Mon premier matchpar La Boucherie 19 December 2023 2 Par Jauzion aux pommes. Un match probablement banal pour tout le reste du terrain, dont personne n’entendra parler en dehors, mais moi je l’attendais celui-là. Après une expérience plutôt mitigée dans mon enfance frêle, j’ai fait le pari de reprendre le rugby à 31 ans, dans l’université où je travaille, avec des étudiants (et c’est plus sympa). Alors, mon premier match de rugby “taille adulte” a eu lieu samedi dernier, dans l’élite du vrai rugby authentique de clocher : le folkloisir (je ne suis pas encore sûr de s’il y a une différence entre les deux appellations). On partait d’un objectif de match à domicile à 10h (rendez-vous 9h30) et ça a bifurqué dans les derniers jours sur “On n’a pas pu avoir le terrain, l’adversaire ne vient pas, finalement le match est à 30 kilomètres, rendez-vous à 9h : avec 3 autres équipes, on va essayer de cumuler 30 joueurs en tout”. C’est ainsi qu’on s’est retrouvés pour un match sur un terrain gorgé d’eau de type demi-finale 1995, avec au-dessus de nos têtes, ni soleil, ni ciel, ni nuage : juste un fond gris qui nous envoyait de la pluie froide sur la gueule. J’ai dit à mon coéquipier “Ca, c’est parfait pour mon premier match de rugby”, il m’a répondu “C’est pas du rugby que tu vas jouer là, c’est un autre sport”. Un déblayage propre. Pas les joueurs. Les adversaires-coéquipiers sont arrivés, on a réparti ce petit monde en deux équipes avec des maillots presque pareils et on allait pouvoir commencer avec seulement une bonne demi-heure de retard, après un peu d’échauffement et de concours de ventriglisse dans la boue. Il y avait tout ce que j’avais imaginé : des cheveux blancs, des rides, des ventres bedonnants et aussi des plus jeunes, plus costauds ou plus aiguisés, avec tous les intermédiaires. Et au milieu il y avait moi, qui essayait de peser 65 kilos et qui voulait surtout essayer de jouer. J’ai annoncé : “- C’est mon premier match, je sais faire une passe, je connais les règles, je sais où faut se placer, mais je ne sais pas vraiment jouer non plus quoi – OK, tu joueras ailier”. (Faire le distributeur automatique derrière des petits tas me semblait moins risqué mais il paraît qu’il faut bien savoir jouer pour ça) Aucune mêlée écroulée, c’est pas en Top 14 qu’on verrait ça Ailier, ça voulait aussi dire ailier/arrière puisqu’on était 14 en attendant les retardataires (se lever tôt le samedi matin, c’est pas simple). Pas encore au top en réception de balles, j’ai vite compris comment parer cette lacune pour réceptionner les dégagements : laisser le ballon atterrir, puis ramasser. Effectivement, dans la mare qui servait de terrain, les rebonds capricieux, amortis, ne pouvaient pas aller bien loin. Cette couverture a peut-être été ma principale activité : avec ce temps, les ballons arrivaient rarement à mon aile (de toute façon, je savais assez peu quoi en faire), ni à celle de mon adversaire direct (de toute façon, je ne sais pas bien plaquer). Bonne lecture d’une combinaison, répétée toute la semaine à l’entraînement. Autrement je garde en souvenir quelques coups de pieds rasants en guise de pénaltouches, des mêlées pour ponctuer les ballons tombés, un “rapproche-toi, il nous faut des passes courtes pour les réussir” ou autres régalades propres au très haut niveau. De mon côté je vais essayer de continuer à apprendre à jouer correctement, pour les matchs où ça jouera plus et plus longtemps. A l’issue de ces 2×20 minutes (on n’a pas poussé plus loin et il fallait rendre le terrain), on était sales, on avait froid et le sourire : le rugby, simplement. “- Alors, ce premier match ? – Bah, j’ai pas l’impression d’avoir pu faire grand chose, mais c’était sympa ! – De toute façon, c’était pas un match pour les trois quarts” C’est vrai. Mais c’était quand même mon premier match.