David Mélé passe sur le grill
par Damien Try

  • 10 May 2016
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David Mélé a accepté de nous rencontrer : il nous aime bien et se permet de dire “PICA MUSCU” à Louis Picamoles tous les jours à l’entraînement. Ovale Masqué et Damien Try ont donc posé quelques questions au plus CATALAN des Toulousains, un joueur qui a connu DAN à Perpignan avant d’être un des seuls Français d’Angleterre, un oiseau rare donc comme on dit à l’USAP.

 

Nous avons beaucoup de CATALANS parmi nos lecteurs – enfin, ce sont eux qui parlent le plus fort en tout cas – et ils gardent un très bon souvenir de ton passage à Perpignan. Pour commencer, on va donc pas mal parler de l’USAP. Est-ce que c’est un club toujours cher à ton coeur ?

 

Ouais bien sûr, c’est le club où j’ai commencé, où vraiment on m’a donné ma chance de montrer que je pouvais embrasser une carrière de rugbyman. On était une bande de copains à jouer pour le même maillot, et c’est ce qui a fait qu’on a créé plein de liens… on était au centre de formation là-bas, et porter le maillot de l’équipe première c’était énorme pour nous. Donc voilà, je suis toujours les résultats même si en ce moment, c’est pas terrible.

 

D’ailleurs, le club est passé du Brennus à la Pro D2 en quelques saisons, un début d’explication ?

 

Je pense qu’après le titre la politique du club a changé. Ils ont un peu essayé de détruire l’identité catalane qui avait fait notre force pendant plusieurs années, en recrutant des joueurs d’un peu partout. Sans cette identité, je pense que l’USAP c’est pas vraiment l’USAP. Le public se reconnait moins dans le club aujourd’hui, il n’y a plus beaucoup de Catalans… l’année où on est champions, je crois que sur les 23 on était 15 à sortir du club (9 en fait, mais c’est déjà pas mal, NDLR). Du coup, il y a moins de monde au stade, moins de résultats, et maintenant l’USAP est en Pro D2. C’est triste, mais c’est comme ça malheureusement.

 

Le Brennus 2009, ça reste ton meilleur souvenir rugbystique ?

 

Ah oui ! Ben comme je disais, on a gagné avec une bande de copains. Avec Guirado, Porical, Perez, on a commencé en Crabos tous ensemble… pouvoir jouer en Top 14 ensemble c’était déjà énorme, mais gravir les échelons et finir au Stade de France, on l’imaginait même pas ! Et du coup, gagner le Brennus… tous les joueurs de rugby en rêvent, et nous on l’a fait à quoi, 22-23 ans. Oui, je pense que ça reste mon plus grand souvenir rugbystique.

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Pour les plus jeunes, ceci n’est pas un photoshop. 

 

Et parmi cette bande de copains, il y avait un extraterrestre, Dan Carter. On a souvent parlé de l’influence de Dan Carter dans la conquête du Bouclier, alors qu’il était pourtant blessé. C’est vrai ?

 

Oui, oui oui. Quand il était valide, évidemment c’était plus direct, parce qu’il montrait plein de choses sur le terrain. Mais même blessé, il était tout le temps avec nous, il s’est vachement impliqué dans le groupe, les entraînements. On avait un groupe jeune et il nous a beaucoup conseillés, au pied notamment, Jérôme Porical, moi… même Adrien Planté qui jouait à l’aile, donc pas du tout le même poste que lui, il le conseillait sur son placement. Il nous a apporté quelque chose qu’on avait pas forcément, c’est à dire un peu de rigueur, cette attention donnée aux détails qu’il y a chez les Blacks. Il nous a fait découvrir un autre aspect du rugby. Donc même s’il a joué que 5 matchs, j’ai eu l’impression qu’il était là toute la saison.

 

Toi cette saison-là tu avais pas mal dépanné en 10, il t’a appris des choses ?

 

Tout le temps ! Tout le temps. Il était derrière moi pour me dire « ce serait mieux que tu fasses comme ça ». Il connaissait tous les détails sur le ballon, savait où le taper exactement, il m’a transmis ça et c’est juste énorme. Quand j’appliquais ce qu’il me disait, bizarrement ça marchait ! Donc oui, il m’a vachement aidé cette saison-là.

 

En 2009 justement, à Mayol, tu as un petit fait de gloire, je suppose que tu vois de quoi on parle ?

 

Ah oui. Ça, je le classe deuxième dans mes souvenirs rugbystiques, parce que Mayol c’est Mayol. C’était pas encore le Toulon de maintenant avec tous ses titres, mais il y avait quand même Tana Umaga, ça devenait une grossie écurie. Donc gagner comme ça, à la 81ème, avec un drop sorti de nulle part, parce que personne s’y attendait – même pas moi je crois – ça reste un souvenir inoubliable.

Qu’est-ce qu’il t’est passé par la tête pour décider de le tenter de cet endroit du terrain ?

 

Ben j’avais 23 ans… l’insouciance ! Je me suis dit au pire il passe pas, on fait match nul, on s’attendait même pas à ce résultat donc je me suis pas posé trop de questions. C’est passé, tant mieux pour moi, ça reste gravé dans ma mémoire.

 

Du coup en 2015, tu crois que Carter s’est inspiré de toi quand il a claqué son drop en finale de Coupe du monde ?

 

(rires) Je pense quand même ! Je sais même pas s’il se rappelle de moi. Après il y a le faire à Mayol et le faire en finale de Coupe du monde… Dan, c’est la classe. En plus quand il frappe celui-là, il reçoit le ballon il s’y attend pas, la défense est près, et de 40 mètres, boum… c’est pas pour rien que c’est le plus grand joueur du monde.

 

En parlant de plus grand joueur du monde, on est obligés d’en parler puisqu’il vient d’annoncer sa retraite. Parle-nous du grand David Marty. As-tu des anecdotes sur cette légende ? Est-ce un privilège d’avoir joué à ses côtés ?

 

Ah vous l’aimez bien David, hein ? (rires).

 

Tu ne l’as pas cité dans la bande de copains tout à l’heure, vous n’étiez pas proches ?

 

Il est un peu plus vieux, il a commencé avant nous, mais David… il a ses défauts et ses qualités, il est un peu bourru, un peu rustre, peut-être que techniquement c’était pas le meilleur joueur que j’ai connu, mais après dans l’état d’esprit, le mental, il y en a pas beaucoup qui lui arrivent à la cheville. Il a ses petits exploits comme à Toulon il y a 3 ans où il fait un beau vol plané par dessus le ruck, tout le monde s’en rappellera de celle-là ! Après voilà, c’est un homme dur, humainement aussi, parce qu’il te laisse pas facilement rentrer dans son cercle d’amis, mais une fois qu’il a appris à t’apprécier, c’est un mec en or.

 

D’ailleurs, Marty s’est un peu fait pousser vers la sortie cette saison. Tu nous parlais de la politique du club tout à l’heure, qu’est-ce que tu penses de ça ? Sachant que Mas avait été évincé lui aussi, que Perez va peut-être l’être…

 

Ben c’est moche, des mecs qui ont servi le club comme ça pendant des années, et qui ont tout donné pour ce maillot… je pense qu’on a un peu oublié l’aspect humain. C’est dommage de finir comme ça. Après David, je pense qu’il en avait un peu marre du rugby aussi et qu’il avait besoin d’arrêter. Mais ils n’ont rien fait pour le retenir et c’est dommage. Il y a eu plein d’autres situations comme ça, avec Guirado, Mas, Planté, moi… je pense qu’on aurait tous aimé rester mais on nous a plus poussé vers la sortie que tendu les bras. Le rugby est comme ça maintenant. C’est triste mais il y a de moins en moins de valeurs.

 

À Toulouse c’est un peu pareil en ce moment, avec Poitrenaud, Clerc…

 

Là aussi, c’est l’image du club. Ce sont des mecs qui ont tout gagné à Toulouse. Vincent Clerc il fait quand même une saison plus que bonne, il marque des essais importants. Mais le club se positionne pas, ils disent « on verra, on attend »… enfin c’est le rugby d’aujourd’hui qui veut ça.

 

À Grenoble où tu vas signer il y a aussi le cas Jonathan Best, bon même si on est en dehors du truc et qu’on ne sait pas trop quelles sont les raisons de sa mise à l’écart…

 

Ouais, là aussi je suis mal placé pour en parler. Mais j’ai l’impression que tous les clubs procèdent de la même façon maintenant. J’ai l’impression que le côté humain est mis de côté au profit de l’aspect professionnalisme, résultats, et voilà les mecs qui ont servi un club pendant 10 ans on les laisse partir, on leur offre un maillot pour qu’ils soient contents et c’est bien dommage.

 

Pour finir là-dessus, tu aimerais retourner à l’USAP un jour malgré les conditions de ton départ ?

 

Avant de signer à Grenoble, j’avais offert mes services. Je leur ai dit que s’ils cherchaient un demi de mêlée, j’étais vraiment chaud pour revenir. Là encore on m’a dit « ouais peut-être, si ou ça… »… peut-être qu’ils ne recherchaient pas de joueur à ce poste, ou qu’ils me voulaient pas, donc je comprends aussi. Moi je m’y serais bien vu l’année prochaine et terminer là-bas, je ferme pas la porte.

 

Après Perpignan, tu es parti en Angleterre, ce qui est devenu super rare pour un joueur français. Du coup comment est-ce que tu t’es retrouvé à Leicester ? Ce sont eux qui t’ont contacté ?

 

Pour moi c’était un rêve de gosse. Je sais pas pourquoi, je sais pas d’où ça m’est venu, mais depuis tout petit j’adore l’Angleterre, la façon de jouer – ça peut paraître bizarre mais c’est vrai. L’USAP m’avait dit très tôt qu’ils ne voulaient pas me prolonger, du coup j’ai dit à mon agent de prospecter un peu partout, et Richard Cockerill l’a contacté pour lui faire part de son intérêt. Moi j’ai foncé, parce que j’en rêvais, et j’ai vraiment passé deux ans top. Je regrette presque d’être parti de là-bas parce que je me régalais.

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David Mélé, à l’époque où les Tigers étaient le club sportif le plus connu de Leicester.

 

Les joueurs français qui sont allés en Premiership racontent souvent la même chose : que là-bas, on est beaucoup plus exigeants niveau entraînement, préparation physique, etc.

 

Ah oui, à 200%. C’est ce qui m’a fait bizarre quand je suis rentré en France et que je suis venu à Toulouse. J’avais l’habitude de travailler d’une certaine façon à Perpignan, proche de tout ce qui se fait en France, mais après avoir connu l’Angleterre où c’est tous les jours à fond, où on se pèle vraiment pour avoir sa place sur le terrain, j’ai presque eu du mal à me réadapter à un système où tu es peut-être presque trop responsabilisé. En Angleterre pendant deux ans pendant chaque séance de physique, de muscu, il y avait un préparateur physique avec moi qui s’occupait de moi tout le temps. Sur le terrain tout était très encadré. Je n’ai pas retrouvé ça ici, déjà parce qu’il y a moins de staff, et une manière différente de voir les choses. J’adhérais plus à la façon de fonctionner à l’anglaise. Il y a pas de secret, plus on bosse, plus on est performant, là-bas leur objectif est de tirer le meilleur du joueur et ça passe par là.

 

En France on a souvent cette image de branleurs, comment ça se fait ? C’est culturel ?

 

Ouais, je pense. C’est pas que dans le rugby d’ailleurs, c’est en général. Quand je suis arrivé en Angleterre j’avais déjà parlé de ça dans un article de presse, il était ressorti dans le Rugbynistère et je m’étais fait un peu critiquer car on m’accusait de cracher dans la soupe. Mais si je dois le redire, je le redis, en France on a des habitudes de fainéants. Et même à Toulouse je le vois encore, il y a des mecs quand on leur demande d’en faire plus, eux ils pensent qu’ils sont bien comme ça, ils cherchent pas plus. C’est une mentalité différente. C’est dommage car quand t’en fais plus, c’est pas forcément pour le club, les coéquipiers, c’est pour toi. Si dans ta tête t’as pas envie de progresser et de voir jusqu’où tu peux aller, c’est ton problème. C’est dommage.

 

Il parait qu’en Angleterre, les internationaux se doivent d’être exemplaires, qu’ils viennent encore plus tôt à l’entraînement, qu’ils poussent encore plus à la muscu ? C’est pas comme ça en France ? Il parait même que c’est l’inverse…

 

Oui c’est vrai. Mais le problème c’est que c’est souvent le staff qui leur dit de moins en faire, qui cherche à les préserver car ce sont des joueurs importants. Alors qu’en Angleterre, par exemple il y a Tom Youngs qui a je sais pas combien de sélections avec le XV de la Rose, qui venait tous les matins, tous les jours, pour pousser de la fonte comme un abruti… c’était sa routine. Sur ce point là c’est vraiment différent oui.

 

Est-ce que c’est vrai que tu as récupéré le casier de Julien Dupuy à Welford Road, et qu’il y avait encore une cartouche de Marlboro dedans ?

 

(rires) Il y en avait trois ou quatre même ! Enfin il y a une particularité en Angleterre, c’est qu’il y a pas de casiers. Il y a un banc en bois, un crochet, et basta. C’est un peu rustre, mais c’est ce qui caractérise un peu le rugby anglais : pas de superflu, pas de banquette en cuir, pas de portes avec des digicodes partout… c’est le strict minimum. À la muscu pareil, tu n’as pas de super appareils qui sont sortis il y a une semaine, juste ce qu’il faut, l’essentiel. Ça permet aussi de garder ces valeurs à l’ancienne et je trouve ça bien.

 

Tu parlais de la différence dans l’entraînement entre les deux pays, du coup, ton adaptation a été rapide ou tu as un peu galéré ?

 

J’ai pas vraiment eu de mal, mais c’est une habitude à prendre. Les entraînements sont très intenses le matin, il y a une pause d’une heure où on mange tous ensemble, et tout de suite à 13h on reprend l’entraînement. Alors qu’en France on s’entrainait le matin, on arrêtait à 11h, la pause repas était un peu plus longue, on faisait une sieste, on reprenait à 4h… donc voilà, il a fallu s’habituer. Par exemple juste après manger on est souvent un peu fatigués, là on allait s’entraîner… donc c’est différent, mais j’ai pas mis trop de temps à m’adapter.

 

Tout à l’heure on t’a parlé de Mayol, tu as tout de suite trouvé de quel match on parlait. Si on te dit, 2014, Bath, ça t’évoque quelque chose ?

 

Ouais ! (rires)

 

Tu rentres en jeu et tu prends un carton rouge 3 minutes plus tard… C’était un hommage à Jean-Pierre Perez ?

 

(rires) Oui je voulais apparaître avec lui au palmarès des Français à avoir pris des cartons rouges ! Ouais, je suis passé en commission, j’ai pas trop compris leur délire… enfin je comprends pourquoi je prends le rouge, c’était un peu idiot de ma part de réagir comme ça, mais je pense que c’est un peu mon côté catalan qui est ressorti !

 

Un joli côté CATALAN
Un joli côté CATALAN

 

Merci, ça fera une belle phrase de une pour l’article ! Tout à l’heure tu disais qu’à Perpignan vous étiez une vraie bande de potes, tu as retrouvé ça à Leicester ? Tu t’entendais bien avec quels joueurs ?

 

Ouais, de suite. ils m’ont vraiment bien accueilli. Quand je parlais de l’Angleterre avant mon départ, on me disait tu verras, les Anglais ils sont rudes, tout ça. Mais quand ils ont vu un petit Français arriver, ils étaient les plus heureux. Ils m’ont accueilli comme si j’étais de chez eux. Je me suis fait de très très bons potes, dont Ben Youngs, avec qui j’étais proche parce que l’on jouait au même poste et qu’on bossait souvent ensemble. Y’a lui, y’a Adam Thompstone qui joue à l’aile, Ed Slater qui était capitaine l’année dernière, Matt Smith qui a fait toute sa carrière à Leicester et en qui je me reconnaissais un peu par rapport à mon parcours à l’USAP. Ma dernière semaine là-bas, ma femme était déjà partie, j’ai vécu chez lui, c’était vraiment au top. J’ai gardé de très bons amis là-bas et on s’envoie encore des messages régulièrement.

 

Là-bas tu as aussi côtoyé Manu Tuilagi. Il parait que Yann David est 100 fois plus fort que lui au développé-couché, c’est vrai ?

 

J’ai jamais vu Yann David au développé-couché !

 

Ah bon ?

 

Non, je crois que s’il travaille trop, il gonfle trop parce qu’il est trop costaud. C’est un animal Yann David, il emporte tout le monde ! Mais Manu c’est pareil, je l’ai vu faire des séries à 190, il poussait tranquillement… j’ai connu son frère Henry qui s’amusait aussi avec des barres à 150 kilos. C’est des forces de la nature ces mecs. Je crois que je vais aller faire un enfant dans les îles là-bas, il va grandir comme eux et il va tuer tout le monde…

 

Après avoir joué avec Dan Carter, tu aurais pu évoluer avec un autre légende chez les Tigers : Andy Goode. Malheureusement, il avait déjà quitté le club à ton arrivée. Est-ce un regret ?

 

Ouais ! C’est un regret surtout parce que j’aurais pu avoir quelques conseils capillaires. Il a dégaine merveilleuse. Le combo chauve-cheveux longs c’est quand même rare.

 

Enfin ça évolue, là je ne sais pas si tu as vu mais ça a repoussé…

 

Ouais, par l’opération du Saint-Esprit ! Bizarre hein ? Mais pour en parler sérieusement, là-bas à Leicester, ils vouent un culte à ce mec. Il a toujours le record de points des Tigers je crois. Chez eux c’est un Dieu presque. Au pied, c’est un métronome… après il est quand même adepte de la air-défense.

 

À son retour à Newcastle ils ont même adapté des systèmes pour lui pour qu’il ne défende jamais dans la ligne.

 

C’est bien pensé ! Quand tu sais qu’il sera ciblé tout le match, autant l’enlever de là. Après, au pied, il va te faire du bien !

 

Tu as parlé de ta relation avec Ben Youngs, la première année tu as pas mal joué, tu as gratté du temps de jeu. On t’a un peu moins vu la deuxième année. C’est pour ça que tu as décidé de partir ?

 

Oui, c’est ça. À partir de fin-décembre début-janvier, après un match contre les Wasps, on m’a dit « maintenant on donne sa chance au N°3 » et je n’ai pas trop compris. Après j’ai rejoué en Coupe anglo-galloise, ça s’est très bien passé et on est arrivés en demi-finale. Sur le moment, ouais, j’ai pas trop compris pourquoi j’étais en tribunes. Quand j’ai demandé à partir, Richard Cockerill m’a avoué à demi-mots que le 3ème demi de mêlée était un Anglais, et qu’il avait plus de raisons de le faire jouer lui, pour le faire progresser. Là-bas, ils font tout pour l’équipe nationale, après s’il est sélectionné ils ont des subventions de la ligue, donc voilà… c’est dommage car je me régalais.

 

C’était Sam Harrison ce 9, c’est ça ? Il est pas mauvais non plus (vice-champion du monde avec les -20 ans en 2010 notamment, NDLR).

 

Oui ! C’est un très bon joueur, en plus il est du club. Si on me l’avait dit de suite j’aurais compris et je n’aurais pas eu cette frustration, ça a surtout été dur de pas avoir d’explications. Je suppose aussi qu’ils voulaient me garder impliqué en cas de blessures d’un des deux, même si je n’ai pas trop besoin de ça pour me motiver – comme à Toulouse où je m’entraine tous les jours comme si j’allais être titulaire alors que j’ai fait dix feuilles de match.

 

Du coup tu ne vas pas partir à Las Vegas pendant que tes coéquipiers ont match ?

 

Avec Castro ? Non c’est pas prévu ! Puis je ne pense pas avoir les mêmes finances que lui, donc j’éviterai de le faire…

 

De manière générale, qu’est-ce que tu retiens de ton passage en Angleterre ?

 

C’était un rêve de gosse, je suis très heureux de l’avoir fait. Déçu d’être parti car il me restait deux ans de contrat et même si je jouais moins, je vois que cette année avec l’arrivée d’Aaron Mauger ça tourne plus, donc je pense que j’aurais été dans la rotation. Mais voilà, je regrette pas non plus d’être venu au Stade Toulousain, c’est une bonne expérience.

 

Tu n’avais pas de contacts avec d’autres clubs anglais ?

 

En fait, ils m’ont fait comprendre que si je voulais partir en France, ils me libéraient de mon contrat, mais que pour un club anglais ce n’était pas possible. Donc j’aurais peut-être pu rester, mais c’était compliqué et le Stade Toulousain ça se refuse pas. Mais l’Angleterre ça ma apporté plein de choses, mes enfants sont bilingues et parlent anglais, ma femme aussi a vécu des trucs de fou, donc c’était vraiment top.

 

En France il y a pas un grand amour pour les Anglais en général, du coup, tous les Anglais ne sont pas des connards ?

 

Non pas du tout ! Moi j’en doutais pas, mais toutes les personnes qui sont venues me voir en Angleterre et qui ont découvert comment on vivait là-bas et tout, je pense que plus de 95% ont carrément changé d’avis sur les Anglais, la façon dont ils traitent les Français, la vie en général. Non il pleut pas tout le temps, et l’été il fait chaud !

 

Du coup, t’en as parlé avec Louis Picamoles, avant ou après sa signature à Northampton ?

 

Ouais, on en a parlé un peu avant. Je lui en ai dit que du bien, même s’il signe aux Saints qui sont les ennemis des Tigers. Je pense que ça l’a aidé dans sa prise de décision.

 

Tu lui as donné quelques cours d’anglais ?

 

Je ne dirais pas qu’il se débrouille bien, mais il essaye !

 

Parce que la dernière fois qu’on l’a vu parler anglais en Nouvelle-Zélande, c’était pas terrible avec son fameux « WHY YOU CONTINUE »…

 

(rires) Je connaissais pas cette vidéo ! Je regarderai ça.

 


Pour finir sur l’Angleterre, est-ce que ça t’arrivait d’être arrêté dans la rue car les gens te confondaient avec Daniel Craig ?

 

(rires) Ouais, en même temps je roulais en Aston Martin, donc obligé. Sinon ouais, on me l’a déjà dit, mais j’en suis pas spécialement fier.

 

T’es parti à Toulouse, parce que « Toulouse ça se refuse pas » tu disais. Tu savais que t’allais être en concurrence avec Bézy et Doussain, du coup pour toi c’était une année sabbatique, le soleil, …

 

Je suis venu profiter du bon air, ouais… En fait Guy Novès me l’avait vendu en me disant que Jean-Marc allait jouer 10 et que je serais donc en concurrence avec Sébastien, c’était un défi qui se relève, même si Sébastien marche sur l’eau et qu’il est hors-norme cette année… Donc oui c’est dommage. Ce qui m’embête un peu c’est que j’ai été jugé par exemple sur le match amical à Albi, avec pratiquement que des espoirs qui jouaient, sans leur jeter la pierre c’était pas un match que tout le monde avait envie de jouer. On m’a dit que j’avais pas été assez bon, donc franchement c’est dommage parce que ça aurait pu se passer autrement.

 

T’as été recruté par Novès, t’étais pas forcément dans les plans de Ugo Mola.

 

C’est pas impossible, c’est toujours difficile quand t’arrives dans un club et qu’entre temps ça change de staff. Quand j’ai su qu’il avait signé ici, je l’ai eu au téléphone et après en cours de saison chaque fois que je demandais des explications sur pourquoi je jouais pas et même ce que je devais travailler pour jouer, en gros il me disait que c’était Guy qui m’avait fait venir, donc j’ai vite compris que j’allais avoir une saison un peu compliquée.

 

Du coup tu peux balancer un peu. Le Stade n’est pas favori pour le Brennus cette année, tu penses qu’ils peuvent faire la surprise ?

 

Quand on joue dans une équipe on est forcé de croire. Moi j’y crois, comme personne ne croyait qu’on allait gagner contre Toulon à Nice. Tout le monde nous voyait en prendre 40. Si certains croient en nous c’est bon pour nous, nous on croit en nous, et honnêtement si je pouvais partir du Stade avec un titre, même si je l’aurais pas gagné sur le terrain ça serait sympa.

 

Justement à la fin du match à Nice, on a vu que t’étais tout fou.

 

Ah je suis à fond dans l’équipe. Même si on pourrait croire que non, parce que je connais mon avenir, parce que je sais que je pars à Grenoble. Quand je viens à l’entraînement tous les matins, je viens pour montrer aux coachs que je peux jouer, que je suis là pour jouer et pas pour attendre que mon contrat se finisse. Si je ne joue pas, je suis là pour pousser Sébastien et Jean-Marc, et si je les fais travailler ils seront meilleurs, l’équipe sera meilleure et on pourra espérer quelque chose à la fin. Je suis heureux parce qu’on a gagné [à Nice], je me sens vraiment dans l’équipe à fond, et on a vu sur les images que je l’ai exprimé vachement. J’étais très content à ce moment-là.

 

Tu côtoies tous les jours Clément Poitrenaud. Tu t’inspires de lui, sur le terrain, vestimentairement ?

 

Vestimentairement non, parce qu’il est quand même dégueulasse.

 

La barbe tu valides ?

Il a quand même une barbe dégueulasse. A la vidéo je suis juste derrière lui, et des fois je regarde il vaudrait mieux qu’il se la rase entièrement parce que c’est pas possible.

 

On l’appelait Barbatrous…

 

C’est exactement ça. Il en a là, il en a là. Après c’est un mec que j’ai détesté vraiment quand j’étais à Perpignan, parce qu’à Perpignan on est tellement bêtes qu’on déteste tout le monde. On était vachement parano, on se disait « on est les petits, tout le monde nous chie dessus. » C’est vrai que je l’ai détesté, et en fait c’est un mec au top. Un peu comme David Marty, un peu rustre, un peu difficile à aborder, mais en fait le mec adorable.

 

Et pourquoi signer à Grenoble ?

 

Pour aller faire du ski. Non mais j’avais signé un an à Toulouse, quand Ugo Mola m’avait dit ça en début de saison, vu que je jouais pas trop, je voyais pas trop l’intérêt de rester à Toulouse… J’ai été approché par Grenoble, et d’autres clubs également. Je pense que c’est le bon compromis entre le temps de jeu, je pense que je vais jouer un peu plus et pour ma femme je pense que rester en France ça lui fait du bien aussi. C’est une équipe qui peut venir un peu chatouiller les 6 premiers et c’est vrai qu’il ont pas la prétention de se dire on va se qualifier dans les 6, mais c’est un groupe qui vit bien depuis plusieurs années, qui arrive à avoir des résultats importants, on va voir comment ça va se passer, je pense qu’on peut arriver à se maintenir dans ces 8-6, et je pense que c’est la motivation et l’objectif de ce groupe.

 

Tu dis que tu vas avoir plus de temps de jeu, mais à Grenoble y a un 9 qui est déjà très performant, installé, qui joue quasiment tout, derrière t’as Saseras, Loustalot, Hart.

 

Loustalot et Hart s’en vont, y aurait McLeod, Sarceras et moi. Moi je suis compétiteur, je pense que c’est pas prétentieux de dire que j’aspire à démarrer des matchs. Après je sais très bien que McLeod il est installé, il a de l’expérience dans l’équipe, donc j’y vais pour essayer de le pousser un peu, après on verra comment ça va se passer dans les matchs. Quand j’étais à Perpignan ou à Leicester, j’ai bien connu le rôle de doublure et de rentrer faire des bouts de matchs et ça avait plutôt bien marché donc c’est un rôle que j’aime bien. Déjà bien finir avec Toulouse et on verra bien comment ça va se passer à Grenoble.

 

Jouer 10 à Grenoble ?

 

Le problème c’est qu’il y a Jonathan Wisniewski qui est très performant, y’a Gilles Bosch que je connais bien et qui fait des bons matchs aussi, pourquoi pas jouer sur cette polyvalence. Ça a été évoqué. Moi j’aimerais bien, je l’avais dit à Ugo Mola ici. C’est un poste que j’aime bien, donc si je dois dépanner à Grenoble en 10, ça sera avec grand plaisir.

 

Bon maintenant qu’on a fini les questions sérieuses on va passer aux questions cons. Désolé y en a une on est obligé de la faire, on va l’évacuer tout de suite comme ça c’est fait. Tu t’appelles David Mélé, tu joues au rugby. T’aurais préféré t’appeler Jean Corner, Thierry Javelot ou Olivier Curling ?

 

Non, ça me va. Je suis habitué à ce qu’on me fasse des blagues. Demi de Mélé, ou Mélé à 5 si je suis sur le terrain aux 5 mètres. Bon c’est rigolo quand même.

 

Julien Candelon peut-il devenir champion olympique de rugby à 7 ?

 

J’ai du mal à voir sa cabine avec la médaille autour du cou. Ils vont l’avoir dur, mais c’est un truc à vivre quand même.

 

Quel est le joueur avec qui tu aurais aimé jouer sur le terrain ?

 

(Il cherche…) Andy Goode !

 

C’est dur en fait, t’as joué avec tous les plus grands.

 

Oui, Jean-Pierre Perez…

 

La 3ème ligne la plus technique de France en 2009…

 

Ah oui, Jean-Pierre Perez, Henry Tuilagi et Greg Le Corvec… Ah ça pour faire une passe c’était difficile par contre pour mettre des coups de tête… Heureusement qu’il y avait Damien Chouly, il relevait un peu le niveau. Il y avait Gerrie Britz aussi, un Sud-Africain, pareil il avait un peu des poêles Teflon à la place des mains.

 

Celui avec qui tu aurais aimé faire une 3ème mi-temps ?

 

Le Gallois, qui avait conduit une voiture de golf sur l’autoroute, là, Andy Powell. Ça ça doit être pas mal.

 

Le meilleur que tu connaisses en 3ème MT ?

 

Damien Chouly ou Adrien Planté. C’est les mecs avec qui j’en ai pris de sacrées.

 

Il paraît que Dan avait un bon niveau aussi…

 

Ah ouais ! Quand il était blessé il était tout le temps à Barcelone à faire des bringues avec ses collègues néo-zèdes, lui aussi il en prend des belles.

 

Celui avec qui partir à la chasse à mains nues dans la forêt amazonienne ?

 

Florian Fritz. C’est un animal quand même. Ah ouais. Lui on peut partir à la guerre avec lui.

 

Thé ou café ?

Café

 

Levrette ou 69 ?

 

69

 

Est-ce qu’elle est bonne à droite ? Si oui, pourquoi ?

 

(Se penche, regarde à la table de droite, fais la moue) Nan !

 

La Catalogne devient indépendante. Comme président, tu votes pour Nicolas Mas ou David Marty ?

 

Oh David Marty. Trop calme Nicolas Mas. David Marty parfait, il aurait de la poigne.

 

Te faire plaquer par ta femme ou par Jean-Pierre Perez ?

 

Ah par Jean-Pierre quand même. Même si ça fait mal, par Jean-Pierre. S’il me pète les deux genoux, j’aurai encore ma femme et mes enfants. Si je me fais plaquer par ma femme, j’aurai Jean-Pierre… (rires)

 

Se faire enfoncer en mêlée ou se prendre un cad’deb d’école ?

 

Je préfère me faire enfoncer en mêlée. Parce que c’est la honte quand même, un beau cadrage débordement, bien propre, sans toucher ni rien.

 

Ça t’est déjà arrivé ?

 

Oh oui surement.

 

On va chercher les images…

 

En même temps c’est difficile de me trouver sur un terrain en ce moment, donc les images vous les aurez pas !

 

T’as parlé des monstres de la nature tout à l’heure, les Tuilagi, tu préférerais te prendre une droite duquel ?

 

Han… Si je devais choisir, entre les 6 frères ?!?

 

Ceux avec qui tu as joué.

 

Pfff… Parce qu’Henry, c’est juste un monstre… Et l’autre, il est rapide en plus, donc je pense que ça peut arriver bien plus vite… Mais celle d’Henry, il a un poing à peu près comme ça… Bon allez Manu, parce qu’Henry je pense qu’il me tue sur celle que je prends, alors que Manu il me met dans le coma pour 6 mois.

 

Pour une pénalité de la gagne à la dernière minute tu as le choix entre Dan Carter, Jérôme Porical, Manny Edmonds ou toi. Tu choisis qui ?

 

Ah Jérôme. Il est fiable. Et parce que c’est un très bon copain.

 

Sinon un mec qui perce le premier rideau, t’as le choix entre les mêmes pour le placage en 15.

 

(éclat de rire) Pas Mannie, pas Jérôme, ouais, DAN.

 


Pour toi, c’est quoi les valeurs du rugby ?

 

Le respect. Que ça soit des hommes, du matériel à l’entraînement, des horaires. Le respect c’est la valeur qui représente le plus le rugby.