Message à l’Anti-France : Pourquoi nous gagnerons la coupe du monde
par Marcel Caumixe

  • 29 September 2011
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Le rugby, ce ne sont pas ceux qui en parlent le plus qui s’y connaissent le mieux. Marcel, lui, en parle tout le temps. Né non loin de la ville rose, il est persuadé que le droit du sol lui confère autorité en la matière.

Il voue surtout un amour sans borne au maillot bleu frappé du coq, pleure au moment des hymnes et abhorre toute pensée négative à l’encontre du XV de France.

Doté d’un optimisme qui ferait passer Christian Jeanpierre pour le dernier des cyniques, il s’attelle sans relâche à la tâche surhumaine d’insuffler un peu d’espoir dans les coeurs de ceux qui ont renoncé à y croire.

La composition est tombée, la polémique fait rage, le ragot est de sortie.

Je les entends d’ici, les porte-flingues de l’anti-france, jubiler d’avance à l’idée de pouvoir à nouveau éreinter ce pauvre Lapinou de leurs traits venimeux. Elles avancent à peine masquées, ces hordes grouillantes, à l’affut de la moindre éraflure pour se repaître, immondes asticots, des plaies encore vives du XV de France, en les maintenant grand ouvertes et infectées.

La bataille est perdue à les en croire. Pourtant elle n’a pas commencé. Car c’est dans la réalité des confrontations à enjeu que nous pourrons juger de la valeur de ce groupe France, et non dans les cliquetis des fleurets mouchetés des matches de poule. Une fois n’est pas coutûme, la gent journalistique ne voit pas plus loin que le bout de sa plume, et n’a d’horizon que la prochaine coupure pub.

Car en vérité je vous le dis, cette coupe du monde sera celle des bannis, des proscrits, des rugbymen de seconde zone.

Tout commencera dans le matin blême du 30 septembre, quand nous entendrons le grondement sourd de la révolte samoane. Livrant alors le match de leur vie, les coéquipiers de Census Johnston rudoieront un pack sud-africain venu dans son habit de suffisance, et réduiront leurs certitudes en miettes pendant que les arrières déchaînés mettront à mal une défense dépassée par tant d’ardeur. L’exploit manqué des Fidji en 2007, ce seront les Samoa qui le réaliseront devant des Springboks hébétés et amers d’avoir perdu leur fierté ainsi que le point de bonus défensif.

Le lendemain, des écossais galvanisés par le seul enjeu de faire souffrir le royaume d’Angleterre au plus profond de son âme, fera plier le XV de la Rose, dans une guerre de tranchée sous les pluies torrentielles d’Auckland. On se remémorera les grandes heures de la Nation, de William Wallace à la victoire du tournoi des VI nations 2000, premier du nom, qui vit Andy Nicol et ses frères d’armes priver les Anglais de leur grand chelem. La victoire bonifiée d’une équipe d’Argentine qui veut prolonger la dernière heure de gloire de Mario Ledesma relèguera Albion dans la disgrâce d’une deuxième place de poule, synonyme de quart contre les All Blacks.

La France quant à elle broiera les dernières illusions d’insulaires bien trop pacifiques pour résister aux coups de boutoir d’une mêlée qui, charpentée autour de sa bûche, redevient irrésistible. Comme par miracle, replacé à l’arrière, Médard entendra à nouveau l’appel de la prairie, et retrouvera le goût de ses courses un peu folles dans la fétuque et le pâturin. Son contagieux enthousiasme ouvrira la voie à ses camarades et redonnera de l’allant à l’attaque anémique de ces premières journées.

Viendra alors l’heure des quarts. Piqués au vif, l’écume aux lèvres, les yeux injectés de sang à l’issue d’une semaine de crise rugbistico-médiatique sans précédent, les hommes de Martin Johnson infligent un revers historique à une équipe de Nouvelle Zélande qui s’aperçoit que jouer à la baballe et faire les beaux à courir dans tous les sens, ça ne sert à rien contre 15 bouchers qui n’ont en tête que de désosser ce qui se trouve sur leur chemin. Courtney Lawes sera cité à cause du plaquage qui a littéralement tranché Carter en deux moitiés, et Tindall pour avoir lancé Weepu dans les tribunes en offrande à Zara Phillips, à la manière d’un nain de boite de nuit. Il s’ensuivra une guerre civile et plusieurs nuits d’émeutes qui n’empêcheront pas la tenue du reste de la compétition sous la garde rapprochée des casques bleus.

Dans l’autre moitié du tableau, les irlandais referont le coup de l’Australie aux Springboks qui se demandent encore comment ils ont pu perdre contre les Samoa. Le Pays de Galles refera le coup de l’Afrique du Sud aux Wallabies, avec la pénalité manquée en moins, synonyme de victoire.

L’argentine hélas, déja sur ses rotules ostéoporeuses, opposera un combat héroïque mais bien vain à des Français au coeur de leur montée en puissance. Du jeu d’avants donc, âpre, rude, sans merci, mais peu d’essais à se mettre sous la dent. Le score sera serré, mais la victoire sans appel. Ledesma finira sa carrière en martyr, à genoux,  les larmes aux yeux, ensenglanté par des stigmates étrangement christiques et son effigie remplacera la vierge en tête des processions pascales de Buenos Aires.

Dès lors, si vous avez suivi, nous serons en configuration “VI nations” (moins celles qui servent à rien). Tout est possible. La France se mettra en mode “Grand Chelem”, mangera le trèfle et remportera sa finale contre les Anglais ou les Gallois. Car peu importe : la victoire est au bout.

Alors on bouffera du rugby, de la France qui gagne jusqu’à en vomir dans nos assiettes. Les candidats à la présidentielle nous gratifieront de formules toutes faites fleurant bon le vestiaire, le président sortant offrira un poste de Ministre à Lapinou, Jean Dridéal jouera dans Joséphine Ange Gardien, et David Marty écrira sa biographie (“Le coffre à ballons” ed. MidiOlympique)

Alors, toi, ex-ministre qui trouve cette coupe du monde ennuyeuse, sèche tes larmes, car nous n’avons encore rien vu ! Toi vieux commentateur désenchanté, trempe ta plume dans le miel et écris les louanges de ceux que, précédemment, tu vitupéras ! Toi joueur frustré, patiente en silence car l’heure viendra où tes mains serreront la balle qui fera de toi un champion du monde ! Et toi, l’Anti-France, reprends foi en l’avenir, car à défaut d’être radieux, il est plein de promesses.

M.C.