Le Rugby pour les très très nuls qui n’y connaissent rien #7
par Jonny WillKillSoon

  • 04 August 2011
  • 4

Tous à vos passeports ! Embarquement imminent ! Vous êtes tous les bienvenus pour soutenir les Bleus à l’autre bout de la planète, en Nouvelle-Zélande, en septembre prochain (et éventuellement octobre pour les plus optimistes). Je vois que vous emportez votre bikini. Grossière erreur Madame. Septembre dans l’hémisphère sud c’est la fin de l’hiver et le début du printemps. Oui voilà, la saison des pluies. C’est pas grave vous ne serez pas trop dépaysés puisqu’apparemment, on a aussi inversé les saisons en France. Personnellement je suis en train de vivre un deuxième hiver depuis un mois, c’est tip-top ! Pluie le matin, orage l’après-midi et froid polaire le soir. Vraiment de la merde en boîte ce temps, il y a pas à dire.

Mais le temps aidant
J’ai cultivé ma déprime
Au cachet d’aspirine
Et aux tonnes de calmants

Quand je m’ennuie, je deviens poète. J’aurais préféré avoir un autre don mais je fais avec. Et donc là, en ce moment je m’ennuie plutôt pas mal. Mon niveau d’ennui se situe entre « je visionne un match du CA Brive Corrèze pour pimenter ma soirée » et « réussir une partie de démineur en mode expert est mon climax hebdomadaire ». Je m’ennuie tellement que j’ai même réussi à m’enthousiasmer devant le Tour de France l’autre jour. C’est quand même un signe je trouve. C’est d’ailleurs en regardant le Tour que m’est venue l’idée du nouveau thème. On a vu les fondamentaux (les skills) et l’important travail des avants au Rugby mais c’est tout… pour le moment (oui je regarde un peu trop la télé aussi). Mais voilà, nos amis cyclistes m’ont rappelé entre deux siestes que sans l’attaque, la victoire est certes envisageable mais l’intérêt devient vite nul. Et j’imagine que vous n’allez pas faire 14h d’avion pour voir des chandelles et des pick & go à tout va. Et j’imagine aussi que vous n’avez pas compris ces deux derniers mots, alors je vous conseille d’être attentif à ce qui va suivre.

Chapitre VI : L’attaque du jet d’ail avant que Damien Try

Vous remarquerez au passage les titres de plus en plus foireux. Si cette situation vous fait de la peine, n’oubliez pas qu’il est possible de faire des dons. Ça finance nos ordonnances.

Trente lignes dans le vent plus tard : l’attaque ! Différentes possibilités d’attaquer : à la main avec les arrières et tous leurs subterfuges pour échapper aux défenses rugueuses, à la main avec les Avants afin de créer des points de fixation ou des brèches selon l’étendue de la pénétration (phrase ultra-tendancieuse à la relecture), au pied afin de jouer dans le dos de la défense et mettre la pression sur l’équipe adverse et enfin au pied mais cette fois de façon transversale afin de solliciter un joueur isolé en bord de touche à qui il ne restera plus que deux mètres à faire pour aller à dame.

Commençons par le jeu à la main des Arrières. L’attaque pure et propre faite de passes, décalages, esquives, sautées, feintes de passes et autres gestes techniques orgasmiques. Seulement cette version c’était à la genèse du Rugby. Depuis les agiles petites grenouilles se sont faites aussi grosses que les bovins de devant et le jeu d’arrière s’est transformé en un jeu stéréotypé d’auto-tamponneuses. Seules quelques équipes résistent à la tentation de virer du côté obscur des lignes arrières. Et parmi eux, le célèbre « jeu de mains, jeu de toulousains ». Donc déjà là c’est clair, si vous n’avez pas la nationalité toulousaine, que vous n’avez pas été baptisé dans la Garonne et que vous n’avez pas pris occitan en deuxième langue c’est mort. Vous êtes tristement condamné à :

a) devenir un Avant et ainsi rechercher, dans votre for intérieur, d’anciennes racines cannibales afin de subsister,

b) rester un joueur des lignes arrières anonyme pour le grand public et insélectionnable en équipe de France malgré toutes vos capacités. Vous finirez votre carrière triste et abandonné avec un jubilé qui ne méritera même pas un encart dans l’Equipe.

Mes propos ne sont pas tout à fait exacts puisque des joueurs comme David Marty et Damien Traille sont sélectionnés en EdF, alors qu’outre le fait de ne pas être toulousains, ils ne remplissent pas toutes les qualités de la « check-list des gestes techniques indispensable à un Avant néo-zélandais en Poussin 1ère année ». Liste qui comprend :

  • La chistéra : geste inventé par Dimitri Yachvili à l’intention de Benoît August (ou vice-versa) qui consiste à faire une passe dans le dos en balançant le bras d’avant en arrière. Cette expression fait allusion au geste effectué par les joueurs de pelote basque, justement munis d’une chistera (qui signifie en basque « petite corbeille »).
  • Le cadrage-débordement : en situation offensive de face à face, l’attaquant fixe généralement le défenseur par un cadrage-débordement. Le cad-déb c’est quand tout le monde regarde à droite et qu’au dernier moment vous allez à gauche (ou vice-versa).
  • Le raffut : Geste humiliant qui consiste à mettre sa petite mimine sur le visage ou le torse de son adversaire afin de le repousser et l’écarter de votre course. Ce geste se réalise en maintenant les boutons R1 et R2 enfoncés (ou vice-versa).
  • Pas de l’oie : Jeu de jambe inventé par l’australien David Campese (et encore jamais réalisé par un joueur de l’hémisphère nord) qui consiste à ralentir sa course puis à redémarrer brusquement en donnant une impulsion à sa jambe d’appui grâce à l’autre jambe. Ce geste permet de déstabiliser le défenseur mort de rire et de prendre une longueur d’avance sur lui.

Voilà pour les gestes classiques individuels. Il est également possible de faire la différence avec des gestes collectifs (passes sautées, redoublées, passe après contact…) mais là les noms parlent d’eux-mêmes.

Passons désormais au jeu à la main vu par les Avants. Au-delà de l’oxymore occasionnée par l’association des deux mots « main » et « Avant », cette version est plus basique car se résumant à, environ, une passe (et grosso modo 79% de risque de se finir par un en-avant). Le demi de mêlée extrait le ballon et lance dans l’intervalle un Avant qui, avec ou sans élan, va foncer dans le tas afin de gagner quelques précieux mètres et créer ainsi un point de fixation. Répété à outrance, cette séquence s’appelle pick & go. On parle alors de « série de pick & go » lorsqu’une équipe, proche de la ligne d’en-but, avance grâce à ce processus, centimètre par centimètre, dans le but d’inscrire un essai de raccroc (en règle générale, l’équipe qu’on supporte n’y arrive jamais et, au contraire, s’en prend une douzaine par saison). Ce système est aussi utilisé en fin de match pour conserver le bénéfice d’un bon résultat et s’assurer une fin de match houleuse.

Avant de passer au jeu au pied (la semaine prochaine), j’ai décidé de prendre mon courage à deux mains, une aspirine et de terminer en vous parlant de deux règles que les débutants comme vous ont du mal à comprendre : l’écran (ou passage à vide) et le contact.

« L’écran c’est quand on demande l’arbitrage vidéo ? ». Euh non, c’est drôle mais ce n’est pas ça. Il y a écran lorsqu’un joueur, généralement celui sacrifié à l’avant d’un maul, est délié de ses équipiers et fait donc office d’obstruction illégale car empêchant l’adversaire de plaquer le porteur du ballon. On utilise plus volontiers l’expression « passage à vide » lors des attaques réalisées par les lignes arrières, quand le leurre utilisé pour fixer la défense percute à vide (sans le ballon donc, puisque c’est un leurre) et donc neutralise complétement le défenseur qui ne peut plus découper le réel attaquant en possession du ballon. Mais généralement il se rattrape bien. D’ailleurs brin d’humour pour les initiés : il n’y pas de « voyage à vide » lors d’un « passage à vide ». Ah-ah, d’accord j’enchaîne.

Le contact, quant à lui, est sifflé lorsque le porteur du ballon percute un de ses propres équipiers situés devant lui. C’est souvent à la sortie d’une mêlée fermée quand le n°8 charge du mauvais côté et prend plein fer son propre demi de mêlée. Demi de mêlée qui, en plus de s’être pris 120kg dans le buffet, se fait engueuler par son 3ème ligne centre et se fait sanctionner par l’arbitre. Dans la série je tire sur l’ambulance et viole l’infirmière, sur cette action on atteint un bon niveau je trouve. Bref mêlée. L’écran et le passage à vide sont quant à eux sanctionnés d’une pénalité.
La semaine prochaine n’oubliez pas vos crampons car ça va dégager sévère, c’est Mr WillKillSoon en personne qui vous le dit.

En attendant la pluie s’est arrêtée, je vais pouvoir hululer tranquillement sous la lune. Hou-hou, hou-hou. Si vous aussi vous aimez hululer, n’oubliez pas de liker la fanpage de la Boucherie Ovalie sur Facebook, ou de nous suivre sur Twitter. Le rapport ? Aucun, c’est Ovale Masqué qui m’a obligé à rajouter ce passage.

Jonnny WillKillSoon