Forever Strong – La critique
par Marcel Caumixe

  • 22 May 2012
  • 42

Par Marcel Caumixe,

Festival de Cannes oblige, continuons notre tour d’horizon du cinéma ovale avec aujourd’hui un chef d’oeuvre méconnu de Hollywood :

Forever strong
(inspiré de faits réels comme tous les films américains sauf Invictus.)

Rick Penning joue ailier dans l’équipe du lycée de Flagstaff, Arizona, “les Razorbacks” (rien à voir avec une épilation du dos de Mamuka Gorgodze). C’est un petit connard prétentieux, bellâtre, frimeur, branleur, et n’a pas l’air d’avoir entendu parler des Valeurs du Rugby ®. Une sorte de Sonny Bill en plus con. Il est en plus le fils du coach qui, bien sûr, est tyrannique. c’est au bout de la 3ème minute qu’on voit venir gros comme un départ au ras de Burgess que ledit père, (1er acteur à peu près connu) a dû voir sa carrière brisée et vit par procuration à travers son fils.

Mon papa à moiiii... C'est Vern Coootteeer...
Mon papa à moiiii… C’est Vern Coootteeer…

Et donc tout commence avec un match des Razorbacks contre l’équipe des Highlands. Les Razorbacks sont à la peine, Rick s’énerve et colle un plaquage un peu haut à son adversaire. On s’invective un peu et soudain, Rick envoie un beau glaviot à la façe du n°4 adverse… Qui lèche le mollard avec un air de défi, à la stupeur de tout le monde y compris du spectateur. Bien sûr l’arbitre sort le rouge. Les Highlands finissent par gagner au grand désarroi de l’équipe hôte. Les Highlands jouent en noir, font un Haka à la fin du match, et vu que leur coach, 2ème acteur à peu près connu du film, a un mot sympa pour les vaincus, on se doute qu’on va vite revoir tout ce petit monde dans le rôle des gentils.

Rick-le-petit-con et ses “gosses-de-riches” de coéquipiers célèbrent quand même la fin de la saison par une troisième mi-temps arrosée, dans la pistoche familiale et les bimbos locales. Et bien sûr il prend le volant de sa décapotable tout bourré, valdingue dans le décor et empale sa copine sur les barbelés du pâturage avoisinant.

Car l’alcool c’est mal.

“C’est quoi ça, connard ?
– C’est du rugby, mec !”

Film américain oblige, petit passage par le tribunal pour rappeler que l’alcool et l’empalage des copines c’est mal, et envoyer notre jeune imbécile en centre de détention pour délinquants juvéniles.

Le centre, dirigé d’une main de gauchiste par Sam Gamgee du Seigneur des Anneaux (3ème acteur connu) s’avère être une véritable torture. A chaque incartade, il doit nettoyer des toilettes déjà propres. Mais le dirlo, ancien des highlands (le monde est petit) décide de lui donner une chance. Car le dirlo, avec ses méthodes de laxiste socialo a lui-même été pensionnaire dudit centre, et sauvé de la délinquance PAR LE COACH DES HIGHLANDS, et par extension PAR LES VALEURS DU RUGBY ® !!! Ca par exemple…

L’envers du décor des Highland, c’est le paradis des valeurs du rugby. Des bisounours avec un maillot noir, des jeunes gens qui n’ont pas de vices, et font du jardinage gratos et des visites d’enfants malades pour l’hosto du coin. Un club de rugby où les anciens font une petite enveloppe aux nouveaux pour leur dire à quel point la fraternité c’est bien. Seule une maitrise totale de mon corps m’a évité de vomir à ce point du film.

Bien sûr, l’intégration ne se fait pas sans heurts : le coach Gelwix (c’est son nom), avec la clairvoyance d’un Nick Mallett replaçant Bergamasco en 9, positionne notre jeune ailier au poste de talonneur, au détriment de la victoire. La vertu éducative de la brrrrrranlée n’est pas immédiatement ressentie, et Rick prend de la drogue que ses amis dégénérés sont parvenus à lui en faire passer en douce. (la drogue aussi c’est mal).

Arrive l’heure du match contre l’Ecosse. Oui, l’Ecosse. Et c’est lors du Haka que Rick sent finalement poindre en lui la sensation de fraternité des Valeurs du Rugby ®. Finalement, le talon lui convient mieux que ce poste de bon à rien d’ailier, et notre pauvre équipe provinciale américaine défonce une sélection nationale écossaise, ce qui au fond reste quand même assez crédible, même si Dan Parks ne jouait pas.

 

“Le foot Américain, c’est pour les bébés,
le football pour les mauviettes,
et le rugby pour les hommes.”

 

Au retour de ce match, l’équipe s’arrête pour changer la roue crevée d’une mère de famille célibataire (Valeurs du Rugby ®, petite remontée gastrique), et paf, l’autre ailier se fait faucher par une bagnole. Il en meurt, le bougre. Tout le monde est triste même Rick, qui commence de plus en plus à ressentir le fluide fraternel qui unit l’équipe. Et là, retournement majeur, au détour d’un couloir :

il découvre sur une vieille photo d’équipe SON PERE !!! SON PERE JOUAIT POUR LES HIGHLANDS DANS SA JEUNESSE !!! ARGH !!!

Je vous laisse un moment pour digérer cette révélation. Je souligne en outre que j’ai décidé de vous faire grâce des Hakas multiples, prières aux ancêtres, et nombreuses citations mystico-maories qui émaillent chaque moment d’émotion du film. Oh et puis non, finalement je vous en mets une compilation :

S’ensuit un autre moment clé. Celui où le Coach Gelwix donne le capitanat à Rick, ce qui a pour but de transformer Rick-le-petit-con en Rick-le-bisounours. Pour ceux qui n’auraient pas encore compris, le nouveau coach est bien sûr devenu le père de substitution sympa, juste et compréhensif que Rick aurait toujours voulu avoir. Le rugby, ce sport pour personnes traumatisées par des figures paternelles névrosées (cf. Le Fils à Jo).

Et c’est juste à ce moment là que le papa méchant revient (on apprendra bien sûr qu’il blâme Gelwix pour avoir brisé sa carrière), et ramène son fils à la maison, avec pour but ultime d’apprendre les tactiques des Highland. Retour à l’entrainement donc (en n’oubliant pas sur le chemin d’aller réparer la cloture que lui et sa copine empâlée ont pétée l’année d’avant – Valeurs du Rugby ®). Evidemment les copains dégénérés goûtent fort peu les nouvelles Valeurs du Rugby ® de Rick, et planquent bière et alcool dans sa bagnole. Chez toi c’est une aubaine, en Amérique, c’est la prison. On croit 3,5 secondes que c’est la fin mais le pot aux roses est découvert, le papa abusif fait amende honorable, et Rick peut aller jouer je ne sais quelle compétition, la remporter contre son ancienne équipe de vilains qui a carrément mis un contrat sur sa tête, tout en regagnant le respect paternel.

Une cathédrale à faire pâlir Vincent Clerc
Une cathédrale à faire pâlir Vincent Clerc

Ah oui, au fait, il a quitté l’empalée alcoolique du début pour la cucul gnagnan du lycée, mais on s’en fout.

Conclusion

On a certes affaire à une production de petite envergure qui essaie de bien faire, mais n’y allons pas par quatre chemins, et citons Dominique Besnehard dans La Cité De La Peur : Ce film est une merde. Ne l’achetez pas, ce serait du gaspillage d’argent. Ne le téléchargez pas ce serait du gaspillage de bande passante. Ne le regardez pas, ce serait du gaspillage de rétine. Nous avons un édifiant objet de ciné américain dans ce qu’il a de pire : calibré au possible, plein de bons sentiments, et prévisible à souhait. Les scènes de Rugby sont certes vaguement sympas, mais baignent tellement dans une guimauve rose et sirupeuse qu’on croirait un rêve érotique de Max Guazzini. On est dans le telefilm de dimanche après midi. A côté de ça, le Fils à Jo, c’est du Ken Loach.

Pour résumer, au Boucher-o-mètre :

L’histoire :

Inspiré de l’histoire vraie de ce bonhomme, ce film ressemble à s’y méprendre à un spot de pub pour les mormons. Malgré un ratio impressionnant de  404 victoires pour 10 défaites pendant les 35 années où il a officié, on ne peut que frissonner à l’idée que l’église des saints du dernier jours s’empare du rugby en le rendant aussi fun que leur autre passion : parcourir le monde pour scanner les registres de naissances dans le but de faire un arbre généalogique à l’échelle de l’humanité.

Le rugby :

Plutôt bien fait mais pas révolutionnaire non plus. On ne vibre pas vraiment devant des démonstrations de flair.

La boucherie :

Un ou deux plaquages costauds (surtout mis en valeur par les bruitages), une cathédrale remarquable, un type qui s’arrête un saignement avec la pelouse, mais assez peu de sang finalement. Mention spéciale au soigneur qui retire la dent d’un type du front d’un autre. On espérait un peu plus de violence gratuite pour rendre le sport spectaculaire à des yeux américains.

L’intérêt global

Assez faible parce que trop cucul la praline et bien pensant. Pour le vice, la murge, et la digue du cul, on repassera. Vaut vaguement le coup en tant que curiosité.

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