Top14 Boxing Day : Les pronos de l’Affreux Gnafron
par l'Affreux Gnafron

  • 29 December 2013
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Dimanche 28 décembre, 03h15. En costume 3 pièces (espadrilles-jogging-col roulé), tranquillement installé devant ma cheminée à siroter seul une bonne 86 chambrée à point, j’eus le déplaisir de recevoir un coup de téléphone d’Ovale Masqué :

-Salut l’Affreux!
– Monsieur l’Affreux. Qu’est-ce que tu me veux ?
– … Je t’appelais comme ça, en passant, pour prendre des nouvelles.
– On me la fait pas. T’as encore besoin de pognon ? Ou d’une nouvelle protection armée car le staff du Stade Toulousain a mis un contrat sur ta tête ?
– Euh non, c’est bien plus grave cette fois-ci. Nos sponsors secrets me mettent la pression pour qu’on sorte un nouvel article sur les pronos du Top14. Ils ont vérifié leurs chiffres et ils sont formels : il y a très peu de paris engagés sur cette 15ème journée.
– Et alors ?
– Et alors, si on ne sort pas des pronos fantaisistes que nos cons de lecteurs vont suivre aveuglément, ils vont perdre un max de pognon et ce sera la fin de ces commissions qui nous font grassement vivre.
– Parle pour toi, moi j’ai un vrai métier qui me fait vivre.
– Arrête de charrier, t’es fonctionnaire. Alors j’ai pensé à toi pour ce nouvel épisode, t’es le candidat idéal : tu ne connais rien au rugby car tu supportes Perpignan, tu disposes d’énormément de temps libre car tu vis en Ariège et surtout t’es le seul disponible ce soir car tu n’as aucune vie sociale en dehors de Chatroulette ou Twitter.
-…
– Voilà. Donc si tu veux encore te prévaloir de faire partie de la Boucherie sur les réseaux sociaux, tu me bâcles un truc, même immonde et incohérent en moins de 10 minutes car on est hyper pressés! Ils font pareil à Midi Olympique et personne n’y trouve rien à redire, alors on va pas se gêner.
Et c’est ainsi que :

Une conférence de rédaction de la Boucherie ressemble à ça. En moins intense.


Stade Français – Perpignan

Marc Delpoux a demandé deux choses à ses joueurs : ‘être disciplinés et ne pas donner de points faciles’. Respectant fidèlement ces consignes, les Catalans encaisseront un essai dès le coup d’envoi, juste avant le carton rouge de Benvenuti pour placage haut. Le reste du match sera à l’avenant, entre essais casquettes et fautes stupides. Pénalisée 35 fois en mêlée fermée, l’Usap deviendra la première équipe à encaisser 14 essais de pénalité sur cette phase de jeu. Le Bouclier de Brennus s’éloigne peu à peu pour Perpignan dont l’objectif prioritaire reste cependant la Heineken Cup.
Victoire parisienne bonifiée.


Bordeaux – Brive

A seulement 3 ans et demi de la prochaine élection présidentielle, ce match fait figure de test pour les instituts de sondage et enthousiasme tout le petit monde politico-médiatique. Une victoire bordelaise et l’on voit déjà les gros titres des gazettes bruisser autour du grand retour d’Alain Juppé ; un succès briviste et l’on s’esbaudira de la résistance inattendue de François Hollande. Comme un symbole© de l’indigence de ces débats, on verra un bon vieux match nul. A moins que la marge d’erreur ne soit favorable à Brive. Ou à Bordeaux. Ce qui n’empêchera pas de tirer des jugements définitifs pour le maintien de l’une ou l’autre équipe.

 

Clermont – Oyonnax
D’un côté le Rafale clermontois, petit bijou technologique extrêmement onéreux (mais il ne faut pas le dire) d’une efficacité redoutable pendant les phases de démonstration, considéré comme le meilleur avion du monde à l’entraînement et qui peinait à s’exporter avant Perpignan. De l’autre, l’AK47 oyonnaxien, instrument rustique mais efficace dans les milieux les plus hostiles, les climats les moins favorables à l’homme (à domicile donc). Lors de l’escarmouche du match aller, le bourbier d’Oyonnax avait eu raison de l’armée auvergnate. Ses ruelles tortueuses, sa couverture nuageuse intense, la vaillance de ses combattants avaient conduit les rebelles à une victoire de prestige. Mais le retour s’annonce terrible pour les guérilleros de l’Ain. Sur un champ de bataille qu’elle maîtrise depuis des années, Clermont peut mener les opérations à sa main. Tapis de bombes pour commencer, frappes chirurgicales pour achever les survivants et manœuvres d’apparat pour terminer le boulot et satisfaire le public, le Rafale clermontois est en représentation à Michelin.
Du sang, de la sueur et des larmes, voilà le programme qui attend Oyonnax. Victoire bonifiée pour Clermont. Lourdes pertes humaines pour Oyonnax. Reposez en paix Mikhaïl Kalachnikov et Serge Dassault.

Pour quelques secondes encore la défense d’Oyonnax tient bon.

 

Grenoble – Castres
“Bonjour ma colère, salut ma hargne, et mon Fouroux, coucou !” comme dirait Damien Try.
Depuis 1993, un Grenoble-Castres n’est plus un match comme les autres. Côté isérois, on reste traumatisé par le vol subi en cette année funeste et l’on rêve d’une vengeance à sa juste valeur. Côté aveyronnais, on poursuit son chemin, faisant fi des jalousies albigeoises et portant fièrement ce dernier Brennus remporté par inadvertance. Mais il doit venir le jour de solder ses comptes, et ce jour est justement arrivé. L’esprit de Noël, cette récupération chrétienne de nos pourtant maçonniques Valeurs du Rugby, ne sera pas le bienvenu à Lesdiguières. A côté de ce match, les évènements syriens ou centrafricains passeront pour de sympathiques escarmouches entre adultes consentants. Ça sent la chair brûlée, les entrailles répandues et les orbites perforées.
Victoire de Grenoble, bonus défoncé pour Castres.


Montpellier – Biarritz

La tournée d’adieu au Top14 ‘Age tendre et tête de bois’ continue pour le Biarritz Olympique. Mais si vous savez bien, cette pénible succession de concerts au cours desquels de vieilles idoles incontinentes rendent une ultime visite à leurs derniers fans séniles. Et pourtant, elles ont connu leur heure de gloire, ces stars décrépites, elles ont même fugacement dominé la France. C’était au siècle dernier, avant l’explosion d’Internet et du tendon d’Achille de Fabien Barcella, avant que les Galactiques ne se muent en gars lactiques. Alors aujourd’hui, elles tentent de retarder l’inéluctable, leur disparition prochaine, dans une lente agonie qui réjouit tout le monde. Et pour un sursaut briviste, combien de déconvenues clermontoise, castraise ou même, indignité suprême, bayonnaise ?
Le concert montpelliérain ne devrait pas déroger à la règle : valise et vaseline pour les Biarrots, bonus pour les Héraultais.


Bayonne – Toulouse

Le Hugetico nous promet du spectacle sur les bords de l’Adour. Entre un Stade Toulousain infoutu de s’imposer à l’extérieur et un Aviron qui s’accroche à son invincibilité à domicile avec l’énergie du désespoir (ce même désespoir qui envahit ses supporters depuis quelques saisons), on devrait assister à une superbe partie de rugby. Ou alors, ce sera moche, vilain, dégueulasse et les bleu et blanc franchiront une nouvelle étape vers ce qui apparaît comme le dernier challenge de leur dernière saison en Top14 : terminer au classement devant l’Ennemi honni.
Victoire de Toulouse 2-1, doublé de Sirieix, le régional de l’étape. Bonus pour Bayonne.

 

Racing Métro – Toulon
Un déplacement au Racing n’est jamais une partie comme les autres. En un simple match de rugby, tu peux côtoyer l’expérience de voyage la plus déroutante qui soit sur Terre : un séjour en Corée du Nord. Comme dans les rues de Pyongyang, un calme étrange, presque irréel règne dans les travées de Colombes. Tout y est extrêmement policé, la foule soigneusement encadrée par quelques volontaires qui donnent aux figurants, recrutés pour l’occasion, la conduite à tenir. Les tentatives de tirs au but se font dans un silence solennel, tout comme les remises en touche, les essais encaissés et marqués ou plus généralement toutes les autres actions. Le Racing c’est un peu le pays du Matin calme, de l’après-midi tranquille et de la soirée soporifique. Une atmosphère de ouate que l’on tente parfois de déplacer vers la bouillante arène dionysienne toute proche. Avant de s’apercevoir qu’on risque de manquer de coton à installer dans un si grand espace.
Défaite du rugby.

Ces pronostics étaient sponsorisés par le Morgan Parra Fan Club Officiel.