VI Nations : Le Cuilleredeboissico, ou le Grand Chelem à l’envers
par La Boucherie

  • 26 February 2014
  • 10

 

Par Talu,

 

Le contexte

Comme chaque année, c’est la course aux différents trophées pour les protagonistes du Tournoi des VI Nations. La France vient de laisser passer sa chance de Grand Chelem, trop habituée à s’emmerder le vendredi soir, et l’Irlande, seule encore en course pour cette récompense prestigieuse a perdu tout espoir d’une Triple Couronne en se faisant battre par la perfide Albion. Mais pour certaines équipes moins en vue telles l’Ecosse et l’Italie, le trophée accordé à l’ultime vainqueur n’est qu’une illusion, une simple farce. Ah oui au fait, on va parler du Italie-Ecosse, te fais pas chier à lire si tu n’aimes qu’envoyer des journaux en l’air au son du pilou pilou, les mecs viendront pas chez toi.

Ces 2 équipes ont pour habitude d’être les équipes “qu’il faut respecter”, c’est à dire que telle une équipe italienne ou écossaise en H Cup (tiens c’est marrant ça, y a peut-être une corrélation…), si tu leur mets pas 30 pions t’as raté ton tournoi. Seulement, entre trophée Eurostar, trophée Garibaldi, Millenium Trophy, Calcutta Cup, et autres Centenary Quaich, c’est bien la Cuillère de bois qui fait saliver nos amis transalpins et bouffeurs de haggis.

Et cette année, c’est la bonne ! Du côté de l’Écosse, on a profité de ses 2 premiers matchs pour prendre une longueur d’avance. Une première défaite encourageante face à une Irlande qui n’a pourtant pas foutu grand chose, parachevée par une vraie démonstration sans mettre un seul point face à l’Angleterre (la princesse Anne, comme chaque année dans les tribunes spécialement réfrigérées de Murrayfield aurait – mais ce sont des rumeurs – joui d’admiration au coup de sifflet final) ont permis à tous les observateurs de doubler leurs points “équipe revancharde” dans leurs papiers de présentation du match.

Côté italien, quelques doutes subsistent cependant. Certes, les fondamentaux sont en place et la Squadra Azzura (je suis à la fin de l’intro et j’ai déjà casé 3 appellations différentes, je sais pas comment je vais faire pour pas me répéter dans l’article…) a réussi à bien se faire respecter en 12 minutes par les Français. Seulement un essai de dernière minute et une mêlée dominatrice, doublés d’une défaite trop respectable en terres galloises, font craindre le pire. Seule consolation, la possibilité de bénéficier de la pression du public reste une grande source d’optimisme.

 

Le Match

Pour débuter ce Crunch à l’envers, le coup d’envoi est donné par Duncan Weir, alors que le monde entier préfère regarder Clermont tataner le MHR.

D’entrée de jeu, ce sont les joueurs de cornemuse qui se mettent en valeur. Profitant d’une bonne avancée de son pack et se retrouvant presque esseulé sur son aile, Tommy Seymour fait preuve de toute son intelligence situationnelle et tape un superbe coup de pied à suivre en ballon mort.
L’Italie enrage et sur le renvoi, quelques passes d’armes ont lieu entre les différents protagonistes.

Un peu plus tard, une bonne série d’avancées des Mozzarellans voit ces derniers se retrouver dans les 22 adverses. Un premier en-avant non signalé par l’arbitre, et Ghiraldini se decide à faire une “Huget” de 3 mètres (désormais punie), le but étant de permettre d’aplatir sans marquer et ainsi éviter les sanctions de l’IRB pour non combativité. Malheureusement pour les Blancs, il y avait pénalité aux 22. Parisse tente de jouer vite pour ne pas prendre le score mais l’arbitre lui signale qu’il faut pas trop se foutre de sa gueule quand même. Tommaso Allan s’y colle, et croyant bien faire, il enquille les 3 premiers points en la mettant au-dessus.

Les minutes suivantes verront les 2 équipes faire du large large en prenant bien soin de reculer de 10 mètres sur chaque lancement, et les jeux au pied approximatifs succéderont alors aux pertes de balle et divers en-avant. À noter que depuis le début, l’Écosse fait parler son expérience en matière de wooden spoon (12 depuis 1902 tout de même) et pratique la technique du rebrousse chemin sur toutes les mêlées.

On joue alors la 22ème, et après une longue séquence parfaitement inoffensive, Richie Gray tente un plongeon désespéré afin d’éviter que l’arbitre ne voie la faute italienne au niveau des 40 en face. Laidlaw doit malheureusement s’y coller et rate le poteau de peu. 3-3

Le jeu repart, et les Italiens jouent trop bien, perçant sur presque 60 mètres. Profitant d’une montée adverse rapide, Furno tente de redonner sa noblesse à la passe dite “volleyée” en réalisant un superbe smash sur un ballon de Parisse. L’arbitre indique faute de fil et met balle à rejouer sur mêlée. L’Écosse est une nouvelle fois la plus prompte à s’écrouler et rend le ballon à Tommaso Allan. Cette fois-ci l’ouvreur ne s’en laisse pas conter et estimant que c’était suffisamment en coin, respecte les consigne de Jacques Brunel et la foire lamentablement.

On ne verra plus grand chose avant la 29ème, et une percée écossaise de 45 mètres sur un ballon rendu par Barbieri. Weir en profite pour faire parler sa vista en s’écroulant comme une merde sans même être touché grâce à un fameux crochet-tombé (masterisé en son temps par Christophe Dominici contre ces mêmes adversaires). Sur la contre-attaque, les Blancs ne flairent pas le piège et Wilson en profite pour s’étaler dans le camp adverse. Allan, qui attend tout de même son transfert vers une obscure équipe de CFA 3 comme tireur de coup franc histoire de gagner un peu plus de thunes qu’à l’USAP, tente le tout pour le tout et la passe. 6-3

Sur la remise en jeu, les Ecossais vont profiter d’un coup de pied de pupille asthmatique pour récupérer la balle. Au bout de 6 minutes d’une action à 24 temps de jeu entre les 40 et les 22 italiens, ils parviennent enfin à battre le record de non-dangerosité du Tournoi qu’ils avaient laissé depuis 2003 aux Gallois. Le stade est debout et l’arbitre, à la limite de l’endormissement, décide d’accorder une mêlée pour fêter ça.

Coup de pied italien à suivre et les 2 équipes s’engagent avec plongeons des 2 côtés. Pénalité à 30 mètres pour les Ritals qui ne l’avaient pas vue venir, vu qu’ils étaient 2 de plus sur les mains. Jacques Brunel ne se laisse pas avoir, et tel un Guy Novès génétiquement modifié, il montre les 7 doigts. Du coup touche foirée par les Italiens et les Ecossais se retrouvent avec la balle.

Pas fous, ils la laissent aussitôt échapper vers l’avant. Sur la sortie de mêlée suivante, Parisse prend exemple sur les charges picamolesques de la veille et se plante la tête dans le gazon. Le jeu rebondit et voyant le large surnombre à l’extérieur, Allan fonce dans le tas. Évitement sage de la défense au ras et l’ouvreur italien ne peut que s’écrouler dans l’en-but, bien aidé par le retour de Hogg qui le force à aplatir. À l’écoute des directives IRB sur le manque de points dans le meilleur Tournoi du Monde©, Steve Walsh ne prend pas le risque de la vidéo et accorde l’essai entre les perches. Transformation assurée en drop du talon, et l’Italie se retrouve avec un handicap de 10 points aux citrons.

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Parisse explique à ses joueurs qu’il ne faut pas parler à l’arbitre

 

Sur le coup d’envoi de la 2ème mi-temps, c’est la fête dans le bar. Bon c’est lié à Faf du Plessis (avec un nom pareil vous aurez deviné d’où il vient hein) qui vient de se faire caught behind et qui accorde donc un 3ème wicket aux Australiens. Bah oui, je regarde le match depuis Brisbane, et de toutes façons les commentaires étant assurés par Abeilhou et Cazalbou, peu de chances de bénéficier des points Lartot. Ça rend le challenge Guilford plus tranquille mais c’est pour la bonne cause.

Retour sur l’épisode de Derrick, dans lequel les Écossais bien déterminés décident de prendre les Italiens au football. Grosses séquences de jeu donc, et à la 46ème, Castrogiovanni se décide à ne plus s’en remettre à des plongeons qui restent généralement non sifflés et préfère assurer en tentant un étouffement au sol. 30 mètres en face, Laidlaw fait la moue et l’Écosse se retrouve à portée d’un essai transformé.

Nouvelle séquence de jeu, et nouvelle pénalité pour l’Écosse aux 45 mètres qui préfère assurer en partant en touche. Et là c’est l’explosion ! Lampard trouve John Terry à la 92ème qui assure le succès de Chelsea face à Everton. Mourad prend son téléphone et appelle Mourinho pour se renseigner sur ce jeune joueur international de 34 ans qui a l’air d’avoir pas mal d’affinités avec les femmes de ses collègues.

Du coup je rate un peu l’action, je recommande une bière vu qu’un Anglais taquin en a profité pour se farcir la mienne sur son t-shirt, et l’Écosse obtient une pénalité à 22 mètres en face. Poursuivant la logique, on joue vite pour ne pas prendre les points. Walsh est dépassé et ne peut que constater les dégâts quand il s’aperçoit que le Chardon en a profité pour faire un nouvel en-avant. C’en est trop pour cette Italie revancharde, qui va alors jouer son va-tout. Elle tente de relancer de ses 22, et tel un vulgaire footballeur, Gori s’écroule en tentant de prendre un trou au ras. L’Écosse fait quelques passes sur la largeur et se retrouve à devoir courir tout droit et aplatir par l’intermédiaire de Dunbar.

Laidlaw évite tout de même de revenir au score, mais se retrouve désormais sous la menace du moindre scoring. 13-11 pour l’Italie qui revit.

Les 20 minutes suivantes ne montreront pas grand chose, hormis un concours de coups de pied en touche directe entre Weir et Hogg. Les 2 équipes s’affrontent aux alentours de la ligne médiane, évitant soigneusement les jeux au pied longs et autres envolées, et préférant les chandelles foireuses et en-avant opportuns dès l’approche des 22 adverses.

A la 67ème c’est le drame. Oubliant toutes les consignes de jeu, l’ensemble de la ligne de 3/4 du XV du Chardon va se retrouver à proposer une action de grande classe pleine de soutien au porteur de balle et de courses chaloupées conclues une nouvelle fois par Dunbar. L’explication est simple. C’est Cusiter, qui n’était pas au courant du plan, qui est à la baguette. Ne pouvant que constater les dégâts, Walsh un peu partisan tente l’appel vidéo. Il faut rappeler d’ailleurs qu’en plus de son tatouage marrant, du fait qu’il officie pour la fédé Australienne qui n’a pas moyen de trouver un quelconque arbitre correct dans le pays, et de son ancienne addiction à l’alcool, Walsh est né en Nouvelle-Zélande. Et comme le dit l’adage, Les Néo-Zélandais ne sont jamais que des Ecossais ayant appris à jouer au rugby. Transformation en face, l’Italie exulte.

Enfin pas pour longtemps. Sur l’action suivante les Italiens se mettent à la faute. Malgré leur tentative de remplacer avants et 3/4 dans le jeu histoire d’assurer le coup, Furno, 2ème ligne de formation, ne peut rien quand il reçoit une passe de Parisse sur son aile et se retrouve obligé d’aplatir. Orquera manque l’égalité parfaite en transformant et les Italiens se retrouvent à nouveau 2 points devant.

Les dernières minutes ne donneront rien a priori, les consignes ayant été passées aux remplaçants. Les attaques bien cadenassées prendront le pas sur les défenses fébriles, et je retourne commander une bière.

Quand soudain…
Un cri dans le bar.
STUPEUR !

Les Sudafs continuent de piner les Australiens malgré un faible 29 pour AB De Villiers (les noms Sudafs…), et c’est quand même pas un but d’Arsenal qui va provoquer ça…

Non non. A la 79ème, tel un vulgaire Contepomi trop sûr de son fait et ne sachant pas compter, Weir trébuche en face des poteaux et se retrouve à taper dans un ballon ayant rebondi. Le drame se joue alors et le ballon s’échappe entre les perches. Walsh est impuissant, les Italiens exultent et le coupable retourne en courant dans son camp, évitant les regards de ses coéquipiers qui ne manqueront tout de même pas de tenter de l’étrangler en direct. Rigoletto retentit pour signifier la fin du match et le stade se lève pour applaudir la performance de l’équipe locale. L’Italie a réussi à garder sa vista même à domicile et tentera de renouer avec le Grand Chelem à l’envers lors des 2 matchs “faciles” restant à jouer. Du côté de l’Ecosse c’est la consternation, et on sent que le retour dans son pays natal sera dur pour l’ouvreur fautif, et les espoirs de cuillères disparaissent pour de bon cette année.

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Duncan Weir, 2 qui le tiennent, trois qui… ah merde ça rime plus

Bilan

Les plus:

Richie Gray, s’il n’a pas pu s’empêcher de faire le malin en touche, aura quand même marqué les esprits d’une chistera au juge de touche à la 72ème.

Sergio Parisse, qui a su se mettre au niveau d’un vulgaire Picamoles de Galles le temps d’un match.

Hogg, insipide aussi bien au pied qu’à la main.

La mêlée écossaise, très en vue.

 

Les moins:

Tommaso Allan, qui a semblé très perturbé et ne savait pas qui de de sa mère italienne ou de son père écossais il fallait privilégier.

La mêlée italienne / La touche écossaise, du grand n’importe quoi.

Dunbar, 2 essais qui font tache.

Duncan Weir qui, s’il a su cadenasser le match quasiment jusqu’à la fin en étant aussi prévisible qu’une vanne du service sports de France 2, restera malgré tout l’homme du drop de la victoire.