Pastigo à la rencontre du meilleur public de France
par Pastigo

  • 06 June 2012
  • 71

Par Pastigo

A la boucherie, nous nous sommes régulièrement extasiés devant la qualité du jeu proposé par notre Top14 cette année, avec un pic formidable les vendredis soirs en hiver. Mais bien trop souvent nous regardons ce bijou sans en admirer l'écrin, qui pourtant peut largement démultiplier le potentiel du spectacle qui plonge alors complètement dans un subtil bouillon de Fédérale. C'est ce qui m'est arrivé et ce que je vais tenter de vous conter ici.

J'ai donc assisté à Toulouse-Castres, ce qui était jusque-là prévu, mais dans un endroit que tout être à peu près lettré ne peut concevoir. Cette intégration forcée en milieu vinicobouseux tient à une erreur de jeunesse, que je paye chaque jour et que je tairai pour l'occasion.

Car il faut savoir que ma présence à cette heure et à cet endroit n'est pas de mon chef. A vrai dire, c'est un viol diplomatique auquel j'ai dû me résoudre. Vous savez qu'on ne fait pas toujours ce qu'on veut, et qu'il faut souvent faire preuve de sa bonne volonté, même si cela fait copieusement saigner du nez. Me voilà donc très chaleureusement convié à St Dier d'Auvergne, ou plutôt sa proche banlieue. Vous ne connaissez pas St Dier D'Auvergne ? Alors dites-vous que votre vie n'est que bonheur et félicité. Sa proche banlieue, je vous laisse découvrir sur googlemap ce que cela peut signifier. Il faut savoir que sur place, je pense avoir eu affaire à une trentaine de personnes, tout en n'ayant entendu que 4 noms de famille. A mon arrivée, le “chef de la tribu” m'a accueilli à bras ouverts, d'un “on te voit jamais, ça fait plaisir !” (en substance, car cette phrase semble à peu près construite et illustre assez mal le personnage) j'ai bafouillé une excuse, “oh… heu… boulot ahah, c'est loin ici ohoh…” comme s'il fallait s'excuser de renifler cet être déjà suant. Le cadre ne mérite pas l'affront qui lui est fait. C'est beau. Mais au milieu beugle la meute où les roucasseries les moins chères vivent déjà de beaux succès. L'imbécile se sent obligé de me présenter tout le monde. Un seul d'entre eux aurait suffi, ils se ressemblent tous, et chacun me fait part de son humour raffiné à chaque poignée de main plus ou moins moite, c'est selon. Au loin, un barbecue aussi grand qu'il est composé de matériaux recyclés dont je ne veux surtout pas connaître l'origine. Un rétroprojecteur (mais où ont-ils trouvé ça ???) m'indique que je verrai au moins le match, c'est déjà ça de sauvé. Je m'écarte au bout d'un moment, à la recherche d'un rondidiou de brique sur ce portable qui me permettrait de retrouver l'espace d'un instant cette bouée technologique et un peu de doux réconfort. Si doux réconfort… En vain à plusieurs reprises.

Le mauvais alcool coule à flot. Je crois très sérieusement que tout ce qui est sous forme liquide est potentiellement considéré par ces abrutis. Ils m'en servent, les effrontés. C'est incroyablement mauvais, d'autant plus pour quelqu'un qui ne boit pas, ou peu. S'ils pensent que me saouler me permettra d'apprécier le moment, ils ignorent sans doute les effets de l'ivresse sur les penchants meurtriers de tout homme en cette situation. Cependant, cela me libère de cette retenue polie. Et puisque je suis coincé là, autant profiter du spectacle pour tenter quelques expériences. Si je suis un peu chaud, eux sont carrément saouls, pour peu qu'il leur arrive de ne pas l'être. Et évidemment quand on s'amuse comme des petits fous par ici on en arrive vite à l'emploi de thématiques porteuses. On commence par lésarabes, on fera légonzesses plus tard. Un réflexe me vient vite, puisqu'ils connaissent mon prénom. Je refuse une saucisse car “je mange pas de porc” et “bah oui, je m'appelle « Pastigo Benaziz ». Et pourtant je crève de faim après cet alcool de slovaque. Je jure qu'il y en a un… bref, j'ai lu dans ses yeux que j'étais le démon. Transformé en Benaziz, tout à coup la soirée est un peu plus calme, j'évite surtout les accolades du plus beau spécimen. Cette idée est simplement géniale. Je passe sur les diverses blagues de haute qualité que j'ai entendues, je me suis promis de ne pas les retenir.

Alors que l’ersatz de vin qui s’échappe sans discontinuer de ces réceptacles en plastique gris que seuls de vrais connaisseurs de PMU savent apprécier, l'heure du match salvateur approche. Il est d'ailleurs temps de faire un point sur la contradiction technologique qui habite ce cadre du milieu du XVème siècle. L'autochtone s'est équipé d'un écran géant, d'un rétroprojecteur et d'un pc portable qui depuis bien trop longtemps diffuse une musique d'am

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biance digne des convives. Je ne m'étonnerai même pas de la présence anachronique des ces instruments, après tout la ville n'est qu'à un jour de marche et ils y vendent probablement toutes les semaines leurs scandales fromagers. Non, je me demande simplement combien de temps le propriétaire du portable a regardé la visite virtuelle Windows XP au 1er démarrage avant de comprendre qu'elle tourne en boucle. Je suis cependant le seul à m'inquiéter de voir que ce même portable, pourtant relié au réseau électrique créé pour l'occasion, semble tourner sur ses batteries. Il va de soi que l'équipement qui diffusera le match est branché sur le même gros rouleau de chantier, et je sens poindre l'échec cuisant de cette soirée pourtant si charmante. Et je ne me trompais pas, puisque le Chef exclame une phrase digne de son rang quand le « responsable réseau » local voit son matériel ne pas répondre lors du démarrage de l'événement. Comme le problème est évident et que ces mollusques vont y passer l'heure suivante, je me dirige vers l'affreux cabanon du fond duquel s'échappe le câble. On y trouve tout le nécessaire du parfait méchoui, mais surtout un gros interrupteur de chantier que j'actionne avec prudence, conscient de la qualité des normes de l'installation électrique agricole. Le miracle apparaît. Le responsable réseau cesse de suer son étoilé.

La magie des frères Lumière, qui n'étaient pas là aujourd'hui, semble émerveiller l'un des plus rougeauds dont j'ignorerai jusqu'au bout s'il est capable de la combinaison sujet+verbe+complément, puisque depuis maintenant presque 3 heures je ne l'ai entendu qu'hurler « ASM ! ». Vu le nombre d'occurrences, je pense que cet animal ponctue sa vie de la sorte à chaque fois que son verre est vide. Rien ne sert de freiner ses cris en lui précisant que nous ne sommes que samedi, que l'ASM ne joue pas, seul l'écran qui l'aspire en aura raison.

Les cubis migrent vers le centre de cette scène et avec eux l'armée de zombies congénitaux, tels des bousiers derrière un ruminant. Pendant ce temps les femmes quittent le coin qui leur avait été réservé et commencent à jeter les assiettes en carton. Elles sont habiles et dévouées, mais je pense qu'elles ignorent encore qu'elles ont le droit de vote.

Le match débute, je laisse ceux qui pensaient encore lire quelque chose à propos de rugby ici se diriger vers le compte-rendu du Stagiaire, il n'en sera point question. Je tiens simplement à dire que la compagnie de ces Ostrogoths a considérablement amélioré l'image que j'avais de mes connaissances rugbystiques. Je jure, oui je jure, que j'ai entendu la phrase « y'a péno là !!! ». A moins que Pénola ne soit également un alcool de leur cru, cela illustre à quel point j'ai baigné ras la gueule dans les valeurs du rugby, les vraies aromatisées à l'anisette, celles de nos anciens dont on nous ressasse l'héritage à chaque fois qu'il n'en est point nécessaire.

A mon grand désespoir Toulouse sortira vainqueur de cette bien médiocre joute. Désespoir puisque comme tout couillon moyen qui n'y connait rien, le sauvage encourage forcément Toulouse (et l'OM le reste du temps, c'est écrit derrière la bagnole).

L'espoir d'une victoire de Castres, qu'un de ces fruits d'inceste aura osé qualifier de pays de pécores, aurait sans doute fait taire la viande. Il n'en fut rien, bien au contraire, et il m'aura fallu bien des prétextes après avoir souffert mille tourments pour réussir à m'échapper plus ou moins poliment cette fois-ci de cette scène de chasseurs.

Alors certes, je ne sais pas si j'étais tout à fait apte à partir en voiture, mais je suis certain que je n'aurais pas pu tenir plus longtemps dans cette gloire au malfaisant. J'avais de toute façon besoin du doux réconfort qui m'attendait à mon retour, et qui saurait enfin me rappeler que quelque part ce monde est beau. Ce réconfort m'a sans doute permis de rire de l'événement que j'aurais probablement enfoui et déjà oublié aujourd'hui.

Je vais conclure ceci par une information d'intérêt général : quelques-uns de ces monstres vont bel et bien au stade. Ce qui me permet de relativiser, et de me dire que le fait de ne pas avoir le temps de m'y rendre n'est peut-être pas si grave. Je ne crains pas non plus leur vengeance, très franchement qui pourrait croire qu'ils ont internet ?

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