Le très sérieux sujet du recrutement chez les – 11 ans.par Kig 16 September 2011 15 On accueille aujourd’hui une nouvelle nouvelle venue : Kig. Kig a la particularité d’être bretonne, ce qui fait donc immédiatement d’elle la nouvelle chouchoute d’Ovale Masqué. D’ailleurs, Kig, ça veut dire viande en breton, vous le saurez. Mais elle est aussi et surtout entraîneuse (elle préfère ce terme car éducatrice, c’est trop rigide… nous aimait bien, on l’imaginait avec des petites lunettes et tout, mais bon…) d’une équipe de rugby des – de 11 ans. Pour sa première sur le site, elle nous raconte donc son travail… et nous présente donc le genre d’individus qu’elle est amenée à rencontrer dans son quotidien. Et c’est pas banal. Mais on la laisse se présenter elle-même : Je suis Bretonne et en tant que telle j’aurais du aimer le foot et le cyclisme. Sauf qu’en tant que Bretonne j’ai également hérité du légendaire esprit de contradiction si bien que je me suis tournée vers le rugby. Mais comme le sport c’est fatigant et qu’il faut pas que déconner dans la vie j’ai décidé d’en faire faire aux autres. C’est comme ça que je me suis retrouvée il y a quelques temps déjà à encadrer en école de rugby, que ça me plait suffisamment pour continuer à investir dans des crampons et dans l’intégrale de Guy Cotten. Mes victimes de prédilection sont les -11 ans. C’est d’ailleurs en leur cherchant une recette qui tient au corps que je suis tombée sur la Boucherie Ovalie. Plusieurs cas de figures : Papa a fait du rugby… … ou “tu feras du rugby comme moi mon fils”. Là parfois ça passe, parfois ça casse dans le sens où on récupère des gamins qui accrochent, qui sont motivés ou alors l’opposé : des mômes qui viennent semi-contraints et forcés. Vous imaginez ceux que l’on préfère… Dans les cas où ça passe il faut se méfier du papa à fond dedans qui vient hurler sur les bords de terrain. Stop ! C’est MA prérogative et je ne veux aucune concurrence en la matière, surtout quand c’est pour uniquement se concentrer sur son fils. Je suis meilleure, je hurle sur tout le monde et plus fort que lui ! Junior mate avec papa tous les matchs à la télé, possède une collection incroyable de maillots et on doit souvent le calmer sur le terrain “ého, t’es pas à Canal + ici !” Dans les cas où ça casse, à nous de faire preuve de la plus grande diplomatie pour convaincre les parents, pardon le papa, que Junior il n’accroche pas trop, que c’est un môme sympa/gentil/intéressant mais que c’est flagrant que ce n’est pas sa cup of tea. On négocie un arrêt momentané en arguant que maintenant il connait un peu et sans doute reviendra-t-il au rugby plus tard. Sachant que plus tard avec un peu de bol Junior se sera affirmé et pourra décider/imposer son choix de sport “non je veux faire du taï chi”. Papa n’a pas fait de rugby, maman fait du taï chi et ils militent pour la non-violence. C’est la panique dans la famille, le stress, l’angoisse mais comme ce sont des parents modernes à l’écoute des désirs de leur enfant, ils accompagnent fébrilement Gandhi aux 1ers entraînements. Eux ils posent plein de question: “On trouve des armures à Décathlon ?” -> peut-être à celui du Puy-du-Fou mais ici la spécialité locale c’est le foot et le cyclisme alors… “Comment ça le casque et les protections d’épaules ne sont pas obligatoires *? Mais on peut si on veut ?” -> en bonhomme Michelin ils perdent en habilité/mobilité vous savez. “Vous conseillez plutôt l’hôpital Velpo ou la clinique ?”-> je connais pas bien le chemin d’ici. “Vous avez souvent des blessés ?” -> non “Graves ?” -> non plus. Eux au bout de 3 semaines où on leur rend Gandhi en entier + un grand sourire (“oué aujourd’hui j’en ai plaqué 3 c’était trop bien”) c’est réglé, ils se détendent et finissent souvent par accompagner lors des déplacements à s’occuper des bouteilles d’eau et du relaçage des chaussures. Il faut reconnaître que la présence d’une femme, qui plus est maman et qui au 1er abord à l’air saine d’esprit, rassure. Chuuut, ne leur dîtes pas tout de suite pour le coup de voir du slip ! Gandhi lui s’éclate, progresse, on n’a jamais de souci avec lui, il a compris qu’il valait mieux être discret, vu qu’on a déjà eu assez à faire à convaincre ses parents. “Le médecin a dit qu’il devait faire un peu de sport” Je vous présente Bouboule: le foot il n’a pas voulu, il faut courir, pis d’abord au foot quand ils l’ont vu arriver ils ont fermé la porte. Bouboule a un gabarit hors norme, il fait partie du pourcentage d’enfants en surpoids voire obèse. Des Bouboule y’en a 2 sortes: – ceux qui ont tellement souvent entendu “fais attention” qu’ils sont complètement annihilés sur le terrain: ils ne veulent pas toucher les autres de peur de leur faire mal. En général on arrive facilement à leur enlever cette peur et à profiter de leur gabarit, à les valoriser. Ils se décoincent, prennent confiance en eux et arrivent à s’affirmer. Pour une fois qu’ils arrivent à rentrer leur lard dans celui des autres… – puis il y a aussi ceux, comment dire, qu’on n’arrive pas à bouger. On a eu un beau spécimen l’an dernier et nous avons été durs avec lui : on lui à demandé de courir, à son rythme mais sans s’arrêter, de se rendre utile là où il voulait/pouvait, selon ses moyens, de lacer seul ses chaussures et en plus, quand il discutait avec tout le monde, on lui a demandé d’arrêter de déconcentrer les autres! Oui nous sommes ignobles. Mes collègues, qui ne le connaissent pas, me disent d’être patiente, qu’il se révèlera plus tard. Peut-être en vétéran ? Oui, l’espoir fait vivre… ** “Il a besoin de se dépenser” ou “Kévin descend immédiatement de cet arbre”. Lui c’est l’opposé de Bouboule, une centrale nucléaire à lui tout seul que même après qu’il t’ait cassé les pieds pendant 1h30 d’entraînement tu as de la compassion pour ses parents et tu culpabilises de le leur rendre ! ” Ca doit être bien quand il dort non ?” “Il s’arrête parfois ?” “Désolée, il n’a pas l’air fatigué”. En général Kévin est un excellent joueur, qui sait faire ses lacets seul, qui n’a peur de rien ni de personne même si la plupart du temps il est épais comme un bâton à sucette. Résultat : chaque entraînement et à fortiori chaque tournoi est une mise à rude épreuve des nerfs de son éduc’, une éventualité quasi certaine qu’on va finir aux urgences. Mais non, Kévin défie allégrement les lois de la résistance osseuse aux impacts. Kévin est incassable, jamais malade et toujours assidu. Les parents de Kévin adorent quand le club part 3 jours en vadrouille tournoi avec les “petits” et nous on trouve pas mal de rentrer et rendre Kévin à ses parents après 3 jours de tournoi… “Il ne restait que ça qu’il puisse faire…” Dans notre société actuelle où prévaut le système économique et le culte de la performance, les parents exigent du rendement de la part de leur progéniture qui est incitée dès son plus jeune âge à rejoindre l’élite. Mais voilà, entre les scouts, les cours de violoncelle et de karaté il ne restait que les horaires du rugby à rentrer dans l’emploi du temps. En fait si, le foot c’était possible aussi mais absolument inconcevâââble. Charles Hubert est bien élevé, il remercie quand il reçoit la balle, est attentif aux autres, il fait tout bien, surtout les lacets de ses petits camarades. Mais 2 problèmes apparaissent rapidement: – dès novembre Charles Hubert est sur les rotules mais est néanmoins consciencieusement conduit 2 fois par semaine à l’entraînement par sa maman car dit-elle “vous comprenez, il s’est engagé donc il doit assumer” – le crucifix qu’il porte autour du cou et qu’il ne veut sous aucun prétexte retirer. “Je comprends mais tu sais, accidentellement tu pourrais le planter dans le cœur d’un camarade, ça ferait un peu Hellfest non ?” Pour le club c’est un bon plan puisqu’il y a de fortes chances pour que les 5 autres frères soient licenciés dans les années à venir tandis que les sœurs iront grossir les rangs du cours de danse classique. Variante: “on l’a mis au rugby pour pas en faire une tafiole”. S’ils savaient ! “J’ai vu de la lumière …” “… Et vous êtes juste à côté du centre commercial”. Là c’est alerte maximale, tout le monde aux abois et sur le rond-point quand les terrains sont interdits ou qu’il n’y a pas entraînement suite à des gastros collectives d’éducateurs après une soirée cohésion. L’objectif étant d’empêcher le largage rapide et sournois de Louis par sa mère avant que cette dernière ne disparaisse pendant 2h30 dans le temple de la consommation. Louis aime bien le rugby c’est toujours le premier arrivé et le dernier parti … TOUS ces portraits s’inspirent de personnages réels, ayant existés et existant encore (je l’espère). Les prénoms ont néanmoins été changés. *Au club le protège dent est obligatoire. ** Bouboule a resigné pour l’année. Kig