Le burrito catalan
par La Boucherie

  • 22 April 2014
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Après Pastigo, qui a décidé de militer en faveur du maintien de l’USAP, voici un nouveau texte consacré au club-que-personne-ne-veut-voir-disparaître-parce-que-sinon-on-ne-saura-plus-de-qui-se-moquer. Il est signé de la main de Talu, qui nous avait déjà offert le compte rendu du Cueilleredeboisico entre l’Italie et l’Écosse – assurément un amoureux des causes désespérées. 

 

Par Talu,

 

Bon Dia !

A l’heure où j’écris ces quelques lignes, le soleil n’est toujours pas levé sur la Catalogne, et la batterie de mon téléphone et accessoirement support d’écriture indique tout juste 66. Il va falloir faire vite.

66 comme les Pyrénées-Orientales, le département des justes et des inconscients, des sages et des fous, si proche des 2 autres Pyrénées-Trucs et pourtant si lointain, séparé par des montagnes de différences et d’indifférence qui se lisent sur le visage ridé du pêcheur retraité de Collioure observant d’un oeil moqueur le touriste palois en vacances, et surtout par cette putain d’Ariège qui rappelle au monde que l’inutilité n’est totale que si elle s’accompagne d’une laideur absolue…
On dit du Breton, inventeur du lit clos, qu’il nait dans des placards, vit sur la mer et meurt dans l’alcool (à moins qu’il ne meure en mer en ayant vécu dans l’alcool).

Le Catalan a lui inventé la fierté. Il nait, vit, et meurt fier, un étendard à la main, que la sage-femme extrait en même temps que le nourrisson du ventre de la Catalane, et qui ne lui est retiré que lorsque celui-ci gravit pour la dernière fois le mont Canigou, avant de s’éteindre en s’écrasant au bas de la falaise au soleil de midi, conjuguant une dernière fois les couleurs sang et or.

Samedi 3 mai prochain, la dernière journée de Top14 verra ces fiers Catalans se déplacer en terre clermontoise.
Une terre si aride de victoires visiteuses que seul un cactus déposé à l’époque par quelque Biarrot insolent résiste encore dans le vestiaire adverse, où chaque match se conclut d’inévitables “biche” lancés çà et là sur twitter et ailleurs, et où Canal n’envoie plus que des Nicolas Dupin de Beyssat (désolé poulet, ça fait longtemps et je ne me souvenais plus des noms des autres) hors matchs rouge et noir, de peur de gâcher un vrai journaliste.

Une contrée si hostile qu’elle célèbre déjà presque cette centième victoire d’affilée dans son antre bibendumesque alors qu’elle n’en est “qu’à” 76.

Mais ce n’est pas seulement Perpignan qui se déplace ce samedi. C’est toute son histoire qui vient avec elle. C’est ses 7 titres de champions qui viennent, c’est ses poilus tombés, Aimé Giral en tête, qui ont entraîné le passage au bleu horizon qui seront là, c’est Desclaux et Imbernon qui regarderont d’en haut tous les 2 (seul le premier est décédé, le 2ème est simplement gigantesque).

C’est Dan Carter un peu aussi (en plus il est blessé en ce moment, ça rappelle des souvenirs), tout auréolé d’un passage aussi court que réussi pour le club en 2009. C’est surtout un pays entier, plein de Greg Le Corvec qui ne rêvent que de voir les Cudmore adverses s’agenouiller, s’étaler de tout leur long, verser enfin une larme tant attendue, et sauver à la dernière minute l’Union Sportive des Arlequins de la relégation.

Car c’est bien de ça dont on parle. La RE-LÉ-GA-TION. Le purgatoire. Les matchs à Aurillac en plein hiver sans pour autant profiter d’un passage rue Princesse après un match parisien. Les 13 supporters jaune et noir qui hurlent “Ici-Ici, c’est La-Roch-Elle” alors que tu as pleuré en passant devant le panneau à l’entrée de la ville et qu’effectivement, si il y a bien une chose dont tu es conscient à ce moment-là, c’est qu’ici c’est bien La Rochelle…

“What happens in ProD2 stays in ProD2!”

Il ne s’agit pas d’un commandement cette fois-ci. Mais d’une réalité. Chabal en retraite, tout ce qui se passera en ProD2 l’an prochain y restera enterré, enfoui, enfermé, enseveli sous des enchevêtrements d’informations plus importantes et des vidéos de chats qui font les cons sur youtube. Alors il va falloir se bouger !

Les scénarios de sauvetage sont minces. À l’heure actuelle l’USAP est 13ème, reléguable, au même nombre de points qu’Oyonnax et Bayonne.
Ce coquin de sort fait que si Oyonnax n’était pas également à 50 pions, L’USAP serait devant la team Affleloute.
Seulement voilà, on ne joue pas avec la réalité. La réalité c’est que le dans quelques jours, Oyonnax va chez des Brivistes plus ou moins en vacances, Bayonne joue à domicile face à des Castrais qui tenteront tout pour recevoir leur barrage, et que seul un scénario apocalyptique pourrait encore envoyer les Grenoblois au fond du puits.

Je ne parlerai donc pas plus des autres. Je ne souhaite la mort de personne. Pas plus des valeureux guerriers d’Oyonnax – dont j’ignore toujours, à l’instar de 90% des joueurs du top14 qui ont vécu l’arrivée en bus sur la ville au travers d’un brouillard épais comme une crème catalane, la localisation exacte – que celle des héroïques Grenoblois qui ont réussi l’exploit de renverser le Racing à l’extérieur tout en étant l’une des rares équipes à échouer à domicile face aux Biarrots. J’ai un léger faible pour Bayonne, mais ce serait juste pour le symbole, la team basque qui sombre collectivement, se réunit, et n’arrive toujours à rien tellement les querelles internes sont sauvages et pénibles.

Le record tombera aussi ! Mais il restera pour des années encore… et le dernier match de Vern à Michelin n’est pas celui-là, mais sera le prochain, ce sera la victoire qui mène en demie, puis en finale, et enfin vers le Graal suprême d’une défaite supplémentaire (maintenant que c’est gagné, on reprend le cycle hein !).

Ma batterie n’en est plus qu’à 15%. Soit plus ou moins les chances pour l’USAP de survivre en Top14.

C’est donc l’heure non pas de tourner la page, mais de poursuivre l’histoire. Pas la grande histoire, oh non ! Mais la belle histoire, celle avec des poings sur les ‘i’ et un bouclier à la fin.

Si Jean-Pierre Perez doit marcher sur les crânes de ses adversaires, et finir par séparer la défense clermontoise telle une vulgaire mer Rouge, qu’il en soit ainsi. Les dieux du rugby n’en sont plus à un miracle près. Qu’ils fassent leur choix, je n’implore qu’une simple clémence, et non un pardon pour toutes ces errances.

Visca le Mormeck !