Tout ce que vous n’avez jamais voulu savoir sur la règle de l’en-avantpar La Boucherie 21 November 2011 35 Un texte signé Feneb, courageux ecteur qui nous a envoyé sa prose à contributions@boucherie-ovalie.com, Aujourd’hui nous allons parler de l’en-avant… La règle de l’en-avant est une des plus importantes au rugby, au même titre que celle du hors-jeu, du dégagement directement en touche depuis ses 22, du maul que c’est mal de l’écrouler ou encore du ballon qu’on peut aplatir sur la mousse qui protège le poteau que ça compte quand même. Sans la règle de l’en-avant, le rugby ne serait plus vraiment tout à fait le rugby. Donc ce serait un autre sport, la conséquence étant que d’autres Nations telles que le Honduras, le Lesotho, la Papouasie – Nouvelle-Guinée, ou, qui sait, le Danemark auraient pu tirer leur épingle du jeu et remporter plusieurs coupes du monde. Certes, ça semble peu probable, mais avouez que ça fait froid dans le dos. Pourquoi l’en-avant – genèse d’une règle Tout le monde connaît la légende de William Webb Ellis, le créateur du trophée de la coupe du monde qui porte son nom : en 1823, alors qu’il participait avec quelques camarades à une partie de pousse-caillou dans la ville de Rugby, il s’empara soudain du ballon de la main et alla marquer ce qu’on appellera bien plus tard un essai, le premier, donc, de l’Histoire. Ce que l’histoire ne dit pas : William Webb Ellis, le génial inventeur d’internet, a-t-il également inventé la règle de l’en-avant ? Vous n’en savez fichtre rien, pas vrai ? Il est pourtant facile de répondre à cette question : lorsqu’il inventa le rugby en pleine partie de football, WWE ne fit de passe à aucun de ses partenaires avant d’aplatir. Et pour cause : étant le seul à savoir qu’il pratiquait le rugby, personne n’a cherché à le plaquer. Ce fut un essai facile, avouons-le, peut-être même le plus simple à marquer de l’histoire du rugby, à égalité avec celui inscrit par Phillips contre la France en ½ finale au mois d’octobre. N’ayant pas eu à faire de passe, le créateur de la Fondation de Sauvegarde des Pandas ne s’est pas posé la question de savoir s’il pouvait ou non faire une passe vers l’avant. La règle de l’en-avant n’a donc pas été inventée par WWE, elle est ultérieure. CQFD. Mais alors … comment, pourquoi et par quel esprit retors cette règle fut-elle créée ? Les Pères Fondateurs Revenons aux origines … lorsque les Pères Fondateurs voulurent codifier le jeu et en établir les règles, leur première idée fut d’autoriser les passes en avant et de bannir celles en arrière : dans leur grande sagesse, il leur sembla – à juste titre – qu’il serait ainsi bien plus aisé de progresser en se jetant la baballe vers l’avant, et donc de marquer des essais. Erreur ! Monumentale erreur ! Car la règle de l’en-arrière était à peu près incompatible d’une autre règle au moins aussi importante : celle du hors-jeu ! Comment voulez-vous faire une passe vers l’avant à destination d’un joueur situé derrière vous ? La première rencontre officielle fut donc un terrible fiasco, l’arbitre sifflant à tour de bras des hors-jeux et des en-arrières, en veux-tu en voila… Les Pères Fondateurs se réunirent alors à l’issue de la partie et le doyen d’entre eux, Daniel Herrero-Rocher, qui était sage et rusé, prit la parole : « Chers amis, une de ces deux règles est en trop ! Supprimons la règle du hors-jeu ! ». Un de ses acolytes d’outre-Manche rétorqua : « et si nous remplacions la règle de l’en-arrière par une règle dite de l’en-avant ? Ainsi, nous pouvons conserver la règle du hors-jeu… ». On reconnaît bien là l’esprit pervers et vicieux de nos voisins d’Outre-Manche. C’est ainsi que la règle de l’en-avant vit le jour. C’est aussi depuis que les Anglo-Saxons font la pluie et le beau temps sur le rugby, ce qui n’a jamais vraiment changé. Explications fouillées et décryptage de la règle de l’en-avant ; là où il est question de référentiel … Avertissement : Le prochain chapitre fait appel à des notions extrêmement complexes de mécanique relativiste ; il ne peut donc être compris que par 0.0001% de la population mondiale disposant d’un QI supérieur à 140 ou d’un abonnement à Sciences et Vie. Etant désormais entendu qu’il est strictement interdit de passer la balle en avant, la prochaine question qui nous vient à l’esprit est : « en avant, oui, mais de qui ? De quoi ? ». Prenons un exemple : soit un ailier courant le long de la ligne de touche à la vitesse de 20 km / h. Souhaitant remiser vers l’intérieur à destination de son arrière intercalé, il envoie le ballon derrière lui avec une vitesse de 5 km / h par rapport à sa course. En-avant ou pas en-avant ? Le supporter de l’équipe rouge, que nous appellerons Michel pour la clarté de l’exposé, s’écrie, de bonne foi : « il n’y en a pas en-avant ! L’ailier a fait sa passe derrière lui, l’essai est donc valable ! ». Le supporter de l’équipe bleue, que nous appellerons Loïc, rétorque, de bonne foi également : « que nenni ! Vu des tribunes, le ballon va de l’arrière vers l’avant, on le voit bien en suivant la trajectoire de la balle par rapport à la ligne des 22 mètres ! ». S’en suit une engueulade monumentale entre nos deux supporters que seule une paire de pintes après le match permettra de stopper… Alors, que dit la règle ? Le très sérieux site de l’IRB est formel : DÉFINITION: EN-AVANT Il y a en-avant lorsqu’un joueur perd la possession du ballon qui poursuit sa course, lorsqu’un joueur propulse le ballon du bras ou de la main, lorsque le ballon touche la main ou le bras, poursuit sa course et touche le sol ou un autre joueur avant que le joueur d’origine puisse l’attraper. « Poursuivre sa course » signifie rouler vers la ligne de ballon mort de l’équipe adverse. DÉFINITION: PASSE EN AVANT Il y a passe en avant lorsqu’un joueur lance ou passe le ballon en avant. En avant signifie vers la ligne de ballon mort de l’équipe adverse. Ça a le mérite d’être clair : notre supporter bleu a raison, c’est la trajectoire du ballon par rapport au terrain qui compte. Dans le cas présent, le ballon a une vitesse de 20 – 5 = 15 km / h vers l’en-but adverse, donc il y a en-avant ; CQFD ! En résumé : – Michel : tort – Loïc : raison De l’importance du référentiel… Comme disait avec le sens de la formule qu’on lui connaît le regretté Albert Einstein, avant d’occuper le poste de Président de la Fédé de 1968 à 1991 : « Tout est relatif ». Ainsi, la vitesse d’un objet n’est pas absolue, elle dépend toujours d’un référentiel. D’après les sacro-saintes règles de l’IRB, c’est le terrain qui fait office de référentiel. Notre supporter rouge, Michel, se fourvoyait en considérant la vitesse du ballon dans le référentiel de l’ailier faisant la passe. Tout dépend donc du référentiel ! Quelques exemples de référentiels… Le référentiel terrestre C’est le référentiel officiellement reconnu par l’IRB. On l’appelle également : référentiel du terrain. Le référentiel galiléen Galilée est un célèbre demi de mêlée italien, qui revendique l’invention de la passe vrillée. A ses détracteurs qui mettaient en doute sa capacité à faire une telle passe, il répondit sous l’effet de la colère : « E pur si muove ! » (« Et pourtant, elle tourne ! »). Le référentiel de Vincent Clerc Lorsque Jean-Baptiste Poux avance dans le référentiel du terrain, il recule dans le référentiel de Vincent Clerc. C’est cruel, mais c’est ainsi. Le refereetiel de Barnes Inventé le 6 octobre 2007 par un physicien Anglais du nom de Wayne Barnes, il fut dénoncé comme une des plus grosses supercheries scientifiques du XXIème siècle par de nombreux chercheurs néo-zélandais. Depuis Monsieur Barnes s’est exilé aux Etats-Unis où il a entamé une carrière d’acteur et connaît un certain succès en interprétant le rôle d’un propriétaire de centrale nucléaire de la ville de Springfield, dans une série télévisée. Cas particulier d’un joueur se déplaçant à la vitesse de la lumière Un hypothétique rugbyman se déplaçant à la vitesse de la lumière dans le référentiel du terrain ne peut pas faire d’en-avant : si tel était le cas, le ballon irait donc plus vite que la lumière dans ce même référentiel, ce qu’interdit formellement la théorie de la relativité. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Einstein, le gars qui s’est rendu célèbre en tirant la langue pendant le haka. Ainsi, l’équipe comptant parmi ses rangs un joueur aussi rapide que la lumière dispose d’un atout fort appréciable : nonobstant le fait qu’un tel joueur soit difficile à attraper par les défenseurs adverses, ce même joueur peut balancer la balle dans toutes les directions : il ne sera jamais sanctionné. C’est balèze… Certains esprits chafouins objecteront peut-être qu’un rugbyman courant à la vitesse de la lumière n’existe pas. C’est faux et je le prouve. En effet, la théorie de la relativité restreinte prévoit une dilatation du temps lorsqu’un corps se déplace à une vitesse proche de celle de la lumière, phénomène illustré par le paradoxe dit « des jumeaux ». Un jumeau qui effectuerait un voyage en fusée à la vitesse de la lumière serait à son retour plus jeune que son frère resté sur Terre. C’est ainsi que les jumeaux Lièvremont ont aujourd’hui 5 ans d’écart : Marc (43 ans) et Thomas (38 ans). La seule explication plausible est que Thomas, plus véloce, ait galopé à la vitesse d’un photon au galop. Ca vous la coupe, pas vrai ? Quelques en-avants célèbres France – Italie 2004 : En-avant dans l’en but de Christophe (Dominici) Irlande – France 2009 : En-avant de Thierry (Dusautoir) Irlande – France 2009 : En-avant de Thierry (Henry) En-avant de Guingamp (fait de jeu probablement inventé ; si les Bretons jouaient au rugby, cela se saurait) Le calendrier de l’en-Avent, qui fait le bonheur des enfants à l’approche de Noël. Merci à toutes et à tous d’avoir suivi cet exposé jusqu’au bout sans m’interrompre. J’engage celles et ceux qui souhaitent approfondir le sujet de regarder à nouveau France – Tonga 2011, ils trouveront certainement toutes les réponses à leurs questions. Feneb