils espèrent vous influencer pour que vous compensiez d’une manière ou d’une autre et essayez donc de vous convaincre que vous avez pris la bonne décision.

 

 

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Quand un salarié vous montre l’historique de navigation de son collègue pour que vous lui donniez une promotion à sa place

 

 

 

14h16 : Les familles et amis des commerciaux (toujours dans les locaux) sifflent l’ingénieur qui s’est écroulé en pleine salle de réunion un peu plus tôt dès qu’il se lève de son bureau.

 

 

14h47 : Un ingénieur vient vous voir pour négocier une augmentation. Vous refusez. Quand il claque la porte de votre bureau, vous pouvez entendre sa famille et ses amis chanter « PATRON, PATRON, ON T’ENCULE ! ».

 

 

15h30 : Vous recevez un colis anonyme. Vous l’ouvrez, il s’agit d’un exemplaire du livre « Devenir patron pour les Nuls ».

 

 

15h45 : Vous recevez un mail d’une adresse que vous ne connaissez pas avec pour sujet : PIPASSE. À l’intérieur vous trouvez un lien qui renvoie vers une proposition de formation au management.

 

 

16h : Vous allez faire un tour sur les réseaux sociaux. Vous tombez sur un tweet qui se moque de votre look et votre « costume Célio ». Un autre internaute s’interroge sur votre passé en école d’ingénieur et se demande si vous ne feriez pas partie d’un complot visant les commerciaux. Enfin, un dernier estime que le patronat en France n’est pas au niveau, ce qui est un comble alors qu’on a les meilleurs employés du monde.

 

 

17h : Vous faites un débrief de la réunion du matin en présence de vos actionnaires. Ils vous montrent la vidéo de votre performance et soulignent tous les moments où ils estiment que vous auriez pu être meilleur. Les passages où vous bafouillez, où vous cherchez vos mots, où vous donnez un mauvais chiffre et où vous passez à côté d’une erreur d’un de vos salariés. L’exercice est rude pour la confiance en soi mais vous savez que s’y confronter est le meilleur moyen de progresser. Vous avez une note à la fin et plus votre note est mauvaise, plus le travail que vous aurez à faire la semaine suivante sera chiant et ennuyeux. Vous priez pour ne pas avoir à signer des chèques et cacheter des enveloppes toute la semaine prochaine.

 

 

 

La fameuse réunion du vendredi soir

 

 

18h35 : Sur le chemin du retour, vous êtes coincé dans les bouchons et allumez la radio pour vous changer les idées. Vous tombez sur une des premières radios du pays qui fait un débat sur votre réunion du matin. L’un des représentants des commerciaux témoigne. Il remet en cause votre intégrité et certaines de vos décisions. Un autre tente d’expliquer que “c’est quand même vous le patron et que par définition, on devrait respecter vos décisions” mais il est coupé par l’animateur, lui même ancien ingénieur. “Est-ce qu’il a déjà été ingénieur ? Est-ce qu’il a déjà conçu quoi de que ce soit ? Parce que moi, oui, et je peux vous le dire, c’est un patron incompétent !”.

 

 

18h46 : Nouvelle fréquence, cette fois avec un débat plus général sur le rôle des patrons au quotidien. L’un des intervenants leur reproche de profiter de leur pouvoir pour jouer aux cow-boys et pénaliser tout le monde dès qu’ils le peuvent, alors que s’ils prenaient un peu plus leur temps pour analyser les situations et les éléments, ils seraient beaucoup moins insultés. Un autre s’indigne et déclare que c’est l’inverse le problème : les patrons qui n’osent plus prendre leur responsabilité et mettent des jours à prendre des décisions parce qu’ils attendent l’avis de tous les adjoints ou conseillers.

 

 

18h54 : Vous changez de fréquence à la recherche d’un peu de musique pour adoucir l’ambiance. Vous tombez successivement sur Tomber la Chemise, Life is Life, puis Legend Racing Metro 92. Vous vous apprêtez à abandonner quand vous tombez sur du AC/DC. Soulagé, vous laissez donc cette fréquence. Mais mauvaise surprise, à la fin de la chanson débute une émission dont le sommaire se résume en un point : prouver que vous êtes une pipasse. “Pour fusionner des cellules sur Excel il y a du monde, mais là j’ai l’impression que ce soir c’est moi qui me suis fait fusionner !” lance l’invité.

 

 

19h : Fatigué par votre journée, vous rentrez chez vous et attrapez une bière. À peine le temps de l’ouvrir qu’on sonne à votre porte. Un policier vous informe que votre fils est décédé. Sous le choc, vous ne comprenez pas toutes ses explications si ce n’est que c’est dû à un problème de carence et qu’une biscotte en plus l’aurait probablement sauvé. “Comme le veut la règle de la carence continue-t-il, nous devons aussi prendre votre fille”. Sous le choc, vous n’assimilez pas la demande et ne vous rappelez pas du tout de cette règle. Vous vous tournez donc hébété vers votre femme. Elle s’oppose au départ de votre dernier enfant et rétorque que la règle ne dit pas ça. Moment de confusion sur le palier de votre porte, votre fille ne sachant pas si elle doit suivre la police ou retourner dans sa chambre. Elle finit finalement par quitter la maison, la scène ubuesque se terminant sous les hués des voisins qui sifflent les policiers (parce que personne n’aime les policiers), vous et votre femme (parce qu’ils vous voient comme un monstre sans coeur) et votre fille (parce qu’elle est bonne).

 

 

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Quand t’as passé un accord avec une partie de tes salariés au détriment des autres en échange d’un vélo d’appartement dans ton bureau

 

 

19h35 : Sur BFM Business, un débat de 45 minutes est organisé pour revenir sur votre réunion du matin. Les déclarations des salariés qui vous allument tournent en boucle. Un consultant prend tout de même votre défense, rappelant qu’on peut vous reprocher beaucoup de choses, mais sûrement pas d’être malhonnête. « Il n’y a pas de décisions faciles et l’erreur est humaine. C’est un peu facile de s’en prendre à lui, surtout que ça encourage l’ensemble des parties prenantes à systématiquement remettre en cause ses décisions et donc créer une cercle vicieux particulièrement toxique pour l’atmosphère et les conditions de travail de tout le monde ». Vous souriez en voyant un autre consultant – accessoirement ancien salarié dans une entreprise telle que la vôtre et célèbre pour son look plus que pour ses performances – en face de lui, un peu gêné. Probablement car quelques mois plus tôt il s’en prenait violemment aux patrons en leur reprochant d’être nuls et peu professionnels.

 

 

20h45 : Vous dégustez votre boîte de conserve. Hé oui, vous avez beau être patron, votre entreprise est jeune et pour l’instant, vous vous payez le SMIC.

 

 

22h50 : Fin du film du soir, une belle histoire où un jeune que tout destinait à devenir patron réussit finalement à se surpasser pour devenir ingénieur, s’évitant ainsi une vie chiante à mourir et illustrant parfaitement l’idée reçue de toute une partie de la société : “un patron c’est un salarié qui a raté sa vie et qui se venge comme il peut”.

 

 

23h15 : Vous tentez de trouver un peu de réconfort auprès de votre femme mais cette dernière vous reproche d’introduire de travers. Elle vous envoie à 10 mètres et s’endort. Seul, au bord du lit, vous vous demandez pourquoi vous vous faites chier à vous lever tous les matins pour être confronté à des cons pareils.

 

 

Si vous aussi vous êtes patrons et que vous avez la réponse, donnez-la nous en commentaires, ça nous intéresse.