Le Choc des coffres, épisode 2par Damien Try 19 January 2012 23 La semaine dernière, pour le grand lancement du grand duel pour la place bientôt vacante au centre de l’Equipe de France (la météo annonce des ondées sur le Cotentin, ainsi que d’une blessure imminente en Catalogne), la montagne (je ne parle pas du quotidien clermontois) avait accouché d’une souris, avec très peu de temps de jeu pour les deux opposants. Ce week-end leur aura été plus propice pour exprimer leur talent, avec je l’annonce, malgré les commentaires sarcastiques des lecteurs sur le premier article de la série, l’ouverture du score. Pour les deux camps ! Foison de passes donc, comme nous le verrons dans le détail du match. Mais avant cela, présentons l’image qu’ont les deux protagonistes chez le public. Mathieu Bastareaud a une histoire un peu chaotique avec le public. On le découvre à l’occasion de la tournée d’été 2007, alors qu’il évolue dans le club de Massy, en Fédérale 1. Bernard l’apporte dans son sac à dos en Nouvelle-Zélande, et le fait signer dans la foulée au Stade Français, où il progressera grandement, jusqu’à devenir le bulldozer rose qui fait des malheurs dans les défenses un peu partout en France et ailleurs, tractant sur 20 mètres ligne de ¾ après ligne de ¾. Celui que tout le monde voit comme le prochain Ma’a Nonu réalise alors quelques matchs du Tournoi des 6 Nations, avec une belle première performance contre le Pays de Galles en 2009 (remplaçant Maxime Mermoz, blessé. Tiens tiens…), et l’année suivante avec deux essais contre les Ecossais et le remplacement de tiens tiens Florian Fritz contre l’Italie. Ensuite, il y a l’Affaire. Pas besoin de revenir longtemps sur le Bastareaud-gate, qui a apporté la honte et l’hilarité à toute la France, ainsi que l’interdiction à « l’Inglorious Bastareaud » de fréquenter les Ikéa. Chacun a sa version de l’histoire, avec des détails incluant des joueurs bourrés qui s’échangent des coups, une vidéo de surveillance, des jeunes filles peu farouches, une femme de chambre, des agents de sécurité qui dansent entre eux, une tentative de fuite reprise à l’aéroport JFK et le Carlton de Lille. Mais je confonds peut-être. Toujours est-il que l’image du joueur est sérieusement écornée, et que son mental n’en ressort pas renforcé. Après avoir entretenu un faux suspense, il décide de partir à Toulon, contre l’avis du FACEM-boy Bernard Laporte, ce qui amène à un petit clash boudjelesque avec Laporte. La cerise sur le gâteau est lorsque Laporte rejoint Toulon, pour entrainer Bastareaud qui l’a traité indirectement de menteur. Difficile donc de trouver des bases saines pour s’épanouir dans ces conditions… L’image actuelle de Mathieu Bastareaud est donc celle d’un garçon fragile, pas très bien dans ses pompes, en surpoids, mais possédant un grand potentiel qui n’attend qu’un déclic pour se montrer. Et puis à ceux qui le trouvent gentil garçon, et pas assez boucher, je vous rappelle cependant ceci. Florian Fritz est un peu plus vieux, et a deux fois plus de sélections. Malheureusement pour lui, des blessures aux mauvais moments l’ont souvent fait sortir du groupe France. L’intelligencia rugbystique (c’est-à-dire le Midol et les Spécialistes Rugby Canal+, on n’a que les têtes pensantes que l’on mérite) fait le forcing pour son retour en Equipe de France, mais son comportement extra-sportif semble lui barrer la route toute tracée d’une grande carrière internationale. Cette image de bad boy, de garçon turbulent, sur et en dehors du terrain lui colle à la peau, mais il faut avouer qu’il y travaille toutes les semaines… Mais d’ailleurs, sortir sur un rouge en faisant un bras d’honneur au public, n’est-ce pas ça, l’esprit rugby ? Et puis si cela le dessert niveau sélection, il faut avouer que ça plait à tout le monde d’avoir un joueur qui court tout droit, qui plaque toujours à la limite de la régulière (et parfois de l’autre côté de la limite) et qui respire l’intelligence. Cela en fait donc un des chouchous du public toulousain, j’en veux pour preuve l’ovation qu’il a reçu à son entrée sur le terrain contre Lyon, et les « Florian, Florian » entendus ce week-end alors qu’il semblait en difficulté, ainsi qu’un joueur-phare pour la Boucherie et visiblement adulé par ses lecteurs. J’en tiendrai compte à l’avenir en disant du mal de lui, pour nos amis du forum officiel du Stade Toulousain et par esprit de contradiction. Les matchs de ce week-end : Mathieu Bastareaud a joué l’intégralité du match contre Lyon, ce qui nous a permis : • Premièrement de confirmer qu’il peut jouer 80 minutes • Deuxièmement de voir un peu mieux son état de forme 13 ballons touchés, plus un gagné au grattage (il devait avoir perdu au tirage je suppose). Il a beaucoup avancé avec le ballon, au sein de la défense adverse, et quand celle-ci était insuffisante pour lui apporter un vrai challenge, il a aussi percuté l’arbitre, ce que Mourad a considéré comme une preuve du complot arbitral contre sa personne. Oui je dis « complot » pour ne pas choquer la frange mineure du public de la Boucherie (frange + mineur = le Stagiaire). On notera aussi une belle course balle en main d’une dizaine de mètres après la ligne d’avantage, ignorant un Alexis Palisson plutôt isolé sur son aile, avant de se faire plaquer, de se relever et donc de se faire pénaliser. Seulement 2 placages, mais c’est plutôt le jeu lyonnais qui est à blâmer ici. En revanche, il commet un en-avant sur le renvoi de la seconde mi-temps très bien tapé par Wilkinson qui aurait été très intéressant. Mais le vrai point noir pour lui, c’est son utilisation par le système de jeu toulonnais… Bastareaud sert d’impact au centre du terrain, ou pour le jeu à zéro passe, au près. Mais toutes les combinaisons d’attaque le sautent, ou presque. Au final dans le jeu, c’est un peu un Lionel Nallet, mais qui n’aide pas dans les rucks et ne saute pas en touche. Et avec une coiffure plus moche. Il n’a donc que peu de passes à son compteur. Florian Fritz a lui aussi alterné le bon et le moins bon. Comme Bastareaud, il nous offre une percée sur 15 mètres tout en puissance, cassant 2 plaquages avant de se faire prendre par le troisième, puis de se relever et offrir une pénalité aux Irlandais du Connacht, et son habituelle bouille dépitée quand il fait une faute que même Christian Jeanpierre pourrait siffler. Sa plus belle action est une passe sautée à la 26ème (oui, vous avez bien lu, Florian Fritz a fait une passe sautée, parfaitement réussie qui plus est, et qui a mis en grand danger la défense adverse). Il prend malheureusement une béquille sur cette action, ce qui l’handicapera pendant toute la fin de la première période, avant sa sortie définitive à la mi-temps. On notera qu’il est paradoxal qu’il se blesse sur une passe 5 mètres devant la défense, et pas sur ses courses je-vais-tout-droit-et-si-y-a-quelqu’un-en-face-ben-tant-pis. Sur son dernier quart d’heure, diminué, il servira donc de pivot au centre de l’attaque rouge et noire, offrant un retour intérieur à l’hôpital pour McAllister, qui reculera de 10 mètres sur le plaquage suivant. Seulement donc 40 minutes de jeu pour lui, 5 ballons et 3 plaquages, mais lui aussi ouvre son compteur de passes pour l’année 2012, portant le score à : Bastareaud 3 – 4 Fritz Avantage Fritz donc malgré moins de temps de jeu, mais rien n’est fait ! Le week-end prochain, c’est Gloucester pour l’un, et Petrarca pour l’autre.