Pierre Villegueux analyse Galles – France et fait le bilan du Tournoipar Pierre Villegueux 20 March 2012 16 Par Pierre Villegueux, Et à la fin, ce sont les gentils qui gagnent, sauf s’ils sont Ecossais. Voilà la morale de fin de ce Tournoi des VI Nations, qui nous a proposé une dernière journée relativement prévisible et un peu haletante. Après leur défaite à domicile face au XV de la Rose, les Français étaient vénères… mais pas trop. Ils ne voulaient pas non plus gâcher le Grand Chelem gallois : ils se sentaient déjà trop coupables de leur avoir volé une finale il y a quelques mois. C’est donc avec un esprit guerrier et conquérant que le XV de France se lança à la conquête du bonus défensif. Pour ça, on avait fait appel au spécialiste : Dimitri Yachvili, Bac +5 en sauvetage d’équipe en péril. Le Biarrot a sorti tout l’arsenal du capitaine de bateau à la dérive : sorties de balles lentes, temporisation, jeu au pied dans la boîte. Idéal pour endormir l’adversaire et s’en sortir avec une défaite honorable. En cela, il était bien sûr aidé du docile Yoyo Beauxis, qui a signé à Toulouse pour qu’on arrête de lui parler de son pied et qui est rappelé en équipe de France uniquement pour taper des coups de tatanne. Bien sûr, on ne lui a pas demandé de le faire intelligemment, il s’est donc principalement contenté de rendre le ballon au trident arrière gallois. Il a tout de même tenu à montrer sa nouvelle identité toulousaine en ratant une demi-douzaine de drops durant tout le Tournoi, ce qui prouve qu’il a quand même plus de caractère que ce que son regard de lémurien amorphe laisse à penser. Toujours dans cette opération « perdons dignement pour rendre hommage à Julien Bonnaire et William Servat », on avait titularisé le bon soldat Florian Fritz au centre. On ne pouvait évidemment pas lui demander d’être imaginatif mais il a rempli sa tâche principale en plaquant à la place d’Aurélien Rougerie, qui s’il continue d’être aussi vif va pouvoir devenir mannequin Dim, mais dans une vitrine des Galeries Lafayette. On avait bien pris soin de mettre Fofana à l’aile afin qu’il ne fasse pas trop de percées, puisque c’est apparemment ce qu’on lui reprochait depuis le début du Tournoi. Finalement le grain de folie de ce XV aura été incarné par Jean-Marcelin Buttin dit « Le Fidjien Blanc » (quel surnom débile d’ailleurs, après tout personne n’appelle Mathieu Bastareaud « le sumo noir ») qui nous a fait revivre le fantôme du french flair le temps de deux accélérations. Même Wesley Fofana a été tenté de gifler Aurélien Rougerie samedi au Millenium. Pour le reste, le scénario du match était classique. Pour bien se faire respecter et montrer qu’ils n’étaient pas là pour en prendre 30, les Bleus ont attendu 20 minutes avant de prendre un essai : leur meilleure performance défensive depuis l’Italie. Un essai de Cuthbert nous prouva une fois de plus la redoutable efficacité de la « défense glissante » à la biarrote. On notera d’ailleurs que c’est assez cocasse de demander aux Toulousains et Clermontois de défendre comme l’équipe à qui ils passent 30 pions tous les ans en Top 14, mais bon. A la mi-temps d’ailleurs, Ouin-Ouin est venu pester sur cette fameuse défense inversée contre laquelle il est si difficile de jouer. Apparemment, ça ne lui est pas venu à l’idée que si cette tactique était si prisée, c’était peut-être parce qu’elle était efficace et qu’on aurait mieux fait de s’y mettre aussi. Mais passons. Après une première mi-temps relativement insipide, le XV de France a eu un gros temps fort d’une vingtaine de minutes en seconde mi-temps, avec quelques fulgurances de Buttin, Fofana ou Fritz, et bien sûr des conclusions foirées, à l’image d’Imanol Harinordoquy qui ne voulait surtout pas offrir un essai à Picamoles, son concurrent direct au poste de N°8. De Pénalité, le meilleur marqueur d’essai de l’ère Lièvremont, semble avoir pris sa retraite internationale et pas moyen de passer cette foutue ligne. Quelques pénalités d’Halfpenner et drops ratés de Priestland plus tard, le Pays de Galles célébrait enfin son Grand Chelem si mérité, Mathieu Lartot était fait chevalier d’honneur de la principauté et tout le monde pouvait aller se bourrer la gueule dans les rues de Cardiff – sauf Sam Warburton qui s’est couché à 21h après s’être brossé les dents trois fois. On regrettera donc le match du Grand Chelem de l’année dernière entre l’Irlande et l’Angleterre, où les rouquins avaient tout fait pour niquer le sacre de leurs voisins favoris, juste pour le fun. Des Anglais qui ont bien pris leur revanche puisqu’ils ont éparpillé les verts façon puzzle sur la pelouse de Twickenham samedi dernier : on n’avait pas vu autant de scènes de Boucherie sur une chaîne hertzienne depuis la diffusion de la Passion du Christ. Dans le genre Boucherie toujours, on appréciera donc le suicide écossais à Rome, les Scots ayant eu la bonne idée de joueur leur pire match du Tournoi contre la seule équipe contre qui ils avaient réellement une chance de gagner. Pourquoi ? On ne saura jamais, probablement parce qu’ils sont Ecossais. Sam Warburton joue aussi de la batterie. Comme Christian Jeanpierre... coïncidence ? Le bilan : La victoire du Pays de Galles est somme toute logique. Ils ont su rester sur la dynamique de la Coupe du Monde pour remporter ce troisième Grand Chelem en 6 ans. Problème : les dernières fois, ils avaient complètement pété les plombs ensuite, avec des épisodes réellement dramatiques (défaite en Italie, élimination par les Fidji en Coupe du Monde, cadrage débordement de Lionel Nallet…). A eux de ne pas prendre la grosse tête ce coup-ci et de construire pour réussir à perdre une finale en 2015, comme leurs modèles français. Les Français justement, qui étaient les co-favoris du Tournoi, finissent à une piteuse 4ème place. La pire place depuis 2001, avec trois matchs à jouer à domicile en plus. Lapinou avait fait un peu mieux : lui, il avait battu l’Irlande. Et surtout il avait fait n’importe quoi en sélectionnant des joueurs de 16 ans, des joueurs de fédérale, et même des joueurs de sa famille. Donc on pouvait plus facilement lui pardonner qu’à Ouin-Ouin qui lui s’est appuyé sur le groupe du Mondial. Alors comme déjà dit, c’est un peu facile de lui reprocher après coup son conservatisme, alors qu’on aurait pu faire exactement pareil s’il avait lancé des jeunes et qu’on “s’était pris branlée sur branlée”… Problème : Lancaster lui a eu les bollocks de mettre des jeunes, et ça a marché. Alors évidemment, c’est plus facile d’être audacieux quand t’es en CDD et que tu sais que le seul risque que tu cours, c’est de te faire vraiment embaucher. Evidemment, c’est plus facile de faire table rase après une Coupe du Monde ridicule sur et en dehors du terrain que quand tu termines en finale. Cette putain de finale qu’on se traîne donc comme un boulet, jusqu’à en oublier que c’était bien la même équipe qui avait perdu contre l’Italie et les Tonga. Puisqu’apparemment cette semaine c’est les assises du rugby (à ne pas confondre avec les aussies du rugby, qui sont des réunions de gens qui ne pigent queudalle à la mêlée), il serait bon de s’en souvenir et de penser qu’il faut peut-être un peu changer les choses en profondeur si on veut espérer faire mieux qu’une nouvelle finale par accident. A propos de changement, parlons aussi un peu de d’Irlande, cette équipe qui sort un nouveau joueur tous les 10 ans. La découverte de l’année aura donc été Donnocha Ryan… 28 ans. Il a profité de la blessure de Paulo Quenelle pour disputer les deux matchs de sa vie contre l’Ecosse et l’Angleterre, à tel point qu’il est nommé dans la liste des meilleurs joueurs du Tournoi par l’IRB. L’autre tentative de nouveau c’était la titularisation de Fergus McFadden au centre lors du match face au Pays de Galles. Aux dernières nouvelles il porterait toujours l’empreinte de la chaussure de George North sur le visage. Bref, on serait presque tenté de croire que l’Ecosse et l’Italie ont plus d’avenir que la Verte Erin. Non je déconne, quand même pas. Heureusement les Ecossais se rattrapent sur le bon goût vestimentaire. Les coqs: Poitrenaud : Bon jusqu’à sa sortie. Sur l’essai de Cuthbert, son talent de photographe s’est encore mis en avant puisqu’il se met à genou pour mieux prendre l’ailier Gallois en contre plongée. Un artiste ce Clément. Jean-Marcelin Buttin : Triste constat, la relève du french flair en France ressemble à Dany Boon. Bon c’est moins classe que Cédric Heymans, mais on prend quand même. François Trinh-Duc : Est passé de deuxième ouvreur à 4ème arrière dans la hiérarchie du XV de France. Une entreprise de destruction qui surclasse peut-être même le travail effectué par Bernard Laporte sur Frédéric Michalak. Bon, ne t’en fais pas François, dans quelques semaines tout le monde te trouvera génial avec Montpellier. Alexis Palisson : Il a perdu son mojo en même temps que ses cheveux. Pas très adroit sous les ballons hauts, plutôt transparent en attaque. Il aura tout de même été utile aux journalistes qui n’osaient pas critiquer Dusautoir et qui lui ont mis l’essai sur le dos. Aurélien Rougerie : Je citerai juste cette remarque prémonitoire dans l’Immonde 32 juste après France – Italie « Attention tout de même à la malédiction puisque toute la presse semble lui avoir attribué le titre honorifique de « papa des lignes arrières »… le même qu’on utilisait autrefois pour justifier les sélections de Dominici et Jauzion alors complètement cramés. » Florian Fritz : Vu la pauvreté du niveau des centres en France, jouer avec un 4ème flanker (18 plaquages) n’est pas une mauvaise idée. A été dangereux une ou deux fois avec des tentatives d’offload presque réussies. A revoir, mais plus que son comportement, c’est la régularité qui pose problème chez lui (rappelons quand même qu’il n’était pas titulaire en finale du Taupe 14). Wesley Fofana : Il a pas marqué d’essai donc il a fait un match de merde. (théorème de Vincent Clerc). Plus sérieusement, il a été plutôt tranchant sur ses quelques ballons et s’est bien donné en défense avec des plaquages offensifs. Bon maintenant il y a plus qu’à savoir quel est son vrai poste. Le Lémurien : Je l’avais défendu contre l’Angleterre, lui n’a pas défendu contre le Pays de Galles : ça commence à faire beaucoup. Ce sont sûrement les consignes mais ses dégagements et ses chandelles (sous lesquelles personne ne monte jamais) sont rarement pertinents et il n’est même plus capable de claquer un drop avec comme seule opposition Adam Jones qui court en slow motion à 30m de lui. Sa carrière internationale semble gelée, comme Fabien. Morgan Parra : Lièvremont n’était donc pas totalement fou : Morgan Parra est bien le meilleur ouvreur de France. Mais en club, il joue à la mêlée et le titulaire est David Skrela. Il faut donc rappeler Dadou. Dimitri Yachvili : Tout est dit en début de texte. Yachvili c’est un chanteur de karaoké qui tombe toutes les filles dans son village, mais quand il monte à Paris, ben même s’il a pas de pellicules, il pécho rien du tout. Imanol Harinordoquy : Je disais la semaine dernière qu’il faisait son bon match annuel contre les Anglais, j’avais vu juste. Picamoles doit se demander ce qu’il a pu faire pour débuter 3 matchs sur le banc. Julien Bonnaire : Rate le plaquage sur Cuthbert pour s’assurer qu’il soit filmé au moins une fois lors de sa dernière sélection. « Ah bah oui je le connais lui avec le casque, c’est Olivier Magne c’est ça ? Ca m’étonne pas qu’il prenne sa retraite, ça fait 20 ans qu’il est là ! ». Merci, nous on sait qui t’es et on te regrettera. Thierry Dusautoir : Une faute, trois turnovers concédés, quelques placements douteux, pas le meilleur match du meilleur joueur du monde mais c’est toujours supérieur à la meilleure performance jamais réalisée par Rémy Martin Pascal Papé : Wah ! Quel beau gosse. Maestri : Wah ! Quel bon joueur. Julien Pierre : Wah ! Il est encore sélectionné ? Lionel Nallet : A fait honneur à son standing pour sa dernière. On ne lui tiendra pas rigueur de cette action à la 33ème où fébrile, il laisse tomber le saladier de chips sur le tapis du salon. Nicolas Mas : Solide comme d’habitude. Quoi ? C’est David Attoub qui était titulaire ? Alors il joue vraiment au rugby ? Au temps pour nous. Bon match pour le Parisien qui a montré qu’il méritait d’être revu, ne serait-ce que pour résoudre le mystère de la science que constitue sa paire d’oreilles. William Servat : On lui a remis le Talent d’Or du match, comme on remet un César d’honneur à un acteur cancéreux dont on sait qu’il va pas tarder à nous lâcher. Merci. Jean-Baptiste Poux : On en a marre de ne pas savoir quoi dire sur lui qu’on milite désormais farouchement pour sa retraite internationale. Au moins avec Debaty, Domingo et Barcella il y a plein de bonnes vannes à faire. Ouin-Ouin : Tu l’as dit et répété, le vrai départ c’est l’Argentine, il fallait rendre hommage aux vice-champions du monde. Dans ce cas là, tu aurais pu laisser ta place à Lièvremont pour ce Tournoi, au moins on se serait marrés. Les Gallois : Pas vraiment d’individualités à distinguer puisque à part le toujours clownesque Huw Bennett, aucun Gallois n’aura démérité au cours du Tournoi, et presque tout le monde aura eu sa petite occasion de briller. Une vraie équipe, donc. Finalement les Gallois c’est donc Mathieu Lartot qui en parle le mieux : sa performance vocale tout au long du Tournoi fut digne des tout meilleurs doublages de films pornos.