Révélation : Jacques Verdier serait décédé depuis plus de 10 ans
par La Boucherie

  • 01 September 2014
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Par Matthew Clark-Kent, grand reporter à Picsou-Magazine, correspondant de guerre en Aveyron et pigiste occasionnel pour la Boucherie Ovalie. 

 

Coup de théâtre au Midi-Olympique. Le célèbre journal jaune, considéré comme une véritable Bible par tous les amoureux du ballon ovale, vit actuellement une crise sans précédent. En cause, les déclarations chocs d’un employé du groupe La Dépêche, Clément Moulissac. Ce jeune journaliste-stagiaire de 28 ans ne pouvait plus vivre avec le poids du secret. Un secret de famille, bien gardé au sein du journal depuis une décennie : le directeur de rédaction historique du « Midol », Jacques Verdier, serait en fait décédé depuis plusieurs années. Une disparition qui avait incompréhensiblement été masquée à la rédaction du journal. 

Le rédacteur en chef du journal, Emmannuel Massicard, est passé aux aveux quelques heures après la révélation du scoop par le site Mediapart. « Seule une poignée de journalistes savait », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse exceptionnelle au siège de la Dépêche du Midi, à Toulouse. « Comme de toute façon, Jacques ne passait jamais dans les bureaux, personne n’a réellement remarqué son absence. Les seuls qui se sont inquiétés à son sujet, ce sont quelques notables du rugby français qui se demandaient pourquoi il n’était plus présent aux banquets de la FFR. Quand ils posaient trop de questions, je remplissais leur verre à nouveau, et ils passaient à autre chose ». Mais pourquoi donc avoir souhaité cacher la disparition de Verdier ? Visiblement bouleversé, Massicard reconnaît avoir été pris « dans l’engrenage du mensonge ».



Un mensonge qui dure depuis plus de 10 ans

« Tout ce que Clément a dit est vrai, malheureusement. Jacques est décédé en 2003. Nous l’avons retrouvé dans sa maison à Saint-Gaudens. Victime d’un accident domestique, il aurait été écrasé par une pile de ses propres livres, alors qu’il faisait du rangement dans sa bibliothèque. Quand nous l’avons appris, nous étions évidemment tous sous le choc. Comment allions-nous pouvoir remplacer un tel talent ? Comment encore séduire nos lecteurs sans la verve et le style flamboyant de Jacques ? Nous avons paniqué, tout simplement. Bien sûr, on a pensé à une liste de plumes prestigieuses pour le remplacer. Nous avons d’abord songé à Pierre Villepreux, ce grand technicien et éternel amoureux du jeu. Le problème, c’est que personne n’était capable de comprendre la moindre ligne qu’il écrivait. On a donc préféré lui confier un blog caché dans un coin sur Rugbyrama – si vous arrivez à le trouver, chapeau, la rubrique est encore moins visible que celle consacrée au Super Rugby »

Les larmes aux yeux, Massicard poursuit son explication. « Bref, je me suis finalement dit que j’allais écrire les éditos en son nom, et ce jusqu’à la fin de la saison. Ensuite, nous déciderions d’annoncer la nouvelle. Mais finalement je n’ai jamais eu le courage de le faire. J’ai continué à écrire à sa place, pendant plusieurs années… mais le poids du mensonge devenait trop lourd. En 2007, je ne pouvais décemment plus continuer, et quand Clément est arrivé à la rédaction, je lui ai demandé de reprendre le flambeau. Il avait l’air servile, malléable à souhait, comme tous les bons stagiaires de Rugbyrama. Je pensais qu’il saurait faire le job et garder le secret… je me suis trompé à son sujet. Mais je crois que d’une certaine façon, je suis soulagé que la vérité éclate enfin et soulage nos consciences. »

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Jacques Verdier à une réception de la FFR (date inconnue). 



Une mécanique bien rodée

Dans son interview-révélation accordée à Mediapart, l’Edward Snowden de l’Ovalie dévoile en détails comment il a réalisé sa supercherie. Avec brio. « Quand Emmannuel m’a chargé d’écrire les chroniques de Jacques à sa place, je n’ai pas réussi à dormir pendant une semaine. Imaginez un peu la pression, pour un jeune journaliste comme moi ! C’est un peu comme si on vous demandait de finir la symphonie inachevée de Schubert. »

D’abord hésitant, Clément a vite trouvé « le truc » pour d’imiter parfaitement le style du célèbre éditorialiste : « Bien sûr, comme tout amateur de rugby qui se respecte, j’avais déjà lu tout Jacques Verdier lors de mes études. Mais j’ai décidé de me replonger dedans, de lire l’anthologie, la moindre chronique, le moindre édito, la moindre réponse au courrier des lecteurs. J’ai même écouté ses interventions sur RMC, c’est dire. Comme vous le savez, tous les grands auteurs ont des tics d’écriture, le but pour moi était donc de repérer les siens et de me les approprier. En fait, assez vite, j’ai réussi à dégager un modèle. » Un modèle qu’il détaille avec précision.

« La première étape, c’est ce que j’appelle la partie « C’était mieux avant ». Très tôt au début du texte, je cite plusieurs noms d’anciennes gloires, comme Lucien Mias, Jean-Pierre Rives, Benoît Dauga, Didier Codorniou, bref, des noms qui sentent bon la photo sépia et le bal-musette dans un village du sud-ouest de la France. Regarder l’émission « La chance aux chansons » de Pascal Sevran m’aidait d’ailleurs beaucoup à m’inspirer dans un premier temps. Bref,  je glorifie tous ces personnages, en racontant qu’ils incarnaient toutes les valeurs morales propres au rugby : combativité, courage, solidarité, altruisme, épicurisme… une fois que tu as fait ça, c’est 80% du travail qui est bouclé. Il ne te reste plus qu’à les comparer avec des joueurs de la génération actuelle, des mercenaires, qui ne songent qu’à leur image, qui rabâchent des discours pré-mâchés et probablement préparés par leurs conseillers en communication. Je me plains du professionnalisme, du trop grand nombre d’étrangers dans notre championnat, du beau jeu qui disparaît au profit d’une épreuve de force décérébrée. Voilà. Pour le reste, il suffit de piocher des mots compliqués dans un dictionnaire de synonymes, pour faire lettré. Par exemple, vous saviez que « coruscant » était un adjectif ? Moi, je pensais que c’était une planète dans Star Wars ! Ah, oui, puis il ne faut pas oublier de dire du bien du président de la FFR et de Jean-Michel Baylet de temps en temps. »



Une révolution à venir à la tête du journal ?

A la suite de ces révélations, Emmannuel Massicard n’a fait que peu mystère quant à la suite de sa carrière journalistique. « Je vais prendre mes responsabilités, donner ma démission auprès de Jean-Michel Baylet et lui remettre ma carte de membre du Parti Radical de Gauche – ce qui est un petit déchirement, sachant que nous ne sommes que 16 à la posséder en France. Philippe Kallembrunn devrait être notre nouveau rédacteur en chef. Pour succéder à Jacques Verdier, le conseil d’administration à pensé à confier l’édito en alternance à Serge Blanco et à Pierre Camou. Après tout, nous avons fait nos meilleures ventes lors de notre numéro du 28 juillet qu’ils ont quasiment rédigé en intégralité ». Reste à voir si ces nombreux remous perturberont les ventes du Midi-Olympique, qui rappelons-le, fait toujours face à une terrible concurrence dans le milieu de la presse rugbystique.