Sélection de PSA : l’oeil de Francis Volcanique
par Marcel Caumixe

  • 06 March 2014
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Francis Volcanique, notre expert rugby aux 34 sélections, réagit à l’annonce du XV de France.

Boucherie Ovalie : Francis, que pensez-vous de la sélection annoncée par Philippe Saint-André ?

Francis Volcanique : Je pense avant tout que c’est une sélection de circonstance. On sait bien que l’Ecosse est une sorte de paillasson du rugby européen, une nation ruinée qui tente tant bien que mal d’exister à la face du monde, et qui pour cela ne peut que prétendre au rôle du souffre-douleur. On peut se permettre de faire quelques expériences contre un tel adversaire. C’est même un atout de tenter des choses.

BO : Mais est-ce que faire autant de changements est vraiment compatible avec la mise en place d’une stratégie sur la durée ?

FV : Si le but était d’avoir des stratégies et des plans de jeu, ça se saurait. Non, le XV de France veut se resserrer autour de ses valeurs fondatrices :

  •  Ne pas respecter les adversaires les plus faibles
  •  Faire 75 minutes de non-rugby
  •  Se mettre un gros coup de flip vers la fin
  •  Essayer de voler le match. Avec un coup de bol monstrueux si possible pour entretenir la légende du French Flair et l’amour-propre.

N’oublions pas qu’un des meilleurs atouts du XV de France c’est l’effet de surprise. Par ailleurs, on n’est jamais très bons quand on aligne une équipe ultra-favorite face à une équipe dite plus faible. Dans ces cas-là, le XV de France n’est performant qu’avec un caillou dans la chaussure et les lacets noués ensemble.

BO : Comment expliquez-vous cela ?

FV : Ce n’est pas compliqué : niveau jeu, on emploie de grosses ficelles. Tout le monde nous voit venir… Et encore, ça pourrait passer si l’exécution était au niveau. Mais là, la seule manière de créer le danger, c’est de mettre une bonne dose d’incertitude.

BO : Cette stratégie a montré ses faiblesses lors du dernier match…

FV : Je vois que vous faites référence à la technique mise en place lors du match contre le Pays de Galles, communément appelée “La valise à Nick Mallett”, et qui consiste à mettre un 3ème ligne en 9. L’effet de surprise n’est pas une science exacte. Et il y a quinze jours, le staff a mal jugé cette équipe de Galles : malgré nos 2 victoires et leur défaite, nous n’étions pas favoris. Du coup, ça ne servait à rien de partir avec un handicap.

BO : A titre personnel, auriez-vous joué cette carte face à l’Ecosse ?

FV : Probablement, mais je l’aurais jouée encore plus à fond. Et puis il faut garder un certain sens du panache et viser haut : gagner ce tournoi est encore possible. C’est dans ces occasions qu’il faut bousculer les habitudes et être ultra-créatifs. Il faut néanmoins partir des caractéristiques propres à notre équipe:

  • On est nuls balle en main et les ailiers n’en touchent pas une
  • On est infoutus de garder une balle. Nos stats de possession sont mauvaises.
  • On met jamais les pieds chez l’adversaire. Nos stats d’occupation sont encore pires.

A cette équation, il faut ajouter les constantes inhérentes à notre championnat

  • Il n’y a pas de Dan Carter français
  • Il n’y a pas de Ma’a Nonu français
  • Il y a 36 3ème ligne de bon niveau

Et pour finir : n’oublions pas que pour gagner le tournoi, il faudra soigner le score et mettre des branlées à 40 points d’écart.

Si on regarde ces éléments il ne nous reste plus qu’une possibilité :

  • Remplacer les 12, 13 et 15 par des 3ème ligne. Surtout, SURTOUT, leur interdire les passes. A la limite, on rappelle David Marty, mais il pourrait lui prendre des envies de courir.
  • Remplacer les ailiers par n’importe quel joueur qui claque des drops de 60 mètres. Il y en a plein la proD2 et les clubs de foot.

Après, la stratégie est simple. On défend, on gratte. Dès qu’on a la balle, on tente le drop. A 50% de réussite, en tentant 40 drops par matchs, statistiquement ça passe.

Propos recuillis par Marcel Caumixe.