Et si l’essai de Zirak avait été refusé…
par La Boucherie

  • 19 June 2015
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Avant toute chose, un petit avertissement. Non seulement le texte qui va suivre est long et ne comporte aucune image, mais en plus il a été écrit par le champion de l’aller-retour sur twitter, l’homme qui préfère voir l’ASM perdre plutôt que son club gagner, le grain de sable dans un plan bien huilé, un lecteur qui préfèrera rester caché derrière son écran (et on le comprend, le pauvre). Après l’avoir lu je me suis demandé si c’était un gros con ou un génie. Ou autre chose d’ailleurs, je n’ai probablement rien compris au texte. En tout cas c’est un cerveau perturbé. Mais en cette période de disette rugbystique et pour célébrer le doublé, nous nous sommes dit que ça vous intéresserait peut-être. Inutile de l’insulter dans les com’, ça lui ferait probablement plaisir. Voici donc l’uchronie “Et si l’essai de Zirak avait été refusé”.
 
 
 

La nature fait bien les choses : le Ying et le Yiang, le rouge et le noir, le pilou et le pilou, le whiskey et le coca.

L’Homme aime à les bouleverser : omettre les œufs de caille, confondre le sucre et le sel, bosser la vidéo quand on devrait être à la MUSCUUUU… L’histoire et la littérature regorgent profondément d’exemples.

En rugby, cette harmonie repose sur des choses simples et élémentaires : le melon des Toulousains (voir plus bas), la mauvaise foi des Toulonnais (voir plus bas), l’USAP en Top14 (voir plus bas… vous l’avez ?), l’ilétrizme des Castrais (en Castrais dans le texte), le speaker du Racing Metro et bien sûr l’incapacité de l’ASM à gagner des titres importants (« on a gagné la Mickey Cup », non mais respectez-vous : même Toulon et Toulouse ne s’y intéressent pas !).
Oui mais voilà.

Tout ce joyeux bordel fut chahuté un soir de 29 mai 2010 lorsque l’ASM Clermont Auvergne gagna le Brennus, ce titre en bois.

Nous connaissons la suite et le chaos que cela engendrât (dans ta gueule l’Aveyronnais que me lit sur son minitel) :
élimination du ST en H-Cup dès les poules, reversé dans la Piston Cup avec les Roumains, les Espagnols, les gitans et le Stade Français

échec du XV masculin ET féminin dans LEUR Coupe du Monde (en 2007 pour les hommes et pour les femmes, c’était la semaine où Twitter a beaucoup parlé du rugby féminin)

Doublé du RCT en 2013 et en 2014

C’est avec douceur, tendresse et délicatesse (et un plaisir certain) que je vais vous raconter une histoire.

L’histoire d’une aventure humaine, d’un groupe soudé dans l’adversité, bercé par le refrain quasi litanique de lendemains de fête qui se refusent à lui (GHB, c’est tricher).

ASM – RCT, 29 mai 2010, Saint-Etienne, stade Çabranle-Delmas, 69ème minute

Le nom du stade a été volontairement changé pour pouvoir placer ce jeu de mots subtil

Revenus à 3 points à la 63ème, Toulon est mené 15-12.

Dominés, mais combattifs, les varois résistent et collent au score, en attendant un éclair de génie du Chris Rédempteur, Sonny Bill Williams.

Quand soudain Geoffroy Guichard retient son souffle : Davit Zirakashvilli semble avoir aplati dans l’en but Toulonnais !
Monsieur Garcès demande l’arbitrage vidéo sur cette action :
« Y a-t-il une raison de refuser l’essai ? »

Une rumeur monte doucement dans les travées de Geoffroy de Canard. Je crois reconnaître les Toulonnais qui font entendre leur passion du verbe et de la métaphore appuyée, dans une imitation rudoyante et maladroite de Daniel Herrero.

Essai refusé ! On en reste à 15-12 pour l’équipe qui joue à domicile, mêlée à cinq mètres.

La physionomie du match change. Van Niekerk et Skeate insufflent l’inspiration qui manquait à cette équipe : de la rugosité, de la rigueur, du combat, de s’offrir à la loi du ballon ovale, de bouger à se faire mal de toi et d’obéir à ta voix, South Africa. Je danse pieds-nus sous un soleil rouge. Les dieux à genoux ont le cœur qui bouge.

Mais je m’égare.

Avec un doublé de Van Niekerk, non transformé par l’autre chibre anglais, le RCT vire en tête à 2 minutes de la fin sur le score de 15-22. Deux drops ratés de Brock James plus tard, le match est plié : TOULON EST EN FINALE DU TOP 14 ET EN FINALE D’UN MATCH QUI SE JOUE A MARSEILLE !
Les étoiles sont alignées (ça salive en Auvergne) pour que Toulon réalise le doublé inutile.
Finale de la Coupo Santo, qui se joue au Vélodrome de Marseille : RCT vs Cardiff Blues

Le saviez-tu ? le MAL est en fait la contraction de MouradboudjellAL

Focalisés sur le Brennus, PSA et Mourad décident de faire tourner pour cette coupe dont personne ne veut, à part le Stade Français.

C’est une poignée d’espoirs, tous bien français à t’en faire baver Guy Novès, qui défendra l’étendard français (drapé de rouge et noir).

Les touches et les combinaisons sont annoncées en provençal pour tromper les banlieusards de la perfide Albion.

Marseille devient capitale européenne avant l’heure : l’engouement autour du match est tel que Jérémy Sinzelle marque un essai !

Le public marseillais, plutôt rompu au sport de gentlemen pratiqué par des voyous, croit reconnaître Joey Starr au centre de la défense varoise. Il pousse comme un seul homme un chant improvisé qui donne à peu près :
Laisse pas trainer ton JIFF
Si t’veux pas qu’il finisse
Dans la cité du vice
Laisse pas trainer ton JIFF
Si t’veux pas qu’il croupisse
Sur le Banc d’Guy Novis

Toulon remporte le premier titre de son ère moderne et professionnelle !

Au micro de Mathieu Lartot, Mourad Boudjellal s’emporte quelque peu : « Je me suis régalé pendant 80 minutes, c’est simple, je me suis cru devant YouPorn tellement on pilonnait leurs avants par derrière. Garcès, c’est pas compliqué, il m’a donné un plaisir fou, suspect, presque sodomite ! » (il est des travers contre lesquels même le Ying et le Yang ne peuvent rien).

En commission disciplinaire extraordinaire improvisée dans les vestiaires du Vélodrome, le Président du RCT sera sanctionné de 130 jours de suspension pour une allusion à la notion de « sodomie arbitrale » qui porte « atteinte à l’image du rugby, à l’éthique et à la déontologie sportive ».

Pierre-Yves Revol aurait aussi rajouté que Monsieur Boudjellal a un effort d’intégration au sein du rugby français plus important que les autres présidents de clubs dans la mesure où il n’est ni issu du rugby, ni français.
Finale de Top 14 au Stade de France de Paris, en France : USAP vs RCT
Le duel David Marty vs Sonny Bill Williams tant attendu !
Les 1ers ex æquo se rencontrent.
Quelle saison !
Quelle demi-finale !
Quelle affiche de finale !

L’USAP remet en jeu son bouclier, avec une équipe plus expérimentée, moins néo-zélandaise.

Le RCT, déjà repu de sa coupe au bol (ils ont eu un peu de chatte d’aller la gratter avec leurs espoirs face aux Blues quand même), va verrouiller le jeu pour se reposer sur l’homme aux pieds dorés (Wilko, pas Tom May).
Le match est terne et ennuyeux.

A la mi-temps, les deux équipes retournent au vestiaire sur un triste et timide 6-3 en faveur des Catalans (si vous lisez attentivement ce score, vous verrez un message subliminal lancé au Puy-de-Dôme).

Wilkinson, pour un contrat pub Volvic (une idée de Mourad pour faire chier l’ASM), doit taper des pénalités en coin pendant la mi-temps, déguisé en bouteille géante. Il est à plus de 80% de réussite quand il glisse sur une rousquille sournoisement placée là par David Marty. Le stade, vide, retient son souffle : Sir Jonny Wilkinson s’est blessé !

Blessure non homologuée par la LNR (le joueur devant se trouver dans le vestiaire à la mi-temps et c’est aussi un bon moyen de rappeler à Moumou qui est le patron), PSA ne pourra procéder au remplacement de l’ange blond (My name’s Blond, Ange Blond).

Tom May glisse à l’ouverture (sans se blesser), le RCT est réduit à 14 sans avoir pris de carton, ni sang, ni or. Une première dans l’histoire de la sodomie arbitrale.
C’est un duel de buteur chiant que nous observons pendant les dernières longues 40 minutes. Porical étant particulièrement mauvais mais moins pire que Tom May, il arrive à enquiller un drop en voulant taper une chandelle.
9-3 pour l’USAP.

A la 79ème, Sonny Bill Williams va « renverser le cours du jeu » : une fougère dans la bouche, il s’empare du ballon, rafute Mermoz, crochète Tuilagi, enrhume Hume, résiste au placage de Mas, se défait de Guirado et se permet le luxe d’aller faire un selfie avec Ithurburu en tribunes (pluie de sperme en Catalogne à l’évocation de ces joueurs).

Au terme de cette course inutile de 180 mètres, il aplatit en coin (bien mieux que l’essai entre les poteaux pour les clichés dans le New Zealand Herald).
9-8, Tom May à la transformation.
Le stade retient son souffle.
Tom May aussi.
Sur la sirène, ça passe à côté (genre, vraiment loin à côté).

L’USAP est double championne de France en titre !

Seuls le Stade Toulousain, le Biarritz Olympique, le Stade Français, Bordeaux, le Lyon Olympique Universitaire, le Castres Olympique, Lourdes, Agen, Béziers et le Rugby Club Toulonnais ont réussi cet exploit avant eux.
Dingue, non ?
Eté 2010 : RCT, la migraine

« Un Sud-Africain vaut mieux que deux jeunes Varois » Dicton toulonnais

30 mai 2010. Putain de mois du muguet.

Mourad est revanchard : il va MUUUUUUSCLER son équipe. Il commence par dégager tous les jeunes victorieux de la Champion’s League une semaine plus tôt en les revendant au Stade Toulousain. Il se sépare ensuite de Sir Jonny broken Wilkinson.

« L’homme fort du RCT » va alors se lancer dans un recrutement ambitieux.

A défaut de pouvoir recruter les vrais 4 fantastiques, trop occupés par un probable reboot à Hollywood, Mourad se tourne vers le pays au long nuage blanc pour y solliciter les services de Dan Carter (en présentant le RCT comme le Rugby Collioures Tourism), Ma’a Nonu (pour marcher sur les traces de son cousin), Richie McCaw (le Titi Dusautoir BLANC !) et Israel Dagg (il a un nom rigolo, après tout).
Malgré ses ruses et son chéquier, aucun kiwi ne quittera l’île… La RWC 2011 (celle à vous faire gerber du Haka par les narines) est trop proche pour qu’un All Blacks, même mauvais, ne quitte sa fédé (sauf peut-être René Ranger du Risk).

Ce sera finalement les 4 fantastiques en carton, ceux du MHR, qui rejoindront la Rade.

Il a suffi de montrer les nouvelles installations et appareils de musculation à Picademimolle pour le faire signer. Fulgence est tombé sous le charme du projet du RCT en réalisant qu’il aurait peu de chance de jouer une finale de Top 14 avec le MHR avant de nombreuses années. François Trinh-Duc a suivi Fulgence. Julien Thomas, le dernier des fantastiques, étant une vaste imposture, sera finalement transféré au CO, alors que le RCT récupérera Sébastien Tillous-Borde (le MHR fera confiance à Eric Escande, jeune espoir prometteur, pour couvrir la mêlée).
Saisons 2010 à 2014 : ASM, ils ont du cœur ces auvergnats !

Alésia Sporting Montferrand

C’est un Aurélien Rougerie détendu et souriant qui nous reçoit en ce lendemain de finale de Top 14, le dimanche 1er juin 2014.

Le sacre de l’USAP de la veille n’aura pas alimenté beaucoup de suspense tant l’ASM a déjoué, malgré une saison régulière menée de main de maître™.

Bien sûr, il y a de l’amertume dans cette défaite. Bien sûr, il y a le sentiment d’injustice. Bien sûr, il y a le « déjà vu » comme disent les Anglais.

Mais Aurélien nous promet de revenir plus fort la saison prochaine. Le groupe semble un peu plus resserré, plus mûr peut-être.

Il ne faut pas se focaliser sur le nombre de finales perdues : quatorze, ça paraît beaucoup. Mais 14, c’est être au top, au sommet de son art, dominer son sujet !

Ce qui donne le sourire à ce Capitaine Courage, c’est la prolongation de Vern Cotter pour 5 saisons supplémentaires.
Consignes respectées par tous, rythme quasi militaire, discipline quasi fasciste, plans de jeu imprimés sur l’intérieur des maillots, puces électroniques greffées sous la peau, colliers électriques sur l’axe 8 / 9 / 10, soutien psychologique sur l’axe 9 / 10, GPS sur le 10 : certes, l’ASM des phases finales fait peu de cas des conventions et brise un peu les tabous du rugby moderne, mais on ne peut que saluer la machine de guerre, le casseur de statistiques, « le plus froid des monstres froids ».

Enfin, il serait anecdotique de rappeler qu’avec une invincibilité de plus de 50 matchs au Michelin, Clermont est bien armée pour réaliser une grande et belle saison 2014/2015. (note de la rédaction : ce texte a été écrit durant l’été 2014, bravo Doye Doye)

Un jour, un soir, l’ASM sera un grand champion.

Mais pas ce soir.

Cette soirée sans étoile révèle le crépuscule blême d’une éternité Auvergnate, au cœur d’une tragédie grecque. Brennos (Brennus pour les Romains), ce guerrier gaulois, se refuse à rejoindre l’Auvergne. Et quand il se décidera, la terre des volcans connaîtra Gergovie… Jusqu’à sombrer de nouveau à Alésia.

« Il est plus facile de prétendre détester l’ASM que de reconnaître la profonde admiration qu’elle suscite. » un philosophe varois anonyme