[Compte-rendu] Pays de Galles – Angleterre : match de préparation
par La Boucherie

  • 09 August 2023
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Par Jauzion aux Pommes

 

Le contexte :

 
La tenante du Grand Chelem, contre sa Dauphine qui en a glané deux autres sur les dernières années : cette affiche a des airs de finale européenne. Un mois avant la Coupe du monde, c’est l’occasion de voir où en sont ces deux équipes et de juger leur potentiel d’aller le plus loin possible et qui sait, ramener un deuxième trophée sur le vieux continent ? Car honnêtement, il ne faut pas trop compter sur la France pour ça…
 
Voilà ce qui aurait pu être une bonne mise en contexte si ce match avait eu lieu avant l’édition 2019.

 
Sauf qu’on est déjà en 2023 et si ces nations avaient fière allure il y a quelques années, elles n’abordent pas cette compétition avec énormément de certitudes puisque l’Angleterre ne cumule que 5 victoires sur ses 14 matchs de 2022 & 2023, dont 1 fois contre le Japon, 2 fois contre l’Italie, et 2 fois contre… le pays de Galles, équipe qui enchaîne deux 5ème places au Tournoi, avec même l’exploit de perdre contre l’Italie.
 

Ajoutez à ça une crise dans les clubs / la fédération, le XV du Poireau ayant presque débuté une grève tel un hommage à sa tunique rouge, et deux sélectionneurs limogés fin 2022 pour mauvais résultats, ça vous dresse le tableau : poussiéreux, aux couleurs ternes, on se dit que ça a pu être un chef d’œuvre par le passé mais que ça ne fait plus rêver grand monde. D’autant qu’elles sont dans les poules dites “ouvertes”, où les habituels bons sont susceptibles d’être un peu nuls et vice-versa.
 

Mais puisque tout change très vite dans le rugby, ce combat d’infirmes des “nations majeures” va permettre de voir ce que ces équipes ont dans le ventre.

 

Les compos :

 
Le pays de Galles n’aligne pas son XV type, pour tester des jeunes joueurs et aussi peut-être parce que les joueurs de d’habitude ont pris celle de perdre ces derniers temps. Pas de cinquième Coupe du monde pour Alun Wyn-Jones, enfin à la retraite internationale sous la pression du mouvement social français. Il reste quelques vétérans comme Leigh Halfpenny, Georges North, Gareth Davies ou des joueurs qu’on connaît moins puisqu’ils jouent devant.
 
L’Angleterre est aussi dans l’expérimentation par rapport aux Tournois, mêlant des habituels titulaires, des novices et des revenants avec mention spéciale pour Danny Care : 36 ans, 87 sélections dont… une seule en Coupe du monde (2015) : la persévérance incarnée. Concernant le débat à l’ouverture, sur ce match, ce sera Marcus Smith sur le gazon et Owen Farrell en tribune. Je n’ai rien à dire sur ce choix rugbystiquement parlant, mais au moins on verra moins sa gueule d’Anglais et c’est déjà ça de pris.

 

Le match :

Le début du match est plutôt engagé, les joueurs sont individuellement impliqués dans ce qu’ils font, au risque de ne pas trop regarder s’il y a quelqu’un sur leur chemin, ce qui donne un peu l’occasion de rigoler à défaut d’assister à du rugby de qualité.

 


Dombrandt est encombrant au sol

 

“Poussez-vous, excusez-moi, poussez-vous excusez-moi, poussez-moi excusez-vous…”

 

Rapidement, les rosbeefs arrivent à faire une offensive dans les 22 mètres gallois avant de perdre le ballon. S’ensuivra une mêlée qui sera rejouée deux fois avant que le jeu ne reprenne.

Ce début brouillon annonce à peu près la couleur de cette première mi-temps où se succèdent des attaques anglaises sans succès, des chandelles démultipliées, des en-avants déprimants menant à de fastidieuses mêlées écroulées et un rythme global qui nous fera vérifier si le match n’est pas réglé en vitesse x0.75.
 
Le XV de la Rose arrive quand même à concrétiser ses offensives par une puis deux pénalités, qui reflètent la légère domination au milieu d’un début de match cafouillé. Pour compenser, les joueurs nous offrent quand même quelques situations souriantes, comme cette passe au pied millimétrée (pour l’arbitre de touche). L’on revient à l’avantage pour le pays de Galles et Halfpenny fait honneur à son nom en réduisant l’écart de moitié dans un match qui ne vaut pour l’instant pas un sou (pour les premières lignes qui savent lire et compter, mais pas mélanger les deux : ça veut dire 6-3), puis égalise quelques minutes plus tard suite à un presque-essai-mais-non de Rees-Zammit.

 


“Jouer dans le désordre” mais en moche

 

Les bonhommes blancs sont un peu jaloux de subir les attaques et s’offrent un assaut avorté par cette passe pour sauver la touche qui finira à l’adversaire.

 

Ce sauvetage inespéré permet également d’éclipser l’attention de son plaquage à peine tenté.

 

Après quelques énièmes échanges de jeu au pied, la mi-temps s’achève sur une mêlée écroulée plusieurs fois avant d’être pénalisée en faveur des Anglais qui porteront l’addition à 9-6, un score fidèle à ce premier acte maladroit où alternent des attaques anglaises prometteuses mais auto-sabordées face à une défense galloise plutôt solide qui n’arrive pas à se mettre en position d’échanger les rôles.
 
Le retour des vestiaires annonce une suite du même acabit, avec au menu des chandelles qui ponctuent les enchaînements de petits tas : chaque nouvelle action donne un peu le sentiment d’un nouveau caddie vidé sur le tapis roulant de votre file à la caisse du supermarché. Si vous aimez ce genre de match mais pas les grandes envolées, n’oubliez pas que la Fédérale 3 reprend mi-septembre.

 

C’est comme une chandelle contrée, mais à la réception.

 

Il faudra attendre la 47ème minute pour une attaque fluide qui aille à dame, signée du XV du Poireau. Je vous rassure, elle fait suite à un gain de territoire suite un avantage obtenu sur maul écroulé qui lui même est la continuité d’une pénaltouche obtenue sur mêlée écroulée : une belle action OK, mais il ne faut pas être trop poétique non plus.
 
Les deux principales différences avec la première mi-temps sont que l’équipe dominante arrive à fructifier ses attaques et que la domination a changé de camp. Les rouges marquent donc leur deuxième essai et ça commence à se compliquer pour les buveurs de thé.
 

 

Les Anglais ont tellement tout raté près de la ligne qu’il ne s’attendait clairement pas à ce que sa tentative de contre réussisse.

 
Le score est désormais de 20 à 9 et restera inchangé malgré une franche occasion galloise qui finit en touche dans les minutes qui suivent, alors qu’on rentre dans l’heure du pognon, ou money-time : le moment charnière où tout peut se jouer et notamment des nouvelles mêlées écroulées dont les Anglais sont friands puisqu’ils font tous les en-avants nécessaires pour les réitérer.
 

Ces actions sont un mélange de miracle et de chaos.

 

Après un peu de volley-ball pour varier du ping-pong, on voit Rees-Zammit manquer de peu d’aplatir un superbe essai, puis en voyant le ralenti on comprend qu’en fait il l’a marqué, puis en écoutant l’arbitre qui a toujours raison on comprend qu’en fait non.
 

Allégorie du match

 


N’oubliez pas de débattre en commentaire du complot arbitral anglo-anglois.

 

 

Le match se terminera sur une dernière offensive anglaise qui terminera par un en-avant à quelques mètres de la ligne et si j’étais journaliste, j’aurais ajouté pour terminer : “comme un symbole”. Mais vu que je ne suis pas journaliste, je vais plutôt dire que ça donne l’impression du mec qui drague toute la soirée en boîte de nuit mais se prend inéluctablement des râteaux à chaque tentative, parce qu’il est bourré et fait n’importe quoi.

 

Conclusion :

Le doute était installé chez ces deux nations majeures, entre chaos structurel, tambouille interne et résultats pourris (ça vous rappelle une époque par chez nous ?).
 
L’Angleterre donne l’impression qu’elle n’a pas vraiment envie de s’appliquer à jouer correctement ni de chercher à faire autre chose que des trucs chiants et on se dit qu’une séance de psy est nécessaire avant le reste. Le problème est qu’on devrait s’en réjouir, mais tel un concert du bad boy Renaud en 2023, le niveau de nos meilleurs ennemis nous inspire surtout de la pitié, au point qu’on en viendrait presque à leur souhaiter d’aller mieux. Le Japon semblant désormais trop naze pour le costume d’outsider, c’est bien les Samoans qui pourraient tirer leur épingle du jeu dans la poule D face à cette équipe faiblarde.
 
Nous avions ce même sentiment charitable pour le pays de Galles, qu’on aimait pourtant voir perdre contre l’Italie car ça économisait notre compassion envers les transalpins. Pour cette habituelle équipe avant-dernière de la classe de l’élite européenne, cette victoire peut offrir le sentiment rassurant d’être en slip plutôt qu’à poil avant de défendre son accès en quart-de-finale (convoité à la fois par des Géorgiens coriaces, des Fidjiens grimpants et des Australiens en galère). Enfin, le XV habituel contenant beaucoup de trentenaires pour qui la compétition a un air de pot de départ vers l’EHPAD, elle pourrait avoir trouvé quelques jeunes sur lesquels appuyer la suite.
 
Au delà d’un plan de jeu chiant, ce match brouillon peut s’expliquer par l’aspect “match de reprise”, il faudra clairement faire mieux au match retour ce samedi, pour exister à la Coupe du Monde, où ça devrait jouer avec vrai rythme et à la vraie vitesse d’un vrai match international.