Et là, paf ! Le Doublé !
par Ketchup-Mayol

  • 05 June 2014
  • 28

 
 
par Ketchup-Mayol

Je vous plains. Oh putain comme je vous plains.

Vous, les supporters qui n’avez pas la chance d’encourager la meilleure équipe de tous les temps. Vous qui n’êtes pas rouge et noir. 
Non, je ne parle pas de Toulouse et de son doublé en bois de 1996, sacré champion d’Europe après quatre matches dont deux contre des Italiens et des Roumains. Non, pas Oyonnax non plus, allons ne jouez pas les imbéciles …

Au moins un an. Vous allez subir pendant au moins un an l’arrogance et le chambrage de kikoo83 sur tous les forums dédiés au rugby. « Nous on es double champion, et vous les clermontoise vous aver fait quoi ? »

Mais comme je vous plains !

M’enfin, comme disait Brennus, pas celui du bouclier, l’autre: “Vae Victis !”
 

Brennus chambre les Romains: “LOL les rom1. Malheur aux PWNED !”

 

Comment rendre compte de cette finale de Top 14 sans répéter ce qui a été inlassablement  imprimé, rabâché par tous les médias ces derniers jours, en évitant l’hagiographie wilkinsonienne, en évitant les mots ‘historique’ ou ‘énorme’.

C’est ce que nous allons nous employer à faire.

Je suis donc allé voir le match au Stade. Non, pas le Stade de France, le Stade Mayol. Pour ceux qui y étaient, j’étais le type avec le polo du RCT, oui je sais que maintenant, les lecteurs qui y étaient aussi se mordent les doigts de ne pas être venus me parler.

Assis en travers sur mon siège en plastique, bravant le torticolis pour voir l’écran géant et sirotant une bière sans alcool, je ne pouvais réprimer une bouffée de condescendance à l’égard de tous ces cons qui regardaient le match confortablement installés dans leur canapé, une binouze à la main. C’était ‘ze place tou bi’, au cœur de la passion toulonnaise, à quelques heures d’un moment histor… unique.
 

 

Assis quasiment au ras de la pelouse, je me disais qu’un jour peut-être, en récompense des services rendus au club, Son Ovalitude Sérénissime pourrait me gratifier d’une place dans le coin, ainsi que peut être un pavé sur l’Avenue des Légendes quelque part entre Olivier Missoup et Gérald Orsoni. Parce que bon, moi les tours de stade en Maseratti…

Après une heure et demi à poireauter entre une ola et un pilou pilou, enfin la composition des équipes. La foule en délire acclame ses héros, un hululement strident me vrille les oreilles au moment où apparaît le visage de Virgile Bruni – visiblement, les quatre minettes assises juste derrière moi constituaient son fan-club.

Puis vient le tour des Castrais, et là, c’est George Orwell qui me vient en tête en entendant les huées saluant le visage de Kockott sur l’écran : les Deux Minutes de la Haine dans 1984, et ses écrits moins connus sur le sport comme vecteur d’animosité entre les peuples.

Quelques minutes plus tard, les huées retentissent à nouveau. Mais c’est qui le petit gros à lunettes en costard à côté de Paul Goze?

LE MATCH:

Bonne entame, Toulon ouvre le score, il y a beaucoup d’engagement mais les Aveyronnais sont bien en place et les Rouge et Noir semblent un peu émoussés – on le serait à moins, c’est pratiquement les mêmes qui ont joué face aux Saracens le week-end d’avant, et certains ont joué tous les matches depuis trois mois.

Et là, à la 11ème minute, Max Evans décide de se la jouer Matt Giteau, il slalome, tape à suivre et aplatit acrobatiquement entre les poteaux, après un en-avant de Kockott, vu par les 17 000 supporters toulonnais présents. Mais conformément au Complot Anti-Toulonnais ™, l’essai est accordé et la stupéfaction envahit le stade.

Mais tous les stratagèmes et coups fourrés de la FFR, de la LNR, de l’instance arbitrale, des Illuminati, des francs-maçons et des Reptiliens ne peuvent rien contre le Destin, surtout quand celui-ci revêt la forme du pied de Jonny Wilkinson. Comme lors de la finale précédente, il nous a gratifiés d’un 100%, drop du droit compris. A la mi-temps, le RCT avait remonté son retard et virait en tête. Dans les mots immortels du poète Victor Albaladugo, “Les mouches changèrent d’âne, l’espoir changea de camp”.

Kockott, artisan de la victoire l’an dernier, échouait, lui à trois reprises, et quand Delon Armitage met le RCT à l’abri d’un essai transformé à la 70ème…

 

 

Aphone, à moitié sourd, je regarde la jeunesse toulonnaise envahir le terrain et maraver la pelouse toute neuve qu’on avait même pas fini de planter…

Mais qu’est-ce que je vous plains !

LE BILAN:

Bon, soyons clair, comparé à la finale des Saints contre les Saracens, tout aussi satisfaisante au niveau du résultat, niveau jeu y a clairement pas de quoi sauter au plafond. Mais tout de même, enquiller deux finales à une semaine d’intervalle avec une saison dans les pattes, et surtout les gagner, c’est énor… ça force le respect !

Les Castrais l’avaient mauvaise car ils pensaient la finale à leur portée. Certes, ils avaient une équipe de Toulon émoussée en face, mais hormis le coup d’éclat de Max Evans, le CO n’a jamais semblé en mesure de reprendre pied, en particulier en seconde mi-temps, et sa mêlée a été chahutée du début à la fin. Talès, secoué en début de match, n’a pas réussi à peser sur le cours du jeu. Kockott, homme de l’année dernière, malheureux au pied, en était réduit à manger son ballon.
 

“Qui mange un ballon de rugby fait confiance à son anus.” Proverbe Sud Africain

 

Même si on a connu le  RCT plus flamboyant, c’est un match dans l’ensemble maîtrisé qui a été livré. Le pari était risqué d’aligner des joueurs fatigués, mais le jeu était plus orienté vers la défense que l’attaque (d’où l’absence de Michalak, D. Smith ou Mermoz). Une chose est sûre, le RCT a démontré qu’il était plus grand que la somme de toutes ses parties.

Evidemment, on ne pouvait rêver meilleure sortie pour Wilkinson, artisan de la victoire de son équipe: 15 points sur 18. Finir une carrière exemplaire sur un titre qui manquait à sa collec’, un éventail complet de jeu au pied avec 100% de réussite, tout cela valait bien un God save the Queen, n’en déplaise à Pierre-Yves Revol. Sa réflexion est l’illustration parfaite de ce que la conception des Valeurs (c) de certains peut avoir de rance et de réac.

Y-a-t’il une vie après Wilkinson?

Humble, travailleur, technique, efficace, OK tout ça qualifie très bien Jonny. Mais où est le grain de folie? Vous connaissez beaucoup d’obsessionnels compulsifs rigolos? A part ceux atteints du syndrome de Tourette?

Je ne me fais pas trop de souci pour l’après-Wilkinson. Le RCT est une vraie équipe avec des tauliers, des créatifs qui vont davantage pouvoir s’exprimer, libérés de l’ombre du grand homme. Matt Giteau va prendre plus d’importance, et qui sait, l’air de Toulon fait parfois rejaillir le feu des anciens volcans qu’on croyait trop vieux. Je pense plus à Michalak qu’à Vosloo sur le coup.

Voyons ce qu’en pensent les experts RMC…
 

“Et vous savez quoi? Je suis mieux payé que Juan Smith pour dire des conneries pareilles !

 

Non je me fais moins de souci pour le vide que Wilko va laisser dans le rugby que pour le vide que le rugby va laisser dans la vie de Wilko.  Qu’est-ce qui pourrait autant satisfaire sa quête d’absolu et de perfection ? L’élevage de bonsaï ? Apprendre un maximum de décimales de Pi ? Réécrire “Guerre et Paix” en remplaçant chaque lettre par la suivante dans l’alphabet ? L’épépinage de tomates cerises ? Vous pouvez vous aussi participer au grand jeu “A hobby for Jonny” en contribuant dans les commentaires !