Les Seigneurs du Brennus : Episode 1par Le Stagiaire 12 January 2012 5 « Un Bouclier pour les défier. Un Bouclier pour les motiver. Un Bouclier pour les faire s’affronter tous et dans le Top 14 les lier. » Nous sommes à quelques minutes de l’audience de l’ennemi public numéro un en Terre d’Ovalie : Mourad « Le Fier » Boudjellal. Le shérif du comté, Jean-Yves de Revol, lui a officiellement conféré ce statut quelques jours plus tôt et le Grand Duc de la Varie (mais pas de l’avarice quand on voit le salaire de ses gens) a accepté de se rendre en personne à la capitale (La Fédération) pour entamer des pourparlers avec le Conseil des Sages, chargé de rétablir la justice au sein de ce royaume trop souvent troublé par les querelles entre cités et les décisions contestées des Chevaliers de l’Ordre. Lorsqu’il arrive devant le pont-levis, les soldats de garde se redressent sans tarder. Ils l’ont tout de suite reconnu. Malgré la capuche qui couvre sa tête et assombri le haut de son visage, sa posture est reconnaissable entre mille. Avec souplesse et assurance, il descend de son beau destrier noir dont la barde rouge porte fièrement les couleurs de son territoire et s’approche d’eux d’un pas vif et résolu. Il peut sentir leur inquiétude. Ils se regardent, semblent hésiter sur le comportement et le ton à adopter mais il leur laisse à peine le temps de réfléchir. Il sait qu’il pourrait les humilier d’une seule tirade mais, n’ayant pas de temps à perdre avec eux, il se contente de leur intimer l’ordre de l’escorter jusqu’au shérif. Les deux hommes n’hésitent pas et, après s’être assuré que les deux crétins qui leur servaient de remplaçants et qui roupillaient dans la paille un peu plus loin assureraient la protection de l’entrée, se pressent de répondre à sa requête. Les trois hommes entament alors une courte marche qui les fera traverser la cité. « La Fédération n’a pas changé… » ricane l’Homme. « Euh non Monseigneur, la vie y est toujours aussi agréable » répond l’un des gardes en bafouillant. « Tu m’étonnes, on ne peut pas dire que vous vous creviez à la tâche par ici » réplique alors aussitôt son interlocuteur amusé. Les deux soldats se regardent un peu paniqués, ne sachant quoi trop répondre et ils sont finalement sauvés par un homme qui jaillit à leurs côtés. Il avait repéré le seigneur et avec un culot surprenant l’interpelle avec un large sourire : « Une petite brioche, mon Seigneur ? » Les deux gardes s’apprêtent à le mettre en fuite en sortant leur épée mais d’un geste, l’Homme les en empêche. Sans sourciller, il dévisage l’intrus. Avec sa chevelure bouclée et ses vêtements de paysan, le pauvre ne paye pas de mine. Après l’avoir scruté quelques secondes, un sourire nait sur le visage du noble : « Tu es Jo, n’est pas ? Jo le Maso. » Aussi surpris que confus, le trublion semble terriblement pris de court. « Je connais ton histoire, continue-t-il. Ancien grand chevalier, tu t’es mis au service du roi pendant plusieurs décennies avant de tout abandonner pour te consacrer à la cuisine. Tu n’as pas hésité à sacrifier plusieurs de tes privilèges et ta réputation pour ta passion. Je respecte cela. » Il se saisit alors d’une brioche, et dans un clin d’œil ajoute : « Depuis le départ du Prodige d’Occitanie, il parait que tu as La Miche la plus demandé du royaume ! Mais profites-en, mon petit doigt me dit que ce dernier pourrait bientôt réapparaitre du côté de mes terres… ». Il s’esclaffe et reprend sa route, entrainant avec lui son cheval et son escorte ponctuelle qui semble encore tout étonnée de la scène à laquelle ils viennent d’assister. Arrivée à une centaine de mètres de la grande porte du palais de la Fédération, la petite troupe ralentit jusqu’à s’arrêter complètement. Le seigneur se tourne alors vers les deux gardes et leur indique qu’ils sont libres de retourner à leur poste. Il siffle un jeune palefrenier qui passait alors par là. Le garçon le regarde de loin, semble hésiter un instant. L’homme s’impatiente alors et abaisse sa capuche. « Me reconnais-tu maintenant ? Allez, hâte toi, je n’ai pas ma journée à perdre. » Sans plus tarder, le jeune homme accourt. « Même mon soldat Basta le Gros est plus vif et réactif que toi. Et pourtant, sa consommation mensuelle de sanglier est sûrement supérieure à la consommation annuelle de toute ta famille.» Alors qu’il s’apprête à rejoindre le palais, le seigneur fait volte face et lance une pièce au garçon. « Prend soin de mon cheval jeune homme, ou je te jure qu’après tu ne pourras même plus prendre soin de toi. Il s’appelle Pilou et c’est un cheval de guerre, au tempérament bien trempé.» Le jeune homme essaie tant bien que mal de faire en sorte que le destrier le suive mais ce dernier ne bouge pas d’un sabot. Tout en s’éloignant, l’Etranger lui donne une dernière consigne : « Appelle-le deux fois de suite pour qu’il t’obéisse ! » « Pilou Pilou ! » crie alors le gosse. Le cheval répond par un hennissement puissant et lui emboîte docilement le pas. C’est le Shérif Revol qui accueille lui-même l’Homme en bas des escaliers. « Monseigneur Boudjellal » ! Je suis heureux de voir que les dieux de la raisonnabilité vous ont rattrapé. » « Croyez moi qu’ils ne m’ont rattrapé que parce que je l’ai voulu. Je suis libre et insaisissable comme le rebond d’un ballon ovale… À l’inverse de certains de mes soldats que le dieu des estropiés réussirait à distancer sur une course d’obstacle. Maintenant hâtons-nous si vous le voulez bien, je suis attendu sur une île éloignée de la côte pour recruter dans mes rangs de valeureux guerriers. Et je ne serai pas sans vous rappeler que c’est votre dénonciation qui est à l’origine de ma présence ici aujourd’hui. Je me passerais donc volontiers des amabilités mondaines qui bercent votre quotidien.» « Euuh, certes, certes… Comme vous voudrez. Les sages vous attendent dans la grand salle. Entrez donc… » Le seigneur entreprit alors de gravir prestement les marches qui le séparaient de l’entrée et dans un ultime mouvement de cape, s’engouffra dans le palais pour embrasser sa destinée… A suivre…