Le songe d’une nuit d’été – L’édito de Jacques Merdier
par Jacques Merdier

  • 08 October 2014
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Par Jacques Merdier,
Le meilleur d’entre lui.

 

Il me revient en mémoire un de ces dimanches de match où comme à notre habitude, moi-même, Serge Soulègue le fameux ailier de Vidargues, le Vidargues de la grande époque, et Francis Simon l’ex-président du RC Chalusses discutions de manière enflammée avec ce cher Jean-Henri Falguères peu de temps après qu’il eut reçu son Nobel de littérature. L’été se terminait, nous refaisions le match et Jean-Henri s’offusquait de la constance immuable, confinant à la consanguinité, de ce sport rudoyant et évoquait avec ferveur jubilante les écrits du philosophe toulousain Michel Rabiguet quant à la nécessité inhérente à tout système de s’accommoder de son externalité pour assurer sa survie.

L’alcool aidant nous nous affrontîmes pendant des heures objectationnant qu’il eût fallu que la plasticité nationale des sociétés cosmopolites n’existât point afin de conséquenter la survie de notre sport. Bien au contraire. Et devant l’argumentaire radical, quoique profondément circonflexe, que nous pertinemment formuliâmes, Jean-Henri se résolût et admit cuisante défaite tout Nobel qu’il fût. Et nous nous prîmes alors à rêver follement et éperdument, jusqu’au confins pourtant distant d’une nuit encore jeune, d’un rugby exempt de metisationnement transnational. Et de souhaiter que ne s’immisce jamais la sournoise engeance des invertis ou même la succubale influence de la femme, pour qui les joutes rugbystiques sont uniquement l’occasion de se pâmer et d’érotiser un quotidien morne de n’avoir jamais avoir connu virilité telle que la nôtre, salissant par là même la beauté sacrée d’un sport dont jamais elles n’auront la perception sublime de l’esthétique conceptuelle, tant leur hormonalité inhérente leur rend abstraite la seule approche intellectuelle et stratégique des affrontements les plus superbes.

Et discutant ainsi à la lueur des étoiles et de nos propres idées, nous jouîmes. Nous jouîmes. Nous nous quittâmes dans le petit matin, les yeux encore humides de cette épiphanie, ce foisonnement de génie, cette explosion créatrice telle qui n’en arrive qu’une par millénaire et qui scella pour toujours notre amitié infinie. Et en regardant le rugby d’aujourd’hui, il me revient ce souvenir, et je m’aperçois que ce ne fût là que le songe d’une nuit d’été.