Présentation Coupe du monde 2023 : Les Fidji
par La Boucherie

  • 19 August 2023
  • 3

Par Maubec.

 

Tout au long de l’été, la Boucherie Ovalie vous présente en détails les 20 équipes qualifiées pour la Coupe du monde 2023. Basé sur le modèle de ce qui avait été publié dans le livre La Découpe du monde du rugby en 2019, ces fiches pays vous offriront un cocktail de ce que nous savons faire de mieux depuis désormais plus de 10 ans : un savant mélange d’analyses pointues, d’informations approximatives et de blagues douteuses.

 

Fiches déjà publiées :

Le Chili

Le Portugal

La Roumanie

La Namibie

Les Samoa 

L’Écosse

La Géorgie

Le Tonga

L’Uruguay

 

Les Fidji

Notation :

French Fijian Flair : + + + +
Vita Coco : + +
Retour de vacances : – – – –

 

L’emblème :

Ces grands enfants indolents, fantasques athlètes à la morphologie de mutants naturellement doués pour un jeu de rugby imprévisible, et qui ont ce sport (qu’ils pratiquent pieds nus sur la plage dès leur naissance) dans le sang, ont naturellement choisi le plus cliché des symboles possibles pour les représenter : un cocotier.
Nous sommes donc en présence d’une équipe qui possède plus de second degré que 90% des utilisateurs de Twitter (les 10% restants ayant déjà précommandé le 3e tome de la Boucherie Ovalie qui sortira le 23 août).

 

 

L’équipe :

En rugby, les Fidji, ce sont un peu les grands frères des îles du Pacifique : ce sont eux qui partirent en tournée à travers le Pacifique en 1924 pour faire jouer leur premier match aux Samoa et aux Tonga afin de leur montrer comment se massacrer entre soi de façon civilisée. C’est-à-dire avec un ballon.
 
Il faut dire qu’eux avaient mis en place un championnat local depuis 30 ans et pratiquaient déjà depuis plusieurs siècles la bagarre, les guerres tribales, intestines, religieuses, racistes et civiles tout comme le cannibalisme. Il faut d’ailleurs noter que si le reste est toujours d’actualité sur place, le cannibalisme, lui, a cessé à mesure que le rugby se développait. L’hypothèse la plus probable est que les Fidjiens mangeaient à chaque rencontre la moitié de l’équipe vaincue. Pas fous, ils choisissaient plutôt les avants bien dodus que les demis rachitiques ou les trois quarts tout secs. C’est ce qui expliquerait pourquoi ils ont rapidement excellé avec 7 joueurs sur le terrain et eu autant de mal avec le jeu d’avants.

 

Qui a commandé un rôti pour douze ?

 

Les Fidji ont ainsi longtemps été les meilleurs représentants des îles du Pacifique et, en 1987 ils se qualifient logiquement pour les quarts de finale de la première Coupe du monde devant les Argentins et les Italiens. Le staff, les joueurs et les journalistes français découvrent alors le style de jeu de ces joueurs aux noms imprononçables dont ils ignoraient l’existence même la veille de leur affrontement avec le XV de France. Un vrai vent de fraicheur qui ne pourrait absolument plus arriver aujourd’hui avec le professionnalisme puisque la plupart des joueurs évoluent en Europe et que les staffs passent leurs journées à regarder les vidéos des matchs de leurs adversaires. Heureusement il nous reste les journalistes pour conserver ce petit côté amateur du rugby d’antan.
 
Surpris par la vitesse et les passes acrobatiques des joueurs du Pacifique, les Bleus en sont réduits à jouer comme des Anglais pour éviter la défaite. Heureusement pour eux, les blancs et noirs sont déjà aussi imprévisibles que les décrivent quatre génération de commentateurs sportifs depuis, et sont donc autant capables de slalomer dans la défense française que de perdre le ballon en allant marquer. Christophe Dominici était le premier fidjien blanc, bien avant Teddy Thomas.
Les Fidjiens semblent alors en cette fin des années 80 être en mesure de devenir une place forte sur laquelle il va falloir compter, au même titre que les Roumains, s’ils apprennent à tenir le ballon à deux mains.
 

Severo Korodudua, le mala drua.

 
Mais comme tous les grands frères qui ont longtemps méprisé et martyrisé leurs cadets, arrive l’heure où ces derniers grandissent et leur mettent des peignées à leur tour. Et ça commence par une peignée samoane (qui laisse généralement des traces).
 
Les Fidji rentrent ainsi dans le rang en 1991 finissant derniers de poule, battus par le Canada et la Roumanie et ce sont les Samoa (occidentales) qui prennent alors toute la gloire et la lumière en se qualifiant en quarts.
Quatre ans plus tard, c’est au tour du petit dernier, les Tonga, de se rebeller et de priver les Fidjiens de la Coupe du monde 1995.
 
Conscient que l’augmentation en intensité des matchs de qualifications entre les trois nations du Pacifique pourrait avoir des conséquences désastreuses sur l’activité sismique terrestre, l’IRB décide alors de passer une Coupe du monde à 20 participants, en prenant bien soin à ce que ces trois équipes soient systématiquement qualifiées. Ce qui a engendré quelques chefs d’œuvre de la schématique.

 

Sa place est dans un musée !

 
En 1999 et 2003, plus que l’équipe, ce sont des individualités qui se révèlent. On peut notamment citer Caucaunibuca lors de l’édition australienne. L’ailier marquera d’ailleurs autant les esprits que la mâchoire d’Olivier Magne.
En 2007, les Fidjiens réitèrent leur performance de 1987 mais cette fois en s’imposant dans un match fou contre le pays de Galles. Ils font même trembler l’Afrique du Sud à 14 contre 15 avec des joueurs d’Orléans, de Tarbes, Toulon ou Poitiers.
Mais de nouveau en 2011, ce sont les voisins tongiens qui brillent même s’ils n’arrivent pas à se qualifier en quarts. Et le pire arrive en 2019 quand les Flying Fijians s’inclinent dans le Cannibalico face aux héritiers du Fuerza Aérea Uruguaya 571.
 
Néanmoins la révolution fidjienne est en marche après trois coups d’état et deux putschs. Et pour le rugby, elle passe d‘abord par la mise en faillite des centres de formation briviste et clermontois. La fédération fidjienne décide en effet de créer en 2017 une équipe pour conserver ses meilleurs jeunes joueurs plutôt que de les voir contraints de partir survivre dans le Massif Central : ce sera les Fijian Drua. Malheureusement pour ces jeunes joueurs, c’est une destination tout aussi inhospitalière et hostile qui les attend avec l’intégration de cette franchise dans le premier championnat national australien tout juste créé. Dès la deuxième année, les Drua remportent le titre, et une fois les frontières rouvertes et la relocalisation des Sud-Africains en Europe, ils intègrent le Super Rugby Pacific en tant que 6e franchise australienne. Et on peut se dire qu’à ce niveau de foutage de gueule niveau géographie, autant accepter de faire jouer une équipe catalane en championnat de France.
 
Pendant ce temps, l’équipe nationale commence seulement à bénéficier de cet apport de sang frais. Avant ça, les Fidjiens avaient bien battu la France en 2018 mais c’était celle de Jacques Brunel et il faut se rappeler qu’une semaine avant, elle prenait 50 pions contre l’Écosse. Se satisfaire d’une telle victoire, c’était donc un peu comme célébrer un titre acquis contre Toulon sans Halfpenny.
Mais là, les Fidjiens viennent de remporter le Pacific Nations Cup, la compétition des hipsters Twitter, en écrasant le Japon, les Tonga et les Samoa. Vu les performances affichées par les Gallois et les Australiens, se qualifier à nouveau en quart de finale semble à portée des Fidjiens. L’espoir est parfois le pire ennemi du rugbyman et les supporters montferrandais pourront vous en parler des heures. Mais bonne nouvelle pour les Fidjiens : Vern Cotter a quitté son poste d’entraineur de l’équipe nationale en début d’année.
 

Le joueur à suivre

Alors que depuis 2015, les Fidjiens étaient résignés à aligner Ben Volavola, le joueur du Racing 92, à l’ouverture, Raiwalui aurait pu créer le buzz en écartant son titulaire si Eddie Jones n’avait pas décidé de lui voler la vedette en se privant de Quade Cooper, son seul ouvreur utilisé depuis 2 ans lorsqu’il a pris la tête de l’Australie.
 
C’est donc Caleb Muntz, le jeune et relativement inexpérimenté ouvreur de Fijian Drua (23 ans et 3 sélections avant ce France-Fidji estival) qui sera le titulaire en 10, après une excellente saison en Super Rugby et trois matchs de Pacific Nations Cup très aboutis.
 
À noter que le jeune 10 est né en Nouvelle Zélande comme Nicky Little, le taulier du poste de 1996 à 2011 et recordman des points en sélection. On lui souhaitera juste de ne pas se blesser lors de la victoire héroïque contre le pays de Galles comme son modèle afin de pouvoir jouer le quart de finale sinon c’est Teti Tela qui devra prendre le relais. C’est à dire un joueur de 32 ans qui ne comptait que quelques matchs professionnels en NRC et en division del honor espagnole il y a encore deux ans. Tout espoir n’est donc pas perdu pour voir Sébastien Fauqué en équipe de France. Mais on y perdra clairement en qualité de mèche rebelle savamment décoiffée.

 

 

Le saviez-vous :

L’ancien pilier international Sitiveni Rabuka a réalisé deux putchs militaires successifs en 1987 pour « rendre les Fidji aux Fidjiens », et a été démocratiquement élu Premier ministre fin 2022, renversant ainsi Frank Bainimarama qui était en poste depuis son propre coup d’état en 2006 (qui faisait suite à un contre-coup d’état en 2000). Mais cette fois, Rabuka est allié avec ses ennemis de 1987 autour d’un programme d’unité nationale (mais avec l’ambition de revenir sur la laïcité et la citoyenneté des indo-fidjiens quand même, parce qu’il ne faut pas oublier les fondamentaux).
 
Au fond, rien que du très banal pour qui suit un peu l’historique des élections de la FFR. Mais on ne le dira jamais : méfiez-vous toujours quand un ex-rugbyman se lance en politique. Surtout les anciens Toulousains.
 

#Chalureau2027, ce ne sera pas forcément pour demander de le sélectionner en Coupe du Monde

 

Calendrier :

– vs le pays de Galles, le dimanche 10 septembre à Bordeaux (21h)
– vs l’Australie, le vendredi 17 septembre à Saint-Étienne (17h45)
– vs la Géorgie, le jeudi 30 septembre à Bordeaux (17h45)
– vs l’Angleterre, le samedi 8 octobre à Toulouse (21h)

 

Le scénario idéal :

Les Fidjiens débutent leur Coupe du monde par un succès facile contre une équipe galloise composée à 50% de joueurs amateurs, la fédération galloise n’ayant plus de quoi payer 30 joueurs pros. Ils enchainent par une victoire probante contre les Australiens : Eddie Jones blâmant plutôt la presse et les Anglais pour le résultat que son idée de reconversion de Skelton au poste de demi de mêlée. Finalement le match contre la Géorgie sera le plus compliqué mais les Fidji finissent facilement premiers de leur groupe.
 
Au moment de devoir payer les hébergements des équipes à la fin de la phase de poules, la nouvelle présidence de la FFR découvre qu’un certain Bernardo Atchero basé au Panama a détourné 50% du budget de la Coupe du monde et que la Ministre des sports en a réquisitionné 30% pour financer le déficit des JO 2024. La phase finale est alors transformée en tournoi de rugby à 7 pour tenir sur un seul week-end. World Rugby donne alors directement le trophée aux Fidji avant même de jouer les matchs afin de laisser les officiels profiter du week-end pour aller faire du shopping à Paris avec leurs maitresses.

 

Le scénario catastrophe :

Un contre-contre-coup d’état en réponse au putsch suite à l’élection de Rabuka replace Vern Cotter en tant que sélectionneur national. Après une victoire probante face au pays de Galles et une défaite encourageante avec bonus contre l’Australie, les Fidji sont favoris pour l’emporter face à la Géorgie et se qualifier en quart de finale. Tout le peuple blanc et noir y croit et pousse derrière son équipe qui mène jusqu’à la 77e minute et un essai de Raditze Samochvili.