Vern Crotteur a (plus ou moins) regardé la finale du Top14 pour vous
par Vern Crotteur

  • 07 June 2011
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Salut les Frenchies,

Bon ben, ça y est, c’est fait … Emballé, c’est pesé ! Le Manchester United du rugby européen a encore frappé ! 18e titre pour les divas de la Garonne, 11e finale pour leur chef de secte. Y a de quoi bouffer sa casquette ! Et c’est d’ailleurs ce que j’ai fait samedi soir, devant mon écran de télé.

Je m’étais pourtant juré de ne pas regarder le match. Encore trop douloureuse la déconvenue de la semaine précédente. Mais finalement, j’ai craqué… Les enfants étaient au lit et ma femme était occupée à laver à la main mon tee-shirt encroûté du vomi de la semaine dernière. Bref, j’avais rien de mieux à faire, vu que les autres chaînes passaient que de la merde et que mon émission préférée, celle avec Laurent Ruquier et sa bande de tarlouzes, ne commence que bien plus tard …

J’ai quand même hésité un moment entre la finale et un documentaire que diffusait ARTE, sur un obscur photographe austro-danois de l’entre-deux-guerres. Le gars s’était apparemment suicidé à la vodka… L’espace de quelques instants, je me suis senti proche de cet homme. Oh bien sûr, pas pour son amour de l’art, moi à part les clichés du Merdol qui me montrent en gros plan, j’en ai rien à cirer de la photo. Mais je me suis senti une certaine parenté d’âme avec ce goût immodéré des alcools – forts – et j’ai débouché illico une vieille bouteille d’armagnac, cadeau d’Eric Péchu, tout en changeant de chaîne.

Premier avantage d’avoir Montpellier en finale, t’es pas obligé d’écouter les commentaires à la con de Galthié. Faut dire que je supporte plus de l’entendre à la télé… Mon pote Guy a bien fait de lui remettre les pendules à l’heure dans une interview. Galthié passe tellement bien à l’écran qu’on a parfois l’impression de voir la huitième merveille du monde. Non mais, il se prend pour qui, ce type ? Combien de titres à son actif, hein ? Bon, moi j’en ai qu’un, c’est vrai, mais tout de même quatre finales d’affilée. Et puis, meilleur entraîneur (adjoint) du Super 15, je ne le répète jamais assez… Deuxième avantage d’avoir Montpellier en finale, tu sais que les commentateurs, même quand c’est pas Galthié au micro, vont prendre parti pour le petit poucet du TOP 14, face à l’ogre du rugby européen.

Je m’installe donc confortablement sur mon canapé clic-clac, en remplissant de nouveau généreusement ma chope de cet excellent armagnac et je commence à regarder le match. Au bout d’une petite demi-heure, je me réveille en sursaut… Merde, j’ai presque tout raté de la première mi-temps !! Affolé, je regarde le score. 0-0 au bout de 27 minutes ??? Je me dis que j’ai déjà poussé un peu trop sur l’armagnac et je me frotte les yeux. Non, c’est bien ça. 0-0.

Du coup, je me gratte la tête en me disant que si c’est pour jouer comme ça, mon équipe de volcans éteints avait largement sa place en finale ! J’essaie de me concentrer sur le match sans cligner de l’œil et je me rends compte qu’on n’est vraiment pas parti pour une rencontre de gala. Pas de feu d’artifice d’essais, pas même de rugby de mouvement, avec des lancements à la chorégraphie parfaite, comme les affectionnent tant les ballerines toulousaines.

Puis, tout d’un coup, comme un diable surgi de sa boîte, l’ailier montpelliérain dont je me souviens jamais du nom… À quoi bon d’ailleurs, on le reconnaît si bien avec ses cheveux fluo… voilà que ledit ailier nous sort un petit coup pied par-dessus, le rate à moitié, mais finit par récupérer le ballon et plante l’essai sous les perches toulousaines.

Je me ressers immédiatement un fond d’armagnac et je me frotte les mains. Finalement, ces petits montpelliérains, à qui on promettait un passage à l’abattoir, ne s’en sortent pas si mal. Au bord du terrain, Guy a l’air inquiet et, en le voyant, je me fends la poire, un peu malgré moi. Au bout de quelques minutes, je finis cependant par me rendormir, allez savoir pourquoi… Finalement, je me réveille de nouveau en fin de match. Douche froide en voyant cette fois le score !! Putaaain, nooon… 15-10 pour Toulouse. Ils l’on fait ces cons ! J’ouvre aussitôt une deuxième bouteille d’armagnac, la première étant déjà vide, pour une raison qui m’échappe, et j’essaie de noyer mon chagrin et ma déception dans cette boisson rafraîchissante.

La suite des images ressemble à du déjà vu, avec Toulouse au 7e ciel, et Montpellier au 5e sous-sol. Seul truc qui fait bizarre, Jean-Ba ne porte plus le maillot de l’équipe, mais un horrible polo Jeanne Mas … en rouge et noir. A part ça, il a toujours sa gueule de petit écolier, premier de la classe, et semble content de lui-même, comme à son habitude. Guy lui, est ému, la larme à l’œil, mais il garde son quant à soi, façon Sir Alec Ferguson. Sans doute qu’il pense déjà à ce qu’il va pouvoir me balancer pour m’en mettre plein la vue, lors d’une prochaine partie de chasse… Même Dusautoir, capitaine courage de l’équipe de France, a l’air heureux. Ça lui change vraiment de sa tête de chien battu lorsqu’il joue avec le maillot frappé du coq.

Il n’y a que Skrela qui tire un peu la tronche. Moi qui ai raté le match, je me demande évidemment pourquoi. Jusqu’à ce que l’un des commentateurs anonymes et sans intérêt lâche que le fils du DTN a manqué cinq pénalités. En entendant ça, j’avale ma gorgée d’armagnac de travers. Je me ressers aussitôt et je me dis que, putain, 15 points laissés en route face à des novices du TOP 14, ça fait beaucoup quand même. Encore un choix judicieux du petit Marco dans la perspective de la coupe du monde…

Dans le camp héraultais, c’est la consternation. Montpellier est passé si près, et pourtant si loin. Durant mes quelques phases d’éveil, je dois avouer que je les ai surtout vu défendre, même s’ils l’ont bien fait. Mention particulièrement honorable à Gorgodze, auquel Hollywood ne devrait pas tarder à proposer le rôle-titre dans un prochain remake de Godzilla… Pour le reste, les internationaux Donald Duc et OuéOué, ou DraDra pour les intimes, ne sont pas passés à côté, mais n’ont pas spécialement brillé non plus. Au moins, ils n’ont pas raté 15 points ! Et j’imagine que Marco, tapi dans dans sa tanière, doit se dire qu’il a fait un excellent choix en les prenant dans sa liste des 30, pardon des 32.

Seule consolation de voir Montpellier défait, on ne nous repasse pas – pour la énième fois – la tête de Galthié, les cheveux en pétard et les yeux embués de larmes, façon chiot abandonné. Ouf que je me dis en me servant encore un fond d’armagnac, on va nous épargner ça, au moins…

Je continue à regarder les images du triomphe toulousain, en pensant avec un certain sentiment d’injustice que c’est les miens qui devraient le tenir le bouclier. Après tout, le meilleur entraîneur du TOP 14, c’est moi, si je ne m’abuse ??!! La nostalgie de la finale de l’an passé me saisit quelques instants, avant que je ne me rende compte avec stupeur que la deuxième bouteille d’armagnac est vide elle aussi. Mais qu’est-ce qui se passe ici, bordel ? Les bouteilles sont fendues ou quoi ??

Je veux descendre à la cave pour en chercher une autre, mais je me prends les pieds dans le tapis et je me fracasse contre la table basse en chêne de Ranganui, que je trimballe avec moi dans chaque club que j’entraîne… Finalement, je reprends connaissance une heure plus tard, ce qui n’est pas plus mal, car il n’y a plus de Toulousains à l’écran. Je parviens à me hisser sur mon canapé. Tant pis, plus le temps de descendre à la cave, Ruquier va bientôt commencer…