Billet de bonne humeur
par Damien Try

  • 03 February 2020
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Il s’est passé quelque chose d’incroyable ce week-end.
 
Nous avons eu droit à un samedi très classique. Les Gallois n’ont eu aucun mal à défoncer des Italiens inexistants sur un score digne de ce premier samedi du mois. Ensuite les vaillants™ valeureux™ et courageux™ Écossais ont eu toutes les peines du monde à perdre un match qu’ils auraient dû gagner dix fois, face à des Irlandais au jeu toujours aussi peu palpitant. Nouvelle année certes, mais toujours la même histoire nous n’étions pas dépaysés, la cruelle petite défaite de rigueur contre les Anglais U20 et au lit, nous étions sur les rails, demain c’était le poulet du dimanche midi, la défaite contre les Anglais puis Drucker, des dimanches comme les vivent les Français depuis les années 30, la mèche de Vincent Clerc à la mi-temps en plus.
 
Mais il s’est passé quelque chose d’inattendu.
 
Comme tous les 4 ans (ou plutôt tous les 2 ans en fait), on s’est un peu emballés sur notre équipe toute neuve. De mon côté, même si j’avais envie d’y croire, je me méfiais un peu. Quand tu quittes ton boulot parce que t’en as trop marre, t’es toujours content. Tu dis au revoir à tes collègues en souriant, et au fond de toi il y a une petite voix qui hurle « Ciao bande de losers ! » Tu te fais une joie de ne plus revoir le petit chef que tu ne pouvais plus encadrer et de quitter les locaux dans lesquels tu allais à reculons tous les matins. Et puis au bout d’une ou deux semaines à ton nouveau poste, tu te rends compte que tes nouveaux collègues sont plus ou moins les mêmes que les précédents, tu apprends que ton nouveau petit chef était l’adjoint du précédent et que le bureau à Nice coûte trop cher, c’était provisoire tu vas retourner en banlieue sud. Rappelez-vous de la prise de fonction de Guytou (qu’il repose en paix, même si je doute que ça n’arrive jamais). Après le crime contre l’humanité qu’avait été le mandat de PSA, on était tout heureux de voir arriver l’homme associé à un jeu un peu plus ambitieux, dégager les bodybuilders pour faire rentrer des joueurs de ballon, bienvenue Vakatawa, Camara, des mecs qui vont mettre un peu de folie sur le terrain. Et puis dès le premier match on passe à un drop loupé de Parisse du fiasco et on finit 4èmes du Tournoi.
 
Et puis là ça a été différent.
 
Certes la touche c’était pas ça. Certes il y a eu une mêlée humiliante. Certes les Anglais ont cru (comme tout le monde) à un en-avant d’Ollivon et ont arrêté de jouer. Certes on a eu très peur à partir de la 65ème minute. Certes ça n’est qu’une victoire, 2023 est encore loin. Mais au-delà de cette victoire, personnellement j’ai retrouvé l’envie d’encourager cette équipe. Il y a à peu près cinq ans, j’ai renoncé à m’investir émotionnellement dans cette équipe qui m’a trop déçu. Je ne souhaitais pas sa défaite mais je ne peux pas nier avoir beaucoup rigolé en voyant le coude de Vahaamahina. Au moins quand une équipe fait n’importe quoi c’est plus facile de persifler sur twitter. Mais là j’ai envie d’y croire. Guirado se donnait sur le terrain avec l’énergie du désespoir. Ollivon semble lui se battre parce qu’il a envie de faire un gros truc avec cette équipe, et c’est tout de même assez différent. L’équipe a fait bloc, et j’ai bien aimé que le staff fasse rentrer Jalibert et Vincent, 0 ballon 0 placage mais plus en vue que Willemse. Beaucoup de générosité aussi de la part de Dupont qui a voulu inclure dans la victoire sa cousine en tribunes, lui adressant une magnifique passe au pied à la 79ème. Je sais pas si c’est l’euphorie ou l’alcool, mais à la fin du match j’avais même envie de faire un bisou à Bernard Le Roux ! Le Roux, putain ! Je ne sais pas combien de temps va durer cette lune de miel et après la défaite piteuse contre l’Italie dimanche je vais peut-être regretter ce texte et mon nouveau tatouage représentant les lunettes de Fabien Galthié. Mais bon, si on regarde le rugby c’est à la base pour les émotions, les bonnes venant au prix des mauvaises. Je vais prendre ce risque cette année.
 
En attendant le mot de la fin au dernier sélectionneur qui m’avait fait vibrer, « battre les Anglais, quel pied quand même ! ».