La chronique de Romain Moite #6
par Dr Didge

  • 06 May 2011
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La semaine des barbus et les phases finales.

 

Ce week-end, j’ai regardé les matchs de la Coupe d’Europe chez moi, devant ma télévision, car j’ai besoin de me faire discret en ce moment. Lundi, j’ai appelé Mourad Boudjellal pour lui expliquer que j’avais un peu trop fait la fête avec Gavin Henson le soir de Toulon-Toulouse, qu’il n’y est pour rien dans la bagarre. Et j’en ai rajouté en lui disant que si il faisait quelque chose pour Gavin, je pourrais peut-être faire un effort d’arbitrage si je me retrouve à officier lors d’un match de Toulon. Il m’a dit qu’il allait réfléchir à la situation. Assez fièrement, j’ai raccroché le sourire aux lèvres, je me suis dit que j’étais un mec bien, au fond. Et puis grâce à Gavin, j’ai pu passer la soirée à parler avec des filles, ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé. Vous croyez que les groupies nous demandent des autographes à nous ?

La dernière journée du championnat se rapproche à grand pas. La plupart des gens vont regarder les matchs en multiplex. On ne risque rien, pas trop de ralentis à charge sur le même match, on est tranquille ! Et puis j’ai remarqué que depuis quelques jours, le monde de l’ovalie fait front autour de nous après les réactions du grand barbu. Pas celui qui a été « inhumé » en mer par Obama, non, l’autre. Difficile de dire à la fois que le TOP 14 est le meilleur championnat du monde, et que les arbitres sont les plus nuls du monde. Du coup, pour continuer à vendre des places dans les stades, des abonnements à Canal+ et du temps pour les spots de pub, tout le monde nous défend, c’est vraiment le monde à l’envers ! Heureusement que les phases finales vont bientôt commencer pour qu’on puisse rééquilibrer la situation avec des décisions hasardeuses, car je dois vous avouer que ça me plait pas trop quand tout le monde nous soutient. J’ai tellement été habitué à me faire cracher dessus, ou à recevoir des objets contendants sur la tête, que ce revirement soudain de mentalité me fait un peu peur.

Sinon, j’ai participé à un enregistrement-pilote des spécialistes de François Trillo pour remplacer Patrice Lagisquet la saison prochaine. Voilà comment, ça s’est passé :

François Trillo : « Bonjour à notre nouveau spécialiste, Roman Moite, bien connu comme étant une des meilleurs arbitres de l’hexagone, et également chroniqueur sur internet. »

Fabien Pelous (sourire) : « Oui, je le connais bien ! »

Moi : « Bonjour à tous et merci pour votre accueil ! »

Richard Dourthe (visiblement énervé) : « Si c’est lui le nouveau, je me casse, je me souviens d’un match avec l’Aviron… »

François Trillo : « Calmons-nous Richard, voyons »

Thomas Lombart : «  Allez Richard, les arbitres sont indispensables, un peu de retenue »

Richard Dourthe : « Allez vous faire voir ! » (il quitte le plateau).

François Trillo : « Heu, oui… bon. Romain, vous allez me dire ce que vous pensez du niveau des arbitres français, qui sont dans l’œil du cyclone en ce moment suite aux déclarations de Sébastien Chabal. »

Moi : « Lucien Mias disait (je lis discrètement ma fiche, j’ai pas envie d’improviser, je sais pas faire) « l’arbitre, c’est comme le vent et la pluie, il faut faire avec ». Je suis assez d’accord avec lui. Qui parmi vous a déjà essayé de prendre un sifflet sur un terrain ? Qui parmi vous a déjà essayé de prendre en une seconde des décisions qui auront parfois de grosses implications, tout en se basant sur un règlement abscond impossible à comprendre. Si vous me demandez combien de glaçons vous devez me mettre dans mon Ricard, c’est simple. Mais si vous me demandez qui est en faute sur la plupart des rucks, vous sifflez qui ? Hein ? Vous faîtes moins les malins, là !

François Trillo : « Pierre, une réaction ? »

Pierre Villepreux : « Ben ça dépend du contexte situationnel de l’action en cours… Un ruck est licite lorsque que le joueur qui vient protéger le porteur de balle qui va au sol n’a pas un genou à terre et que son adversaire ne tente pas de le déséquilibrer en le poussant et qu’un autre n’arrive pas sur le côté – l’IRB est très clair sur ce dernier point – l’arbitre doit laisser le jeu se dérouler pour laisser l’avantage à l’équipe qui va le mieux profiter de la désorganisation créée par les nombreux temps de jeu favorisé par l’interprétation qu’en donnera le directeur de jeu, et c’est dans ce sens que les règles ont été élaborées pour permettre à chacun de prendre des décisions cohérentes. »

Moi : « Mmhhhh (soupire). Oui, ça dépend. Enfin, je ne sais pas si j’ai bien compris ce que tu as dit Pierre. Mais bon, vous avez compris, je pense, pourquoi je suis devenu dépressif et alcoolique, ce jeu est impossible à arbitrer. Personne ne comprend vraiment les règles, même ceux qui les conçoivent. ».

Je crois que je les ai scotché, ils étaient tous ébahis par ma répartie. François Trillo m’a dit qu’il m’appellerait pour me dire si on renouvellera l’expérience ou pas, en me tapant chaleureusement dans le dos. Richard Dourthe aussi m’a tapé dans le dos, mais moins amicalement, j’ai fini par le calmer en lui éclatant un magnum de champagne sur la tête.

Romain Moite