Pierre Villegueux analyse le Crunch
par Pierre Villegueux

  • 02 March 2011
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Dans sa volonté de toujours se renouveler et de vous proposer du contenu que vous ne pourrez jamais lire ailleurs, La Boucherie accueille un nouveau chroniqueur atypique, Pierre Villegueux. Certains d’entre vous le connaissent peut être déjà. D’autres vont le découvrir. Voici une rapide biographie en ouverture de son premier billet.



Pierre Villegueux naît le 1 avril 1955 dans le Périgord noir. Enfant turbulent, ses parents fortunés l’envoient dans un pensionnat en Suisse pour lui apprendre les bonnes manières. Cela ne marchera pas vraiment. Passionné de rugby, Pierre devient un joueur emblématique du RC Nyons avec qui il remporte 4 championnats de Suisse. Toutefois, sa carrière prend fin prématurément, à l’âge de 28 ans, alors qu’il est suspendu à vie par l’IRB pour avoir porté une fourchette sur un arbitre. Sur les deux yeux.

Reconverti comme entraîneur, Pierre devient coach de l’équipe de France carcérale entre 1994 et 1999. A sa tête, les Bleus atteignent la finale de la Coupe du Monde 99, perdue par forfait après la tentative d’évasion en pleine partie des 23 joueurs inscrits sur la feuille de match. Depuis, il est consultant pour divers revues, dont le magazine officiel des amateurs d’Ultimate Fighting.

Et ben ça y est, encore une fois, on a perdu contre les rosbeef. Pourtant, j’avoue y avoir cru cette fois-ci. Déjà, il faut rendre à Marc Lièvremont ce qui appartient à Bernard Laporte, le Lapinou avait pour une fois opté pour la bonne stratégie. Dès sa composition d’équipe, il avait mis tous les atouts de son côté. Premièrement, il conservait la grande idée directrice du jeu des Bleus depuis cet automne : jouer avec avec 4 flankers: Dusautoir, Harinordoquy, Jauzion et Rougerie. On n’avait plus vu cela depuis la glorieuse ère de Bernie le dingue, qui avait eu l’audace en son temps de nous coller une paire de centres Lombard – Desbrosses. Ensuite, il avait également veillé à densifier son pack avec le retour de l’indispensable Sebastien Chabal. Indispensable pour deux raisons : sa puissance, bien sur, mais aussi sa maladresse. Avoir un joueur qui fait 5 à 6 en avants par match, c’est l’assurance d’avoir beaucoup de mêlées… et on sait que la mêlée est notre point fort. A ce titre, la titularisation de Clément Poitrenaud à l’arrière était également une bonne initiative, et c’est sûrement la seule fois de ma vie que je le dirai.

Seul bémol, pour moi: la présence de Dimitri Yachvili. Je sais bien que certains le considèrent comme une sorte de porte bonheur face au XV de la Rose, mais je pense que ce joueur traverse actuellement une sacrée mauvaise passe. Où est le génial stratège du Biarritz Olympique ? Dimitri a changé son jeu. Son nouveau profil d’éjecteur, de chien fou je dirais même, risquait de déséquilibrer le jeu d’une Equipe de France soudainement trop portée vers l’attaque. Morgan Parra me semble plus réfléchi et plus adapté au jeu que nous devrions pratiquer. Ce stratège aguerri, du haut de ses 21 ans, n’hésite pas à prendre 5, 8 voire 10 secondes avant de prendre chacune de ses décisions, ce qui lui permet de toujours faire les bons choix: passer à l’avant le plus proche pour une charge au ras, ou taper un coup de pied dans la boite le plus souvent.

A la veille du match, je restais néanmoins optimiste. D’autant plus que la pluie était annoncée ! On sait que cette équipe d’Angleterre, autrefois flamboyante, a sombré dans le cynisme le plus total et désire désormais pratiquer un jeu « fleur bleue », fait de redoublements de passes et de grandes envolées au large. Une grande tristesse quand on sait que même nous les Français, incorrigibles tarlouzes rêveurs, avons abandonné cette idée surannée du french flair. Le french flair, franchement, c’est quoi ? Un ado qui essaye de gratter trois accords au coin d’un feu de bois pour impressionner les filles, mais l’illusion ne dure jamais longtemps.

Revenons en au match. Force est de reconnaître que celui-ci a bien débuté. Le XV de France marchait dans les traces de son match référence face au Springboks à Toulouse: agressivité, pression, agressivité, pression, pression. C’était un régal de voir la charnière anglaise – incarnée par deux jeunes puceaux à la peau rougeoyante et aux oreilles décollées comme on n’en voit qu’au camping des deux pins au mois d’août – déjouer totalement en première mi-temps.

Hélas, ce que je craignais arriva. Porté par Yachvili bien trop dynamique les Bleus s’entêtaient à pratiquer un jeu large-large digne des pires heures de l’ASM Clermont Auvergne. Jauzion et Rougerie furent peu en vue. Chabal, sevré de ballon. Ironiquement, c’est sur une action de grande classe (un coup de pied dans la boîte) que le pauvre Yachvili se faisait contrer, offrant un essai sur un plateau aux Anglais après un plaquage raté de Donald Duc sur ce petit con de Foden.

En fin de match les Bleus ont repris les bons fondamentaux. Morgan Parra a amené un peu plus de cervelle à la mêlée. Donald Duc a arrêté ses numéros de cirque, ses passes entre les jambes et a notamment tenté une bien belle chandelle, récupérée par Aurélien Rougerie dans les 22 mètres – hélas, l’action n’a pu aller au bout. Saluons aussi le talent et le sang froid du jeune Alexis Palisson qui, sur ses deux premiers ballons, fait le bon choix en dégageant loin devant au pied. Malheureusement, l’un des deux finira en touche directe, mais pardonnons lui la fougue de ses jeunes années. Il doit continuer ainsi.

Les notes:

Thomas Domingo : 6

Après la honte internationale de son match face aux Irlandais (un plaquage raté à 1m de la ligne sur un ailier rachitique nommé McFadden) Placido nous a sorti un match correct, sans plus.

William Servat : 6,5

Son rendement habituel, solide en mêlée, de bons lancers, et surtout assez d’endurance pour éviter que Guilhem Guirado ne puisse jouer plus de 10 minutes. Ouf.

Nicolas Mas: 5

C’est bien beau de se la péter genre je suis le meilleur pilier du monde, mais sans vice il reste quoi ? Il avait beau être meilleur, il s’est trop souvent fait balader par des anglais plus roublards. Même pas une beigne lancée sous la mêlée pour se venger. Petit match.

Lionel Nallet: 6,5

S’est enfin coupé les cheveux. Bonne initiative.

Julien Pierre: 6

Toujours bon, jamais excellent, Julien Pierre c’est un peu un Nallet qui ne se serait pas coupé les cheveux.

Thierry Dusautoir: 6

Le capitaine a encore irradié la partie de son grand charisme de cadre commercial à Darty. A quand un capitaine qui met des fourchettes et des coups de boule, en bref un digne successeur de Fabien Pelous ? Quelques beaux plaquages. Sinon, bof.

Imanol Harinordquy: 6,5

Pas mal comme d’hab

Sebastien Chabal: 4

Aussi mobile que sa statue en cire derrière la mêlée. N’a même pas avancé et ses en-avants n’ont pas servi à grand chose puisque la mêlée française n’a pas vraiment été bonne.

Dimitri Yachivili: 4,5

Deux pénalités importantes ratées à la suite, un dégagement contré, une vitesse hors de propos: est mieux noté que Chabal car lui n’a pas de pellicules.

François Trinh-Duc: 5

Donald Duc a balancé des passes de maçon, tenté un drop foireux et raté un plaquage sur l’essai anglais. Bon, heureusement, il a défendu comme un bonhomme et Pierrot aime ça.

Vncent Clerc: 6,5

Gendre idéal nous a fait un vrai match de méchant en défense avec pas mal de gros plaquages et une belle activité pour combler les brèches. Par contre, en attaque, même Heymans est plus explosif que lui depuis sa blessure.

Yannick Jauzion: 5

Ni bon ni mauvais, comme depuis longtemps. En même temps, c’est lui ou les danseuses style Baby et Mermoz…

Aurélien Rougerie: 5,5

Sa mère était basketteuse professionnelle. Est-ce que cela explique qu’on ait l’impression qu’il joue sur un parquet à chaque fois qu’il essaye de défendre ? En attaque, c’est mieux mais pas top.

Yoann Huget: 4,5

Il est allé voir Black Swan cette semaine ce qui lui a permis de réaliser une belle chorégraphie de danse classique sur la passe interceptée d’Ahston. A part ça, il fait tout pour gagner sa place pour la Coupe du Monde, tout et surtout n’importe quoi. Le pire, c’est que Lapinou a tellement l’esprit de contradiction que ça va marcher.

Clément Poitrenaud: 0

Un en avant ridicule, des courses tranchantes comme le couteau de la dinette de ma nièce de 4 ans, l’impression qu’il fume une clope sur le bord du terrain à chaque fois qu’il devrait s’intercaler dans la ligne: du Poitrenaud habituel. Oui, je ne suis pas objectif. Préparez vous d’ailleurs à ce que Poitreval reçoive un 0 toutes les semaines, même quand il ne joue pas.

Les remplaçants:

Damien Traille

Une belle touche et un strike sur le cameraman, ça se salue. Nous a diverti une bonne quinzaine de minutes à la fin du match, car on se demandait avec les potes du pub à quel poste il avait bien pu rentrer ce coup-ci.

Morgan Parra:

Enfin un vrai demi de mêlée sur le terrain… je ne comprends toujours pas pourquoi on a critiqué son match contre l’Irlande. On a gagné non ?

Alexis Palisson:

L’impact player par excellence. Il n’a pas fait mal aux anglais, mais il a fait mal aux côtes de Pierrot qui a beaucoup rigolé sur les deux ballons qu’il a joué.

Guilhem Guirado:

N’a pas eu le temps de faire de conneries et signe ainsi son premier bon match avec le XV de France. Il est quand même sélectionné depuis 2008…

Sylvain Marconnet:

Pierrot adore se jouer la musique de la scène de la danse des hippopotames de Fantasia quand il arrive en trottinant sur le terrain. Plein de grâce. Solide pour ce qu’il a eu à faire.

Jerôme Thion:

Il joue encore en Equipe de France ? Ah, je savais pas.

Les anglais:

Je ne connais pas trop les joueurs anglais, je regarde seulement le Top 14 car Canal + me dit que c’est le meilleur championnat du monde. J’ai donc bien aimé Palmer, habituellement habillé comme une taffiolle avec le Stade Français, mais qui a retrouvé un peu de dignité en livrant un beau combat lors de ce match. Easter a été bon, ça faisait bizarre de voir un 8 soigner ses sorties de balles. J’ai également apprécié Mike Tindall, qui est bien parti pour réaliser son pari de ne faire aucune passe de tout le Tournoi. Un vrai bon joueur, solide et méchant, avec une grosse paire de bijoux de famille. (royale)

Le clodo qui a voulu me taxer une clope à la sortie du pub: 6

Son nombre de dents cassées. Y’a pas marqué « restos du coeur » sur mon front, la prochaine fois tu le sauras.

Pierrot.

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