Le Lab’ougnat analyse Saracens – ASM (Beaucoup à 6)
par Pastigo

  • 29 April 2014
  • 9

 

Par Pastigo,

 

Imaginez. La promise est allongée, jambes offertes. Vous retirez tranquillement vos chaussettes quand un vilain clodo déboule, s’entrave, et tombe dedans.

Voilà.

C’était tellement écrit que la finale serait la revanche de l’année passée, un inévitable Toulon-ASM, qu’il fallait bien que l’un des deux se vautre. Si possible lamentablement. A ce jeu c’est l’expérience qui gagne et l’ASM n’avait rien à craindre du pourtant réputé Jacques Delmas.
Rappelez-vous, nous avions quitté l’ASM dans un peplum fantastique, crevant fièrement glaive en main contre la horde springbok (mais crevant quand même, ce qui est aussi glorieux que de mourir dans ses glaires avec la Légion d’Honneur).

Fière de ses racines, l’ASM se refusera aux tragédies hollywoodiennes pour renouer avec le cinéma français en réunissant pour la première fois à l’écran Pierre Richard et Jean Lefebvre. Manquaient juste une musique rigolote et des pets.

Mais je vous vois déjà défendre leur cause et maudire l’arbitrage, pauvres fous que vous êtes. Refusant d’admettre l’effroyable évidence, hurlant à l’unisson d’un seul rot sur Rugbyrama. Vous pourrez le nier, sans doute vous en convaincre, mais rien n’y fera : nous avons été aussi bons qu’un jockey dans une corrida.

Puis-je seulement vous juger ? Moi non plus je ne doutais guère. Déjà parce que ces Saracens sont si laids qu’ils n’oseraient jamais montrer leur vilaine peau lors du plus grand rendez-vous rugbystique de l’année. D’autre part parce qu’il n’était même pas question que je puisse avoir lâché 40 balles dans un t-shirt du club pour assister à un barrage contre le Racing. Non, pour moi comme pour vous l’ASM était l’indétronâble futur vice-champion d’Europe.

Mais il en est un qui savait. Un qui s’y connait, qui comprend. On en voit rarement mais on les reconnaît ceux-là, puisqu’on ne les retrouve ni sur les forums ni sur les plateaux de Canal. Cet homme, c’est Nigel Owens.

Il avait vu poindre le désastre, et ses derniers doutes s’étaient effacés en voyant Aurélien Rougerie donner des conseils de défense aux siens à quelques minutes du coup d’envoi.

Il regardait dans ce stade ces mille drapeaux jaune et bleu s’enorgueillir et se gonfler d’espoirs vains, sans pouvoir se résoudre à abandonner à leur sort ces vilaines moustaches tachetées de gros rouge.

Car Nigel a du cœur. Recueilli par des loups, qui se résolurent vite à l’abandonner car trop faible et pas vraiment comestible, il fut élevé dans une rude campagne valonnée par une vieille mule si sale qu’elle l’immunisa contre toutes les maladies anachroniques propres à nos provinces les plus brivistes.

Si proches des tribunes à quelques dizaines de mètres, il n’en faut pas moins pour qu’il renifle la douce odeur de son enfance de la meute d’Auvergnats qui transpirent du 3 étoiles. Jailli alors à son souvenir sa Mamule, sa vieille ferme, et ces paysans amicaux qui le battaient avec affection.

Les laisser tomber ? Les voir s’effondrer devant la médiocrité de leurs idoles ? Impossible. Il se sacrifiera pour sauver ce peuple, en prenant sur lui la responsabilité de cette catastrophe. Un saint homme, je vous dis. Il finira à cheval place de Jaude. Merci Nigel, tant il est plus supportable d’être trompé par un arbitre que battu par un ancien Biarrot.

Dès le début de la rencontre le puissant XV Clermontois tient à avoir la main-mise sur le ballon. Comme il sait le faire depuis des années, il conserve et impose sa puissance. Et comme il le sait le faire depuis quelques semaines, il n’en fait rien.

La technique est rodée, on fonce plein axe. Plusieurs fois. Après 16 temps de jeu, et compte tenu qu’on a avancé de 3 mètres, on se décide à ouvrir de la façon la plus prévisible qui soit afin de recommencer l’opération un coup à gauche, un coup à droite. L’Anglais tout vilain va donc défendre et gentiment analyser 30 fois la même action, calmement, afin de l’apprendre par cœur et la mettre aux Auvergnats bien profond quand le moment viendra. Là globalement on vient de résumer 75 minutes du match en 3 lignes, venons-en au(x) moment(s) où l’Anglais nous enfonce les 6 doigts de la main.

Visiblement l’ASM a déjà analysé la défense de l’USAP et prépare son match, une analyse si précise qu’elle tend au mimétisme. De sorte que sur leur première action les Anglais marquent tranquilles pépères comme l’UBB dans Grenoble.

Vu sur Internet : 12′: Ca passe! 7-3, Clermont de retour dans le match !

Nigel est en panique, c’est déjà presque évident. Il attend un coup d’éclat auvergnat à siffler sur un coup de genou dans les dents, mais rien ne se passe. C’est alors que Lee Byrne nous fait une Poitrenade de niveau 7 inespérée derrière sa ligne et offre à James l’occasion de maîtriser un ballon en l’air avec les coudes.

Nigel exulte, réclame une vidéo inquisitrice, accorde un essai de pénalité, vire James pendant 10 minutes et appelle le proviseur de l’école pour faire expulser ses gosses. Ca y est, les jaune et gras le détestent, lui, et pas leur équipe. Il a réussi sa mission, il entend au loin la voix douce de Mamule, si fière de son poulain. Lui seul sait qu’il vient de sauver tout un peuple du suicide collectif à coup de bûches, un héros ordinaire en somme.

A 14 contre 15 Clermont fait ce qu’il sait faire de mieux. Y aller tout en force, sur 50 mètres jusqu’à la ligne, pour finir sur une pénalité dégueulasse. Diablement efficace.
Un peu emporté par son devoir, Nigel va refuser un essai à Clermont suite à on ne sait pas trop quoi. La gigne, c’était un réflexe et il s’en mord les doigts.

Les Anglais font à peu près toutes les fautes du monde car ils ont saisi le plan de Nigel, laids comme de futurs contrôleurs des impôts qu’on tabasse à l’école ils en veulent au monde entier (alors que c’est la faute de leurs parents avant tout) et souhaitent voir s’immoler tout le peuple auvergnat comme il se doit. Nigel fait fi de ne rien voir, après tout cela ne fera qu’ajouter à sa totale culpabilité.

Sur sa seconde action du match, l’Anglais plante son 3ème essai. Du genou. Un mélange de French Flair, d’élégance bitteroise et de pudding à la menthe. Si en plus ils ont de la chatte ça risque d’être difficile pour notre ami Nigel.

Fort heureusement la mi-temps approche et l’ASM dispose d’une mêlée devant la ligne adverse. Dans le monde normal, c’est un lancement de jeu. En Topquatorzie, c’est un temps mort. On ne crée rien, on pousse, on pousse, on avance de 4 mètres en 3 minutes et on rentre au vestiaire sur un en-avant, une tradition.

Clermont revient avec des intentions. En langage d’expert ça veut dire qu’on voit bien qu’ils tentent des trucs mais on comprend rien. Vern devrait rapidement trouver ses marques en Ecosse. Ils conserveront la balle pendant 20 bonnes minutes avec l’efficacité d’un micropénis qui voudrait faire crier Padirac, laissant environ 4 secondes de possession aux Anglais, suffisantes à ce gros laideron d’Ashton pour emporter la balle du pied à coup de Rosbiff Chatte dans l’en-cul auvergnat.

Vern voudrait faire sortir tous les joueurs qui ne sont pas au niveau mais ne dispose pas d’un bus assez grand, alors il tape au pif.
Vosloo entre et montre qu’on peut jouer une demi de H-Cup en France sans avoir un niveau de Fédérale et permettra aux Auvergnats de ne plus être pénalisés sur tous les rucks.

Compte-tenu du génie spectral qui transpire des lignes arrières on arrêtera de gigoter pour revenir à Vosloo qui récupère le ballon, Vosloo qui avance avec le ballon, et Parra qui le perd.

Nigel est exténué. Faire croire à des millions de personnes que tout est de sa faute et que les Auvergnats ne sont en rien des gros branques lui a fait dépenser une énergie considérable. Epuisé, il craque, et les Anglais marquent coup sur coup deux essais en moonwalk dans une défense au-delà des limites de la Physique Poricalienne.

Il faut sauver cet homme au bord du burn-out, et fort heureusement la sirène vient sauver les apparences, surement bien aidée par toute la mauvaise foi franco-française quand il s’agit d’ignorer l’évidence d’une magnifique branlée.

Voilà, ce fut un plaisir de vous faire revivre ce petit moment de bonheur. Vous pouvez cesser de vous écarter les fesses avec les mains en scrollant l’écran du menton, et retrouver la posture avantageuse et fière du travailleur aux champs. Il reste cependant un problème à résoudre au plus vite, Nigel ne pourra pas arbitrer lors des phases finales de championnat.

De ce fait, et pour le bien-être de votre famille, je vous invite à ignorer tout ce qui va se passer dans les semaines à venir, vous isoler dans les bois et vivre de cueillette. La place de Jaude est neuve, je n’ai pas envie d’y creuser un charnier. Passez une bonne journée, gardez le moral, avec un peu de chance demain il pleut et vous aurez attrapé la syphillis.