Compte-rendu de Lyon-Brive
par Damien Try

  • 28 February 2012
  • 14

Ce week-end, toute la France du rugby s’est passionnée pour les matchs du Tournoi des 6 Nations. Les matchs internationaux, les courses épiques, les triples sautées, à la Boucherie, on n’aime pas trop. La ProD2 ou la Fédérale, c’est plus rigolo. Rugueux comme on dit dans les journaux, mais c’est en dépit du sens de ce mot. Malheureusement, la ProD2 ça passe pas trop à la télé, ou alors sur des chaînes payantes, et je préfère m’acheter des bières plutôt que de payer un abonnement. Aller au stade n’en parlons pas, la buvette est loin et les bières sont trop chères. Voire sans alcool…
 
Heureusement, quelques équipes du Top14 nous proposent le jeu comme on l’aime, sur mes streamings préférés. J’ai donc pu regarder de la simili-ProD2 (23 minutes de temps de jeu effectif et 33 pénalités sifflées), par des équipes qui en ont le niveau, et dont une va bientôt la retrouver, en matant l’excellent Lyon-Brive vendredi soir.

 

Le contexte :

Match de la peur toussa toussa, Lyon doit impérativement gagner à la maison pour se replacer entre les 2 clubs basques, et une victoire sur un concurrent direct au maintien donnerait à Brive un bol d’air très apprécié. Le tournoi n’est pas un problème, pas d’internationaux signifie pas de doublons. Faudrait peut-être refiler le tuyau à Novès. Les deux équipes sont donc au complet (aux quelques blessés près), et on va pouvoir assister à un match très disputé entre deux équipes qui ont surligné cette date sur leur calendrier.

 

Le film du match :

Le ton est donné dès la 13ème seconde : le deuxième placage de la partie est administré scientifiquement par deux Lyonnais, visant tous les deux la pomme d’Adam. A la 45ème seconde, première altercation le long de la ligne de touche. Dire que c’est sous les yeux de l’arbitre-assistant est un léger euphémisme, puisqu’un ailier briviste marche presque sur les pieds du juge de touche pour mettre quelques pignes au premier centre Fatafehi, dont la devise pour ce match sera « un prêté pour 2 rendu ».

 M. Raynal laisse le jeu se poursuivre et ne pénalise personne. Il tentera bien de raisonner les joueurs plusieurs fois au cours de la rencontre, mais peine perdue, allez expliquer à un taureau en rut que la vache qu’on lui présente est stérile. Le match va donc prendre de la hauteur dégénérer, pour notre plus grand bonheur.

 
Deuxième échauffourée à la 6ème minute, lorsqu’après un en-avant de passe très discutable, Namy se fait chambrer, prend la mouche et repousse le pilier lyonnais. Un second ligne noir qui passait par là demande poliment si tout se passe bien entre les deux hommes, et Namy décide finalement que retourner dans son camp, c’est bien aussi. De manière générale, on verra ce genre de frictions après chaque maladresse ou faute, et il y en aura, puisque c’est un total de 30 mêlées qui seront jouées (en comptant celles rejouées). 30 mêlées à jouer, ça fait beaucoup, et comme on le verra le match sera très gros consommateur de premières lignes.

 
Le premier carton de la partie est tout à fait décevant, puisque résultant d’une faute dans un ruck du pilier Khinchagishvili. On s’endort un peu jusqu’à la 21ème et la sortie en sang de Cardinali, concassé dans une mêlée. Barnard le remplace alors, prêt à en découdre avec les Lyonnais. Ce qu’il fait 10 minutes plus tard, prenant part à une phase de combat farouche dans un ruck à la 31ème minute, avec un joli plongeon coude-épaule sur Leguizamon. Il est rappelé à l’ordre par l’arbitre, mais on en reste là.

 
Toujours est il que les esprits s’échauffent.
Pour la dernière action de la mi-temps (qui est aussi la première action), l’ailier Cooke file à l’essai, rattrapé à un mètre de la ligne par Leguizamon arrivant en biais. L’Argentin est condamné à l’exploit pour sauver l’essai, et réalise donc un geste technique superbe, un fulguro-poing en plein dans la mouille du malheureux Briviste. Celui-ci est assommé sur le coup, et laisse échapper le ballon dans l’en-but, qu’il ne peux donc pas aplatir.

 


 

Jouer avec un seul oeil ouvert, c’est plus dur.


 

L’arbitre salue son effort, et lui offre l’honneur du premier carton pour mauvais geste de la rencontre.

 
A la 45ème minute, après une n-ième mêlée qui finit avec la première ligne faisant la conversation aux lombrics, M. Raynal décide que trop c’est trop, et demande aux piliers de faire un effort. Ou sinon les remplaçants vont avoir l’occasion de montrer ce qu’ils savent faire. Cela n’est visiblement pas bien convaincant, et dès la 50ème et une nouvelle mêlée effondrer, il distribue équitablement deux cartons jaunes à Fiard et Barnard, pas rentré pour rien. Brive envoie pour le remplacer son meilleur élément en la personne du pilier Henn, le bien nommé.
La mêlée qui suit s’écroule encore une fois, et le match bascule.

 
Tout d’abord le comique Januarie (qui selon un spectateur bordelais « a un gros cul mais court vite ») joue un peu trop hâtivement le bras cassé, puis se replace derrière la mêlée pour jouer au bon endroit le bras cassé. Pendant ce temps, les premières lignes se relèvent et Henn explique au talon adverse Testa qu’il n’est pas à Lyon pour trier les lentilles ou enfiler des perles. Malheureusement pour lui, ce dernier est une vraie voiture de sport puisque Testa rossa le pilier remplaçant briviste. Henn se venge alors sur l’ailier lyonnais Mosese Ratanavou, un Fidjien qui tient de son prénom une connaissance parfaite des 10 Commandements, qui stipulent que « Tu ne tueras point », mais qui n’interdisent pas de tenter de plonger dans le coma à coups de poings son prochain.

 
Pendant ce temps-là, Testa est au sol avec Mignardi. Le centre tongien Fatafehi, tout aussi croyant, bien loin de l’action initialement mais qui souhaite communier avec ses coéquipiers, utilise son mètre quatre-vingt onze et ses 114kg pour multiplier les pains, sans toutefois tendre l’autre joue. Profitez de la vidéo, ce ne sont pas moins de 6 bonnes mandales qui sont distribuées à l’équipe adverse, plus toutes celles que la caméra a ratées…

 


Le verdict : rouge pour les deux déclencheurs de l’action, Testa et Henn. Ce dernier aura donc joué le temps de l’introduction en mêlée. Un ratio carton/minutes jouées tout à fait respectable.

 
Fatafehi n’est lui pas sanctionné. Comme il a une faim de LOU, il en redemande à la 54ème en bousculant largement en retard un Briviste qui a aplati dans l’en-but. Mais cela ne suffit visiblement pas, puisque pas plus tard qu’à la 55ème, il se distingue avec une percu monstrueuse sur l’ouvreur briviste, puis en se relevant et se battant avec le troisième ligne aile Bias. Ses efforts sont alors récompensés à leur juste valeur, et il récolte donc la biscotte tant attendue. Il remerciera son coach pour la confiance qu’il lui a accordée en le laissant sur le terrain, après tant de tentatives infructueuses de se faire expulser.

 
Barnard, de retour de son expulsion temporaire, est visiblement dégoutté d’avoir raté une générale qui lui tendait les bras. Il s’échauffe un peu, mais il est trop seul. L’esprit d’équipe se perd.

 
Un frisson passe dans le dos de tous les bouchers lorsque Caminati, titulaire indiscutable du XV du banc (des accusés) rentre sur le terrain. Mais celui-ci ne rentre que pour rater une pénalité dans ses cordes, avant d’en passer une autre plus facile.
Quelques amabilités sont échangées sur le coup de sifflet final, en guise de piqûre de rappel du thème qui aura été le fil rouge de ce magnifique match, une soirée de sport comme on aimerait en voir plus souvent !

 

PS : Ah oui au fait, Brive a gagné 22-9, mais ça on s’en fout un peu.